12/08/2005

DOC - FM Une parabole de la Maçonneire symbolique : C. CHEVILLON

Une parabole de la Maçonnerie symbolique Constant CHEVILLON Dans une étude récente, nous avons examiné le sens initiatique des épreuves et dégagé l'orientation philosophique et morale par elles imposée à l'Apprenti-maçon. II importe de sonder le problème plus profondément encore et de mettre chaque adepte en présence de la signification vraiment ésotérique de son ascèse personnelle. Par là seulement, il pourra se rendre compte du chemin à parcourir et de l'esprit vivifiant caché sous les voiles de la doctrine. De toute évidence, comme on va le voir, cette intelligence supérieure de la voie maçonnique convient à la seule élite, aux hommes de volonté dont la raison et l'entendement peuvent surclasser les contingences ordinaires de la vie humaine. La Maçonnerie, depuis ses lointaines origines, a toujours été appelée : Science royale, Art royal. Or, ces deux termes se complètent mutuellement, car la Maçonnerie est une science par la Gnose voilée sous les symboles et un art par la proportion, par le rythme qu'elle introduit dans les données de la science, en les réalisant sur le plan vital, sur le plan éthique et finalement sur le plan social. Par ce rythme, en effet, et par cette proportion, la beauté, sous tous ses aspects, est infusée dans la matière humaine, et la beauté est royale par destination, car elle se révèle, dans ses multiples manifestations, aux âmes nobles, aux belles intelligences et aux grands cœurs à l'exclusion des autres. Mais, entendus dans ce sens, l'art et la science ont aussi un autre nom, c'est le Grand Œuvre, objet de l'alchimie. Le Grand Œuvre peut se réaliser sur les trois plans de la nature. Sur le plan matériel, c'est la transmutation des métaux vils en or, en d'autres termes, la découverte de la Pierre philosophale. Sur le plan animique, c'est la recherche d'un équilibre constant des forces vitales, la découverte de la panacée et de l'élixir de longue vie. Sur le plan spirituel, c'est la stabilisation de la conscience dans les hautes sphères intellectuelles, c'est la découverte de l'élixir de vie, ou, plutôt, d'immortalité. Ainsi le maçon est un alchimiste, mais dans ce dernier sens seulement. II ne travaille pas à la transmutation des métaux : son labeur quotidien consiste à perfectionner son humanité, à purifier, à développer sa conscience, pour en faire un feu vivifiant, un feu inextinguible. Il ne s'agit point, ici, d'étudier l'arbre maçonnique dans ses ultimes ramifications ; nous nous contenterons d'explorer les grades du porche. Ils contiennent tout, du reste, dans leur riche substance et se prêtent à des synthèses de plus en plus vastes dont les degrés subséquents sont les formules adéquates. Sous quels symboles la Maçonnerie a-t-elle voilé la route de l'immortalité ? Sous le couvert des phénomènes naturels dont le flux incessant est à notre portée immédiate. La carrière du maçon, en effet, est assimilée au mouvement diurne de la terre sur son axe et à une révolution complète autour de notre soleil, c'est à dire à ces divisions temporelles qu'on nomme : le jour et l'année. Ces deux symboles, de fait, sont une seule et même chose ; ils se répondent membre à membre, comme dans une équation algébrique bien équilibrée. Le jour, pour le maçon, comporte cette partie du temps, qui s'écoule entre le lever et le coucher de l'astre-roi ; il se calcule sur la période idéale de l'équinoxe, moment où la lumière et les ténèbres sont réparties avec équité sur l'ensemble d'un hémisphère. L'Apprenti engagé arrive à la Maçonnerie pour voir poindre la lumière au-dessus de l'horizon. II a les pieds dans la nuit et son œil est frappé par le rayon lumineux. Tout autour de lui est enfoui dans l'ombre, mais la lumière s'accroît de minute en minute, chaque chose perd progressivement sa forme fantômale et revêt son aspect réel, s'échauffe, vibre et chante sous le baiser du soleil vivant. L'âme de l'Apprenti se revêt en même temps d'un manteau d'allégresse, car sa terreur et son angoisse deviennent amour et certitude. Or, le temps d'apprentissage va de 6h à 9h du matin ; le soleil, alors, chasse les miasmes de la nuit, résorbe la rosée et réchauffe les sillons. De 9h à midi, le compagnon se met à la besogne ; il ameublit la terre, il sème, il plante, il élague et redresse, il