2/26/2013

Comment pouvons-nous comprendre l'allégorie de la Colombe dans le Rituel de Cagliostro ?



ORDRE DE LYON


ORDRE MACONNIQUE RETABLI DE MEMPHIS ET MISRAIM

Souverain Sanctuaire de Béthanie

R :.  L:.  LA SAGESSE TRIOMPHANTE
Loge de recherche sur les Rites Egyptiens

A LA GLOIRE DU GRAND ARCHITECTE DE TOUS LES MONDES,
Mes Frères en vos Degrés, Grades et Qualités,

Comment pouvons-nous comprendre l'allégorie de la Colombe dans le Rituel de Cagliostro ?

Comme déjà cela fut évoqué dans une méditation antérieure tentant de répondre à l'interrogation de CAGLIOSTRO : A quels indices reconnaîtrais-je un
véritable maître dans l'art primitif ?, nous fumes amené à comprendre que, similairement à la littérature alchimique, emplie d'éléments inutiles ou farceurs
CAGLIOSTRO a pu égrener dans son catéchisme appelé volontairement et faussement Rituel, des suggestions qu'il ne convient pas  de prendre à la lettre, sauf à risquer de s'engager vers des voies qui ne mènent nulle part, du moins hors du Chemin proposé par le fondateur des Rites Egyptiens.

L'allégorie de la Colombe figure parmi les exemples typiques de ce qu'il ne convient pas de prendre à la lettre, mais d'entendre selon l'esprit, nous cesserons jamais assez de le répéter non seulement CAGLIOTRO est Chrétien, mais le Rite Egyptien dans sa forme originelle et ses continuations le sont tout autant, si l'on excepte à juste titre des déformations, malheureusement trop souvent suivies, de prétendus continuateurs de cette illustre Tradition.
A la question : Quel est l'emploi ou quels sont les travaux de la colombe ?
Le catéchisme de CAGLIOSTRO répond : À servir d'intermédiaire entre l'ange du Seigneur et les élus, à faire connaître à ces derniers la volonté divine et enfin à les convaincre évidemment de l'existence et de la grande puissance de Dieu.

Le Rituel de réception SELON L'ORDRE DU GRAND COPTE POUR LE GRADE DE MAÎTRE DE L'INTÉRIEUR DE LA LOGE ÉGYPTIENNE  commence par cette prière :
" À l'ordre, mes frères. Au nom du Grand Copte, notre fondateur, cherchons à agir et à travailler pour la gloire de Dieu, de qui nous tenons la sagesse, la force et le pouvoir et tâchons d'obtenir sa protection et sa miséricorde, pour nous, pour les souverains et pour notre prochain. Joignez vos prières aux miennes pour implorer en ma faveur son secours et les lumières qui me sont nécessaires."

Conscient que l'homme n'et rien sans le secours de la Grâce et que parmi les moyens offerts pour se rapprocher, autant que faire se peut, de La Présence Divine, CAGLIOSTRO propose d'invoquer les sept anges qui environnent le Trône de Dieu :
"ô Grand Dieu, Être suprême et souverain, nous vous supplions du plus profond de notre cœur, en vertu du pouvoir qu'il vous a plu d'accorder au G.C., notre maître, de nous permettre de faire usage et de jouir de la portion des grâces que nous a données le G. C, en invoquant les sept anges qui environnent votre trône et de les faire opérer et travailler sans enfreindre vos ordres ni blesser votre innocence."

INVOQUER, N'EST PAS EVOQUER ! Il n'est aucune pratique magique chez CAGLIOSTRO qui ne cesse d'inviter ses Frères à pratiquer le bien et à prier Dieu, ainsi que cela fut maintes fois rappelé en nos travaux antérieurs.

Les rapporteurs de la cérémonie touchant l'exaltation à la maîtrise, déclarent que la colombe serait un enfant : il n'est aucun passage du Rituel de CAGLIOSTRO, par nous relu, qui donne une quelconque précision sur qui serait ou devrait être la personne désignée sous cette appellation.