prépare la récolte future. Et le soleil vient au zénith pour féconder et mûrir ; le maître apparaît dans la moisson jaunissante et dans la vigne en fleurs. A ses mains expertes le vrai travail est confié, celui de préserver les fruits et de les récolter à la maturité totale. Il accomplit sa tâche en deux temps, de midi à 3h et de 3h à 6h. Au premier temps, c'est l'apogée de la lumière et de la chaleur, sa sève plus ardente monte jusqu'aux fruits, les nourrit et les dore : c'est la vie dans son complet épanouissement, la vie féconde, espoir des futures récoltes. Au second temps, c'est la cueillette : le soleil à son déclin va rentrer dans sa période d'apparente passivité ; de l'orient les ténèbres montent pour le sommeil et la mort. Cette allégorie s'adapte exactement, en raccourci, à la révolution annuelle de notre planète. L'apprenti, c'est aussi le printemps, la moisson qui lève et fleurit ; le compagnon, c'est l'été, les fleurs font place aux fruits ; la maîtrise, c'est l'automne, la maturité complète, la fin du cycle. Et l'automne glisse à l'hiver, c'est-à-dire aux bras de la mort. Mais le maître n'est plus l'apprenti, il a emmagasiné la récolte, il pourra parcourir le champ des ténèbres pour atteindre le renouveau, sans guide et sans autre soutien que les provisions amassées au cours des grands travaux de midi à la nuit. La Science alchimique n'est-elle pas le symbole concret de cette abstraite activité maçonnique ? On ne peut en douter. La matière appelée à devenir de l'or se revêt dans le creuset d'une couleur noire, c'est le corbeau ; les germes métalliques sont comme putréfiés et morts. Ainsi l'apprenti enfermé dans la chambre de réflexion est dans les ténèbres, au milieu des ossements et des débris de cercueils, car on ne peut passer du cercle profane au cycle de la lumière sans traverser le royaume de l'obscurité et de la mort. Mais la matière en putréfaction renferme en elle la puissance de renaître, de se revivifier ; elle endosse successivement toutes les couleurs de l'arc-en-ciel avant de refléter la couleur jaune, image de la lumière parfaite, polarisée par le prisme vital. L'apprenti, comme elle, possède un principe de régénération, la lumière de sa conscience. Les ténèbres voudraient l'absorber, mais il la conserve jalousement et, grâce à elle, il arrive à la porte du temple. Il est alors soumis au feu philosophique. Ce feu, c'est l'enseignement oral du maître de la Loge, ce sont les épreuves et les voyages à travers les éléments, origine de son expérience personnelle. Il voit alors apparaître la rouge lueur de l'aube. Puis, le feu poursuit son œuvre ; à chaque étape de l'opération, comme dans l'alchimie, la lumière prend une teinte différente et plus vive. Enfin, c'est l'apogée, la lumière est totale, sans trace de mélange ; la transmutation est accomplie, il a réalisé en lui l'or pur des philosophes, la divine sagesse, la vraie science a mûri dans son intelligence et dans son cœur. Mais, ce n'est pas tout. A l'apogée succède le déclin, non pas de la science, mais de la vie individuelle, rançon de notre état humain. Et le maître est mis en présence de la grande loi des alternatives dont la mort est l'un des pivots. En effet, comme toute vie s'en va inexorablement vers la mort, celle-ci est une porte ouverte sur une vie nouvelle. L'être s'épanouit à la lumière du soleil et se concentre à l'état latent dans la nuit du tombeau. Vie et mort sont des étapes successives sur la voie indéfinie de la vie éternelle. Or, le maître, comme nous l'avons dit, n'est plus un apprenti, il n'accomplit plus le ténébreux trajet dans la même inconscience, il n'a plus besoin d'adjuvant extérieur, il possède un viatique et il renaîtra bientôt sur un plan plus élevé du monde des idées. Tel est le sens profond de la légende d'Hiram, semblable de tous points à la légende d'Osiris, à celle de l'Yma avestique, de l'Yama hindou et du Min-Adam des plateaux caucasiens. Sur la tombe du maître, en effet, on plante le rameau d'acacia, le rameau d'or des initiés. Sous l'écorce de l'arbre, dans son cœur, sommeille le feu de la résurrection, le feu vital et spirituel qui, plus tard, à l'intersection des deux branches de la croix idéale, s'épanouira en cinqjetslumineux,symboles de l'étoile flamboyante. Pour pénétrer dans l'ésotérisme de la Maçonnerie du porche, nous avons fait appel aux procédés de la science alchimique. N'est-ce pas un rapprochement gratuit, une assimilation forcée et conventionnelle ? Non. La matière première du Grand Œuvre, le corbeau, n'est pas autre chose que la pierre brute, image de l'apprenti. Comme le feu philosophique va commencer à épurer la matière, le maillet et le ciseau contribuent à dégrossir le bloc informe sorti de la carrière ; les deux méthodes et leurs résultats sont identiques. La matière doit s'affiner progressivement dans le creuset, il faudra de même, par un travail parallèle, opérer le calibrage de la pierre. C'est pourquoi le compagnon copie, en quelque sorte, les métamorphoses réalisées au sein de l'Athanor. Au maillet et au ciseau, il ajoute d'autres outils : la règle, l'équerre et le compas. Avec leur aide, il détermine les arêtes, les angles et les courbes : d'un moellon brut il fait une pierre cubique, susceptible d'être utilisée dans la construction du temple. Ici, encore, la corrélation et la signification de l'activité sont semblables. Quant au maître, il n'a plus besoin d'outils spéciaux, il a réalisé en lui la Pierre cubique à pointe, il est lui-même la poudre de projection, la pierre angulaire de l'œuvre. Aussi, on place dans sa main la branche d'acacia réceptacle du feu latent qui informe toute vie nouvelle. Et c'est pourquoi, lorsqu'il prononce la parole : « Je connais l'acacia », il ne dit pas une chose sans portée, il fait appel à la loi du retour, germe de l'avenir. Annales Initiatiques – juin 1937

12/07/2005

DOC-FM - La Maçonnerie initiatique - Constant CHEVILLON

La Maçonnerie initiatique Constant CHEVILLON La maçonnerie est une grande chose, une chose éternelle. Non seulement elle habilite ses enfants à comprendre les courants d'idées venus de tous les points de l'horizon, à situer dans leur ambiance immédiate tous les actes de la personne ou de l'individu humain , mais elle est le parvis de toutes les initiations anciennes et modernes, bien plus, elle les résume et, en même temps, elle en est la quintessence. Le maçon véritablement initié peut se présenter partout le front haut, dans tous les milieux, il est à sa place. S'il a t pétri son âme, forgé son cœur et son intelligence avec les outils de la maçonnerie et selon son esprit, rien ne lui est fermé, car il possède la clef universelle, cette clavicule dont Salomon, prince parmi les adeptes, prétendait avoir le secret. Penchons-nous donc sur les prémisses de la maçonnerie initiatique et, pour ne point nous égarer dans le labyrinthe des opinions, fixons bien nos concepts. Dans toutes les fraternités, initiation est synonyme de science; un initié est celui qui détient la science ésotérique spéculative et la science cérémonielle ou pratique : la magie. Or, dans l'esprit de beaucoup, ces connaissances transcendantaies leur ont été transmises par les gestes, les paroles et les cérémonies concrètes de leur initiation elle-même. C'est exact à un certain sens, mais faux dans la réalité. Initiation a pour racine le mot latin «initium», commencement, les cérémonies initiatiques sont un simple prélude, un baptême dans l'invisible. Dans nos communautés religieuses occidentales, il ne suffit pas d'avoir reçu le baptême pour être un parfait chrétien. La baptême habilite simplement à suivre la voie christi-que, il imprime sur l'individu et la personne le sceau de la reconnaissance et du rachat; il est comme un enfantement spirituel, ou, tout au moins une naturalisation dans le royaume de la lumière. L'initié, comme le baptisé, peut donc être, à juste titre, considéré comme un citoyen du royaume de la lumière, il peut la revendiquer comme un autochtone, authentique rameau de la souche ancestrale. Il est coparticipant au royaume et celui-ci lui doit tous les avantages des fils de la lumière, mais dans une soumission de tous les instants aux lois régulatrices d'accession et de coopération à la lumière. Il y a donc, pour justifier l'apposition du sceau, une discipline à adopter et un effort à accomplir, car la conquête de la vérité est une lutte perpétuelle dont le succès ne dépend pas du droit pur à la possession mais de l'activité et de l'énergie déployées pour s'en emparer. Ce préambule permet de concevoir, dans une large mesure, toute la substance de la maçonnerie initiatique. Cette substance est une et double en même temps. D'un côté il y a