Qu'il nous soit permis un rapprochement entre l'idée d'un enfant en rapport avec le monde angélique tel que pensé généralement en ce qui touche la cérémonie de la colombe, avec ce rappel : "Gardez-vous de mépriser aucun de ces petits, car, je vous le dis, aux cieux leurs anges se tiennent sans cesse en présence de mon Père qui est aux cieux." (Mathieu XVIII, 10)

Ne méprisons donc pas cette cérémonie de la colombe telle que décrite, et tentons plutôt d'en  comprendre le sens.

D'autant qu'en réplique à l'évangéliste, CAGLIOSTRO en son catéchisme ne manque pas de rappeler par cette interrogation :

"D. Qu'avez-vous observé dans l'intérieur de ce temple ?
R. Une colombe très chérie et très favorisée de Dieu."






I
La cérémonie se déroule selon les temps suivants :

- le Vénérable souffle trois fois sur la colombe
- le Vénérable place la colombe à l'intérieur d'un tabernacle
- la colombe est chargée de communiquer avec l'ange afin de savoir si le compagnon est digne de devenir Maître

Le sens en est donné dans le catéchisme livré à la suite de la réception :
"D.  Quel est l'emploi ou quels sont les travaux de la colombe ?
R. À servir d'intermédiaire entre l'ange du Seigneur et les élus, à faire connaître à ces derniers la volonté divine et enfin à les convaincre évidemment de l'existence et de la grande puissance de Dieu."

Que nul ne s'égare ou ne cultive les erreurs sans cesse réitérées : il n'est point de magie, point d'évocation, la voie proposée par CAGLIOSTRO est une voie de PRIERE et d'ACTON n'ayant qu'un seul but, faire La volonté de Dieu.

II

Le Vénérable souffle trois fois sur la colombe
1° - Le souffle de l'Esprit.

Avant l'œuvre des Six Jours, " le souffle de Dieu planait à la surface des eaux"
(Genèse I, 2). Le maintien primordial se fait par l'Esprit qui rend possible l'ordre
de  la création par le Verbe, l'abbé ALTA sera peut-être le seul à distinguer Logos et Verbe en sa belle traduction de Jean : "Dans le Principe était le Logos, en Dieu était le Verbe, Et c'est Dieu qui était Verbe."  (1) et, pour revenir à l'Esprit, Il parfait la création comme le souligne Saint BASILE : "Il s'ensuit que c'est par la volonté du Père que les esprits serviteurs subsistent, par l'acte du Fils qu'ils arrivent à l'être, par la présence de l'Esprit qu'ils reçoivent leur perfection." (2)

Toutefois, pour les Pères et notamment  pour BASILE, la perfection de l'homme, de la nature, n'est possible qu'en communion avec Dieu.

Ce souffle manifesté sur la colombe voudrait rappeler symboliquement le retour de l'Esprit qui avait quitté le monde à suite de la Chute, monde d'avant la Chute où l'home était en pleine communion avec Dieu et Sa Création manifestée à compter du Troisième Jour, en dessous de l'étendue séparant les eaux supérieures et les eaux inférieures au soir du Deuxième Jour. (         Genèse I, 7-11)

Ce souffle du Vénérable est un symbole, il est évident que CAGLIOSTRO ne se compare pas, ni ne fait comparer le Vénérable Maître à NSJ+C qui, au soir de la résurrection, souffla sur les apôtres, cette Pentecôte Johannique si oubliée :

"Le soir de ce même jour qui était le premier de la semaine, alors que, par crainte des Juifs, les portes de la maison où se trouvaient les disciples étaient verrouillées, Jésus vint, il se tint au milieu d'eux et il leur dit : " La paix soit avec vous. " Tout en parlant, il leur montra ses mains et son côté. En voyant le Seigneur, les disciples furent tout à la joie. Alors, à nouveau, Jésus leur dit : " La paix soit avec vous. Comme le Père m'a envoyé, à mon tour je vous envoie. "
Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et leur dit : " Recevez l'Esprit Saint ; ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis. Ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus. " (Jean, XX, 19-24)

Ne l'oublions pas, la perfection de la relation de l'homme à Dieu le Père se fait sous réserve de la Présence de l'Esprit.
Attendu que le Maître au sein de notre illustre Tradition fidèle aux Anciens Devoirs et à la Franc-Maçonnerie Universelle est censé être parvenu ou disposer tout du moins des moyens pour tendre vers une certaine perfection par l'application des Devoirs qui sont liés à la Fraternité, expression de la Bienfaisance comprise comme manifestation de la Charité envers tous les êtres, ce souffle donné par le Vénérable Maître n'est-il pas le rappel symbolique de l'état de perfection  auquel doit tendre le Maître Maçon ?