la Gnose, de l'autre, la technique; ici la science, là les œuvres dont l'actualisation dépend de la saturation scientifique. Mais la science et les œuvres, la Gnose et la technique sont une seule et même chose, lorsque toutes les parties constitutives d'un être humain se sont concrétisées dans un vrai maçon. Comment l'initiation maçonnique s'y prend-elle pour engager ses membres dans la route de la science et de la technique et les conduire vers la réalisation de l'adeptat ? Tous les maçons le savent, mais il est Bon de réfléchir et de méditer. Lorsque le récipiendaire a triomphé des épreuves par les éléments, lorsqu'il a prêté son serment de silence et de fidélité, le vénérable lui donne le sceau et lui dit : «Je te reçois, crée et constitue apprenti maçon». C'est bien l'adoption, la reconnaissance des droits attachés à la nouvelle naissance. L'apprenti est constitué fils de la veuve, héritier éventuel de sa succession. Est-ce à dire qu'il est en possession de l'héritage ? Non, il a les mains vides, c'est à lui de puiser dans le trésor dont la clef lui est remise, à lui seul et selon la capacité de ses moyens d'assimilation. Il naît au monde de la lumière aussi nu que dans la génération sexuelle, mais il est apte à revêtir les voiles sacrés et la robe de la hiérophanie. Il est entré dans le royaume de la lumière, non pas comme un étranger, plus ou moins barbare, venu par la petite porte de l'immigration, il est entré comme un fils du sol; on ne parle pas à mots couverts devant lui car on ne cherche pas à lui celer l'intelligence de ses droits et de ses devoirs. Toutefois, il n'est pas initié il est seulement initiable, il doit ouvrir le temple clos aux étrangers. Le temple est immense et la cella est à l'autre bout de l'édifice. La maçonnerie le prend par la main et le guide dans la longue nef. A chaque pas elle l'arrête pour lui montrer les détails des colonnes, des stalles et des vitraux, lui en explique le sens, la portée et la raison d'être, et c'est la voie de l'initiation. Voilà pourquoi les étapes de la hiérarchie sont nombreuses avant d'atteindre à la suprême maitrise dont le 3ème degré de l'ordre est le symbole résumé. L'apprenti s'arrête dans le parvis et jette d'abord un coup d'œil circulaire autour de lui, il se pénètre ainsi de l'ambiance et s'habitue à la lumière pour situer la perspective idéale. Quand il voit l'ensemble sous un angle réel et non plus sous un angle imaginaire, il est mûr pour le travail efficace, il doit participer à l'œuvre jamais terminée de la construction de la nouvelle Jérusalem. Il doit se cantonner dès l'abord dans les humbles besognes, il sait voir, mais il ne sait pas encore utiliser les matériaux et les outils selon les règles harmoniques de la beauté, il sait équarrir, il ne sait pas sculpter. Il doit se perfectionner dans le compagnonnage, tel l'alchimiste qui donne à la «materia prima» la couleur noire, pour la transformer en couleurs les couleurs du prisme, avant de sortir de son athanor l'or brillant de la spiritualité. A force de travailler, d'entasser ébauches sur ébauches, le compagnon acquiert la science et la technique, il peut quitter le parvis pour se diriger vers la chambre du milieu, l'une des étapes majeures sur la voie du saint des saints. Il devient maître et peut à son tour guider les apprentis et les compagnons sur la route des réalisations. A ce moment, le fils de la Veuve, l'héritier du royaume s'est élevé jusqu'à l'initiation primaire, il a parcouru un cycle complet par lui-même, il a rompu le premier sceau, il est le maître des arcanes des petits mystères. Il possède une partie du secret de la vérité, la plus difficile à conquérir, car le point d'appui originel de ses efforts est à l'état embryonnaire et comme inconsistant. Arrivé à ce stade de l'initiation, beaucoup de maçons, le plus grand nombre peut-être, se croient au terme du périple. Ils sont convaincus d'avoir atteint la totalité de la science relative, la complète technique et le maximum de perfection, compatibles avec l'enseignement doctrinal de l'ordre. Dans le champ du symbolisme, des allégories et de l'art pratique accessible au commun des hommes, ils ont raison. Sur le plan des réalisations transcendantes, cette magie de la pensée et des actes, ils ont tort. Sans doute le grain de blé contient dans son infime substance le germe et les éléments nourriciers primitifs d'où sortiront plus tard et la tige et l'épi, sans doute il contient l'essence du pain dont les hommes soutiendront leur vie défaillante, mais si le laboureur ne le confie pas à la terre, matrice de toutes les végétations, il restera immuable dans sa solitude et la moisson de s'épanouira pas sous la claire coupole du ciel. C'est pourquoi la maçonnerie continue à distribuer la science initiatique à travers les méandres des Hauts Grades afin de féconder les germes latents conservés dans la chambre du milieu, comme le grain dans un silo. Dénier l'utilitié des Hauts Grades c'est arrêter l'essor initiatique dont le terme ne peut jamais être atteint, ou bien c'est faire de la chambre du milieu un athanor de perpétuelles transformations où tous les aspects de l'évolution seront mélangés et rendre impossible la sélection du froment et de l'ivraie, de l'or pur et des métaux inférieurs. D'autre part, imposer les grands mystères à tous est une profanation car les maîtres maçons n'ont pas tous la même envergure; certains d'entre eux sont appelés à comprendre et à expérimenter ce que d'autres devront toujours ignorer. Du reste, à ces maîtres il faut des maîtres, des juges et des défenseurs, il faut des prêtres du culte animateur. On ne peut pas non plus toujours quitter la truelle pour prendre l'épée, ni surveiller les ouvriers en construisant les plans de l'édifice. Une seule chose peut se discuter, c'est la manière dont les maîtres maçons envisagent les Hauts Grades et par conséquent, les grands mystères et surtout la façon dont ils les utilisent. S'ils ne sont pour eux que des hochets d'une puérile vanité, ils sont, en effet, bien inutiles et n'ont rien de commun avec la marque initiatique; mais seuls les sots peuvent les considérer comme tels, car ils sont matière d'ascèse personnelle et de devoirs et par conséquent matière à lourde responsabilité. Les petits mystères, la maçonnerie symbolique, forment les ouvriers, les exécutants, les soldats de l'idée, les claires intelligences et les mains expertes auxquelles le travail est confié, en un mot la cléricature de l'humanité. Les grands mystères, la maçonnerie des Hauts Grades, forment les chefs, les architectes, les sacerdotes, ceux qui conseillent et dirigent, savent où il faut frapper pour réussir, car ils sont entrés dans une certaine et progressive illumina tion. Les Hauts Grades surclassent l'initiation du porche, ils s'avancent à pas lents et sûrs vers le Saint des Saints. Essayons de comprendre : Les petits mystères prennent l'homme dans le bourbier passionnel et l'amènent par étapes au stade de la civilisation. C'est la taille de la pierre brute. Les grands mystères, s'appuyant sur le stade de la civilisation, poussent à la dernière limite du perfectionnement relatif, pour restituer l'humanité dans son état primitif de grandeur et de puissance. C'est le polissage de la pierre cubique. En d'autres termes, les petits mystères s'apparentent en quelque sorte à l'alchimie des corps, les grands, à l'alchimie des âmes et des esprits. Les premiers extraient les métaux du sein de la matrice terrestre, ils les débarrassent de toutes les scories pour les rendre purs et utilisables dans la métallurgie sociale et initiatique. Les seconds s'emparent des métaux purs et en tirent l'or philosophai, le métal parfait analogue à la lumière immaculée. Pour nous en tenir au langage allégorique de la maçonnerie et de l'alchimie médiévale, les une utilisent l'influence de Vulcain et de Vesta, les autres reproduisent l'activité d'Osiris et d'Isis dans la procréation d'Horus, et c'est une des raisons pour lesquelles le G, resplendit au centre de toutes les étoiles flamboyantes exposées dans les temples maçonniques du monde. Tout ceci, paraîtra peut-être, de prime abord, un peu lointain, trop intellectuel et par conséquent sans grand rapport avec l'initiation pratique et le véritable secret maçonnique. Non pas, j'emploie ici le langage de la maçonnerie, elle n'en veut pas d'autre; elle se tient toujours dans le symbolisme et l'allégorie qui sont la forme intellectuelle de la vérité. La maçonnerie ne donne directement son secret ultime à personne, il faut le découvrir et l'enlever de force pour son compte personnel, selon la parole de l'Ecriture : «Violenti rapiunt illud», les violents seuls le ravissent. Le