Alors qu'il ne s'agira pas pour le Maître Maçon et la Loge de prétendre s'identifier à la Très Sainte Trinité dans Son essence ou Sa Création, on comprendra que le Christianisme de CAGLIOSTRO s'opposant à la révolution Andersonienne, fasse référence au symbole de l'Esprit par le souffle, lorsqu'avec les autres Pères, Athanase d'Alexandrie nous rappel cette nécessité de la Présence de l'Esprit lorsqu'il déclare : "En effet, le Père fait toutes choses par le Verbe dans l'Esprit, et c'est ainsi que l'unité de la Sainte Trinité est sauvegardée, ainsi que dans l'Eglise est annoncé un seul Dieu, qui est au dessus de tous et agit par tous et est en tous." (3)

Avant d'accéder à la Maîtrise, l'unité de la Loge des Maîtres Maçons est de surcroît exposée aux oreilles qui ne refusent pas la Réforme Chrétienne  de Lyon celle de CAGLIOSTO, il s'entendait bien entendu.






Le Vénérable place la colombe à l'intérieur d'un tabernacle
2° - Le tabernacle comme symbole de la Présence du Christ.

Le tabernacle n'est pas celui de l'Ancienne Alliance puisque Chrétien, CAGLIOSTRO n'ignore pas ce que rappelle l'Apôtre : " Tout grand prêtre est établi pour offrir des dons et des sacrifices ; d'où la nécessité pour lui aussi d'avoir quelque chose à offrir. Si le Christ était sur la terre, il ne serait pas même prêtre, la place étant prise par ceux qui offrent les dons conformément à la loi ; mais leur culte, ils le rendent à une image, à une esquisse des réalités célestes, selon l'avertissement divin reçu par Moïse pour construire la tente : Vois, lui est-il dit, tu feras tout d'après le modèle qui t'a été montré sur la montagne. En réalité, c'est un ministère bien supérieur qui lui revient, car il est médiateur d'une bien meilleure alliance, dont la constitution repose sur de meilleures promesses." (Hébreux VIII, 3-7)

Ce tabernacle de l'Ancienne Alliance construit tel une tente de tissus divers, est obsolète depuis l'Incarnation puisque c'est Jésus+Christ qui est maintenant manifestation permanente de La Présence   devant notre Foi, l'Apôtre déclarant :
" Elle est pour nous comme une ancre de l'âme, bien fermement fixée, qui pénètre au-delà du voile, là où est entré pour nous, en précurseur, Jésus, devenu grand prêtre pour l'éternité à la manière de Melkisédeq." (Hébreux VI, 19,20)

Le tabernacle que suggère CAGLIOSTRO est une fois encore un symbole utilisé pour, non pas enfermer la colombe dans ce lieu clos, mais expliquer que l'être ainsi dénommé Colombe, représentant de surcroît la Loge des Maîtres Maçons, se trouve en pleine communion avec NSJ+C, présent non seulement dans le tabernacle mais en fait dans tout le champ de la Création notamment par cette Présence spirituelle " Car, là où deux ou trois se trouvent réunis en mon nom, je suis au milieu d'eux. " (Matthieu XVIII, 20)

Cette union  par la prière fut déjà évoquée dans notre méditation sur le catéchisme qui nous occupe, CAGLIOSTRO expliquant notamment :
"D. Quel moyen faut-il employer pour obtenir cette grâce de Dieu?
R. En l'adorant, en respectant son souverain et surtout en se consacrant au bonheur et au soulagement de son prochain, la charité étant le premier devoir d'un philosophe et l'œuvre la plus agréable à la Divinité. À cette conduite, il faut y joindre des prières ferventes pour obtenir de sa bonté qu'il incite un de ses élus à vous dévoiler les arcanes de la nature."