secret de la maçonnerie puisqu'il est le fond même de la Gnose opérative ne s'expose pas du haut d'une chaire doctrinale, il se trouve dans les opérations du laboratoire, et ce laboratoire c'est la conscience et la volonté. Il faut étudier la Gnose spéculative et la transposer, par soi-même, en Gnose pratique, c'est-à-dire, et ici ne donnez pas au mot le sens péjoratif qui fait trembler les enfants et les adultes grégaires, en magie : la magie c'est la science appliquée; celui qui capte une chute d'eau et la transforme en énergie ou en lumière, fait un acte magique souvent sans le savoir, comme le prêtre qui célèbre le culte sur l'autel de son Dieu. Nous pouvons cependant, sans trahir aucun de nos serments aller plus loin. Le secret de la maçonnerie, je vous l'ai indiqué avec une clarté suffisante pour que vous puissiez, en soulevant le voile, le découvrir dans la suite de vos méditations. L'alchimie maçonnique n'est pas une cause, c'est une fin et elle a une fin, c'est de créer en chacun de ses adeptes évolués, l'or philosophai. Consultez les grimoires, si vous ne l'avez pas déjà fait, vous connaîtrez l'or philosophai. C'est la pierre rouge, la poudre de projection, ce germe aurifère, ce noyau positif d'une puissance incalculable sous un volume infime. Vous en connaissez la vertu. La poudre de projection mélangée à un volume mille fois supérieur au sein, de métaux inférieurs, les transmute plus ou moins immédiatement en or pur et de bon aloi. Et maintenant, penchez-vous sur le problème, vous n'aurez pas de peine à découvrir comment le véritable adepte de la maçonnerie peut être la poudre de projection de l'alchimie spirituelle. Vous comprendrez mieux encore combien un maçon doit être pur, puissant et volontaire, violent et doux à la fois, juste et miséricordieux, comment il doit être tout amour et charité pour se donner à ses frères et après s'être transmuté lui-même, transmuter ses frères. Vous aurez alors tous les éléments de la solution initiatique et vous pourrez avancer peut-être à grands pas, sur la route de la lumière sous l'égide de la Gnose Texte extrait de la revue « BELISANE » année 1978, la revue ne donne pas la source.

DOC-Mart.Instruc. concernant les init. Mart. CHEVILLON-CHAMBELLANT

Instructions concernant l’initiation Martiniste Données par Constant CHEVILLON et rappelées par René CHAMBELLANT En principe, l'Initiation Martiniste doit être conférée en une seule fois. Pratiquement, il est recommandé de la faire en trois fois, non pas pour perpétuer les innovations de PAPUS, mais pour s'assurer que les récipiendaires sont de véritables hommes de désir et non de simples curieux. Le temps qui séparera les initiations est variable, il dépendra du degré d'évolution du nouveau martiniste, de soin travail, etc. Il n'y a jamais intérêt à rapprocher ces initiations. Seul le SO 10 peut se dire vraiment Martiniste, mais l'enseignement martiniste peut, dès le premier degré, être dispensé dans son intégralité. Au SO 10 qui aura fait preuve d'une véritable compréhension de l'esprit du Martinisme, et qui sera jugé capable de transmettre à son tour l'initiation, il pourra être donné le grade administratif de SO 10 Initiateur (dit S.". I.". IV ou encore Initiateur Libre). Les martinistes doivent toujours se réunir autour (ou devant) un autel recouvert de trois nappes, blanche au-dessus, rouge au milieu, noire en dessous, et supportant le Pantacle, ainsi que trois Luminaires. Les assistants peuvent revêtir une robe blanche avec cordelière, le masque n'est utilisé qu'au cours des Initiations. Il est recommandé d'étudier les œuvres du P.'. I.'., les ésotérismes, les doctrines traditionnelles, le côté ésotérique et mystique des divers systèmes religieux, à l'exclusion de tout occultisme pratique. Ne jamais oublier que le Martinisme est un Christianisme transcendant, et que ceux qui ne se réclament pas de la Tradition chrétienne, ne pourraient se dire Martinistes. Signes de reconnaissance généralement adoptés par les martinistes :... Demande :... Réponse :... Lorsque plusieurs Martinistes libres se rencontrent pour travailler en commun, ils se réunissent au domicile de l'un d'eux. Ils ne sauraient constituer un groupement permanent; au contraire, leur groupe cesse d'exister une fois la réunion terminée. Pendant la réunion, l'un d'entre eux, l'Initiateur Libre, s'il en est un, sinon le plus ancien Martiniste, exerce les fonctions de Président, un autre, qui lui fera face, dans la salle, les fonctions de Substitut. Il doit y avoir sur la table: les trois luminaires, les trois nappes, le Pantacle traditionnel du Martinisme. Il est recommandé de faire brûler de l'encens, au moins au début de la séance. Au début et à la fin de la séance les assistants formeront la chaîne d'union, sans croiser leurs bras, en posant leur main droite sur la main gauche de leur Frère ou Sœur de droite. Pendant la chaîne d'union, les Frères évoquent en pensée le Philosophe Inconnu et les Maîtres Passés du Martinisme. Pour marquer le début et la fin des séances, afin d'isoler l'assemblée du monde profane, un court dialogue s'engage entre le Président et le Substitut, les termes n'en sont pas fixés "ne varietur"... Il est préférable de procéder à des initiations individuelles "d'homme à homme". Il n'y a pas non plus de rituel d'initiation. Il suffit d'exposer au récipiendaire le symbolisme des Luminaires, du masque, du manteau, ainsi que les principes et les buts du Martinisme. Le serment et la consécration sont obligatoires; le serment ne doit comporter aucune obligation d'obéissance

DOC FM- R. Chambellant-Introduction au Vrai visage de la FM

Constant CHEVILLON : Le vrai visage de la Franc - Maçonnerie Introduction à la nouvelle édition par René CHAMBELLANT Constant CHEVILLON naquit le 26 octobre 1880 à Annoire (Jura). C'était un homme comme on a peu l'occasion d'en rencontrer. Penseur profond et travailleur infatigable, il sut mettre en pratique l'enseignement des Ordres initiatiques et spiritualistes auxquels il appartenait. Plutôt petit, mince, les pommettes saillantes, le cheveu dru, ses yeux reflétaient l'intelligence et la bonté. Il aimait la présence turbulente de la jeunesse du Quartier Latin. A Paris, il habitait une modeste chambre meublée à l'hôtel des Bernardins. Il partageait son temps entre Paris et Lyon, et passait la plus grande partie de ses nuits à préparer des conférences et à correspondre avec les Ordres qu'il dirigeait, dispersés dans le monde entier. Il était aimé et vénéré de tous ceux qui l'approchaient, tant il dégageait une expression de sérénité, de sainteté, d'équilibre, se penchant avec attention sur tous, aidant de ses conseils, excusant tout et tous. Il prenait un visible plaisir, entouré des jeunes adeptes d'alors, aux repas du dimanche, partagés dans un restaurant du quartier, où nous mettions à contribution son érudition et ses connaissances extraordinaires. Il arbitrait nos discussions fraternelles mais animées, avec un tact délicat, ne froissant aucune susceptibilité. Pendant la guerre de 39-44, ses employeurs l'envoyèrent en Province où il se plaignait de ne pouvoir travailler. Il sentait rôder autour de lui l'ombre de sa mort prématurée et souffrait de ne pouvoir exprimer tout le message qu'il portait. Certaines de ses lettres le montrent désespéré de son inaction forcée. Interrogé deux fois par la police officielle, il est arrêté, à Lyon, chez Mme Bricaud, le 25 mars 1944. Emmené par des inconnus, on le retrouvera, le lendemain, assassiné, montée des Clochettes à Saint-Fons, dans la banlieue lyonnaise. Cet homme exemplaire était le Grand Maître de deux formations initiatiques ésotériques: • Le Rite Ancien et Primitif de Memphis-Misraïm. • L'Ordre des Chevaliers Maçons Élus Cohen de l'Univers. Pour la démarche exotérique, il était Patriarche de l'Église Gnostique Universelle. Le Rite Ancien et Primitif de Memphis-Misraïm est un rite hautement et exclusivement spiritualiste. Dès les trois premiers grades, on constate l'élévation d'esprit de leurs rédacteurs. Dans les grades suivants, toutes les phases de la Tradition Universelle et Primordiale défilent. Ces grades, souvenir des Rites disparus, proliférèrent au XVIIIe siècle, après la fondation de la Grande Loge Unie d'Angleterre. A ses débuts, cette organisation vendait des patentes à qui pouvait les acheter. Ainsi chacun inventait son rituel en fonction des affinités qu'il pouvait avoir dans les fraternités initiatiques antérieures. C'est pour cette raison que l'on retrouvait le nom de certains grades attachés à la tradition égyptienne, iranienne, juive, grecque, celte, kabbalistique ou rosicrucienne. Le Rite Ancien et Primitif était donc une sorte de conservatoire