La colombe est chargée de communiquer avec l'ange afin de savoir si le compagnon est digne de devenir Maître
3° La relation avec les messagers de Dieu

Comme nous avons pu déjà l'évoquer en d'autres méditations, les anges n'apparaissent  pour la première fois, que lorsque le couple originel est chassé du Jardin d'Eden (Genèse III, 24), ils se manifesteront à l'homme comme envoyés de Dieu, livrant généralement un message.

L'ange qui n'a pas chuté et qui peut-être bien appartient au champ de la Création qu'il ne nous est pas permis de connaître et sur laquelle l'Œuvre des six Jours se tait, à savoir le sort des eaux supérieures à l'étendue créée le Deuxième Jour (Genèse I, 6-8), peut encore être messager de Dieu, en l'espèce, s'il est très certain que dans les faits, jamais CAGLIOSTRO ne procéda à la cérémonie telle que décrite, la symbolique suggérée de la relation à l'ange ou à des anges, en l'occurrence ceux des sept planètes, nous invite à comprendre que CAGLIOTRO suggère que l'interrogation posée, ne porte ni sur les qualités d'un instant, d'un lieu, d'un état, mais doivent être en communion avec la Création universelle symbolisée par les sept planètes.

Sept planètes, expression de la récapitulation selon l'Apocalypse de Jean, et le voyant de Pathmos de déclarer : "Puis un des sept anges qui tenaient les sept coupes remplies des sept derniers fléaux vint, et il m'adressa la parole, en disant: Viens, je te montrerai l'épouse, la femme de l'agneau." (Apoc. XXI, 9)

L'Epouse c'est l'Eglise, cette ecclesia faite de tous les êtres qui hier, aujourd'hui ou demain, viendront ou reviendront à Dieu, dont le plus grand des commandements rappelé par NSJ+C est d'aimer son prochain, qu'est-il demandé à celui qui entend devenir un Maître Maçon, sinon de pratiquer la Fraternité, quelle est cette fraternité, elle n'est pas réservée aux seuls membres de notre auguste société, elle doit être pratiquée envers tous les êtres sans aucune distinction, tel est de le premier Devoir du Maître Maçon, tel est le sens de cette cérémonie qui n'a pour vocation que de rappeler ce que nous dit l'Apôtre :
" Quand je parlerais les langues des hommes et des anges, si je n'ai pas la charité, je suis un airain qui résonne, ou une cymbale qui retentit. Et quand j'aurais le don de prophétie, la science de tous les mystères et toute la connaissance, quand j'aurais même toute la foi jusqu'à transporter des montagnes, si je n'ai pas la charité, je ne suis rien. Et quand je distribuerais tous mes biens pour la nourriture des pauvres, quand je livrerais même mon corps pour être brûlé, si je n'ai pas la charité, cela ne me sert de rien.
La charité est patiente, elle est pleine de bonté; la charité n'est point envieuse; la charité ne se vante point, elle ne s'enfle point d'orgueil,"(I Cor. XIII, 1-5)

N'est-ce pas sur le Devoir de Charité que le Maître Maçon doit être sondé ?

En proposant l'allégorie de la colombe, CAGLIOSTRO se garde bien de prétendre qu'il nous appartient de juger notre Frère, car seul Dieu sonde les reins et les cœurs. (Apoc. II, 23)

J'ai  dit.

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1 - Saint Jean, traduit et commenté par ALTA, Paris, Henri Durville Ed, 1919, PAGE 25.

2 - BASILE DE CESAREE : Sur le Saint Esprit XVI, 38, Paris, Ed du Cerf, Coll S.C. N° 17 bis, page 379.

3 - ATHANASE D'ALEXANDRIE : Lettres à Sérapion  I, 28, Paris, Ed du Cerf, Coll S.C. N°15, page 134.






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