dans ses 90 premiers degrés où l'on retrouve le nom de grades disparus. A ces degrés, il faut ajouter cinq grades administratifs Le successeur du Grand Maître Henri Dupont, lui-même successeur de C. Chevillon, a malheureusement cru bon de remplacer les trente premiers degrés supérieurs du rite dit « Égyptien » par les trente degrés du Rite Écossais Ancien Accepté, alors que dès l'origine (Convent de Bruxelles de 1934) Constant Chevillon s'était opposé à cette innovation. Aujourd'hui, au sein du Souverain Sanctuaire des Gaules, une seule Loge dissidente sert de base aux Hauts Grades pratiqués du temps de C. Chevillon. Une chose importante est à noter, à l'instar des grands Maçons tels Cagliostro, Martinez de Pasqually, J.-B. Willermoz, Constant Chevillon considérait que la femme, partie intégrante de l'humanité, devait avoir accès à l'initiation. Il créa donc un rituel des trois premiers degrés, parfaitement adapté à la féminité. Car bien qu'incontestablement valide, initier les femmes aux travers d'un rite prévu uniquement pour des hommes est, par essence, parfaitement illicite. Les trois premiers degrés du rite féminin donnent naturellement la possibilité aux femmes d'accéder aux plus Hauts Grades, aucune raison licite s'y opposant, puisque symboliquement, dès le troisième degré, l'homme comme la femme se trouvent débarrassés de la symbiose soma-psyché et libèrent ainsi le pneuma-androgyne. Pour les mêmes raisons évoquées précédemment, ce rite féminin n'est plus pratiqué que par une seule Loge. En ce qui concerne l'Ordre des Élus Cohen et pour clarifier une situation quelque peu embrouillée, qui à l'époque de sa création jusqu'à l'orée du XXe siècle ne l'était pas, le vocable « Martiniste » désignait les disciples de Martinez de Pasqually, puis le Martinisme Lyonnais descendant des Élus Cohen de Willermoz, ou le Martinisme Russe, branche des Élus Cohen établis en Russie. Mais à la fin du XIXe siècle, Papus, Dr Gérard Encausse, créa en compagnie d'Augustin Chaboseau, un Ordre Martiniste dont le but essentiel était l'étude des œuvres de L.-C. de St Martin, le Philosophe Inconnu, d'où, aujourd'hui, la confusion entre Martinistes et Élus Cohen. Par la suite, Papus devint Grand Maître du Rite de Memphis-Misraïm, tout en développant parallèlement son Ordre Martiniste. A la mort de Papus, son successeur, Téder, initié au Martinisme Lyonnais (Élu Cohen), projette de réformer l'Ordre Martiniste de Papus, mais la mort l'empêcha de réaliser son projet. Jean Bricaud lui succède, reprenant son idée de réforme, en présidant l'Ordre Martiniste Lyonnais et celui de Papus qui devint la Société Occultiste Internatio-nale, où il regroupa tous les « profanes », réservant l'Ordre des Élus Cohen (Martiniste Lyonnais) aux Maçons de Hauts Grades. A la mort de J. Bricaud, C. Chevillon reprend le flambeau et coupe définitivement les rapports entre le Rite de Memphis-Misraïm et les Élus Cohen d'une part, et la S.O.I. d'autre part, dont il nommera Mme Bricaud présidente. Actuellement, par le jeu des dissidences et des scissions, les Ordres Martinistes et ceux des Élus Cohen ont proliféré en nombre et en qualités. Il en est de même pour l'Église Gnostique divisée en plusieurs parties. Rappelons que Constant Chevillon a écrit plusieurs petits ouvrages: Du néant à l'être, 1942 - Et verbum caro factum est, 1944 - La tradition universelle, 1946 -réédités en un volume aux Éditions Traditionnelles, Paris, 1982. Méditations initiatiques, 1953 - Orient et Occident, 1926. Ainsi que Le vrai visage de la Franc-Maçonnerie, 1939 - et Réflexion sur le temple social, 1936, qui font l'objet de cette édition. La plupart de ces livres quasiment introuvables dans leurs premiers tirages avaient été presque tous édités par la librairie Derain-Raclet, pour les plus anciens, puis par Derain seul, 128 rue Vanban, à Lyon. Librairie toujours existante, qui fut un des hauts lieux de l'ésotérisme Lyonnais. Nous remercions nos chers amis, Gilbert Tappa et Claude-Charles Boumendil, d'avoir tenu à rééditer ces deux textes importants du Maître, en espérant qu'ils contribueront à effacer les images, par trop caricaturales, de la Franc-Maçonnerie, ancrées dans l'idée populaire depuis si longtemps. Que le souvenir de Constant Chevillon soit toujours vivant et que sa pensée perdure parmi les Maçons de bonne volonté. 24 juin 1991