12/24/2019

MEDITATION SUR LES MYSTERES ET LES RAISONS DE L'INCARNATION


ORDRE DE LYON

CHAPITRE CONSTANT CHEVILLON

MEDITATION SUR LES MYSTERES ET LES RAISONS DE L'INCARNATION

Mes Bien Aimés Frères Chevaliers R+C,

En complément à notre travail commun sur les versets de la Prière Dominicale, et dans ces jours qui précèdent Noël, je vous propose une médiation sr les Mystères et les rasions de l'Incarnation de NSJ+C.

Je souscris totalement à la thèse du théologien Olivier CLEMENT qui exprime le regret que l'occident chrétien consacre à la fête de Noël, un aspect essentiellement humain, lorsque la tradition Byzantine considère que l'Incarnation du Fils de Dieu constitue une re-Création :

- Dieu vient à l'homme parce que l'homme s'est séparé de Dieu
- Le Verbe, ce petit enfant, n'a pas la parole dans la crèche, c'est l'anéantissement de Dieu se faisant petit enfant pour nous sauver et réaliser cette re-Création du monde
- Dans l'incarnation se trouve préfigurée l'annonce de la Passion.

I
Ainsi, reprenons le récit de Luc.

"Or, en ce temps-là, parut un décret de César Auguste pour faire recenser le monde entier. Ce premier recensement eut lieu à l'époque où Quirinius était gouverneur de Syrie. Tous allaient se faire recenser, chacun dans sa propre ville ; Joseph aussi monta de la ville de Nazareth en Galilée à la ville de David qui s'appelle Bethléem en Judée, parce qu'il était de la famille et de la descendance de David, pour se faire recenser avec Marie son épouse, qui était enceinte."
(Luc II, 1-6)

Les raisons de ce voyage de Joseph et de Marie étant rappelées, réfléchissons sur le récit de l'Incarnation.

1- Premiers signalements de la Passion
"Or, pendant qu'ils étaient là, le jour où elle devait accoucher arriva ; elle accoucha de son fils premier-né, l'emmaillota et le déposa dans une mangeoire"
(Luc II, 6, 7)
En réponse à cet emmaillotement et cette mangeoire, Joseph d'ARIMATHIE
"alla trouver Pilate et demanda le corps de Jésus. Il le descendit de la croix, l'enveloppa d'un linceul et le déposa dans une tombe taillée dans le roc"
(Luc XXXIII, 52, 53)

La Tradition Byzantine considère que dès l'Incarnation est annoncée la Passion.

2 - Le Christ rejeté
"...parce qu'il n'y avait pas de place pour eux dans la salle d'hôtes"
(Luc II, 7)
Corrélativement à cet absence d'accueil de l'Enfant Dieu par les hommes, le
Christ est rejeté, refusé par l'homme : "Je suis venu au nom de mon Père, et vous refusez de me recevoir. Qu'un autre vienne en son propre nom, celui-là vous le recevrez !" (Jean V, 43)

3 - la réception de la Bonne Nouvelle aux petits
" Il y avait dans le même pays des bergers qui vivaient aux champs et montaient la garde pendant la nuit auprès de leur troupeau. Un ange du Seigneur se présenta devant eux, la gloire du Seigneur les enveloppa de lumière et ils furent saisis d'une grande crainte. L'ange leur dit : " Soyez sans crainte, car voici, je viens vous annoncer une bonne nouvelle, qui sera une grande joie pour tout le peuple : Il vous est né aujourd'hui, dans la ville de David, un Sauveur qui est le Christ Seigneur ; et voici le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. " Tout à coup il y eut avec l'ange l'armée céleste en masse qui chantait les louanges de Dieu et disait :
" Gloire à Dieu au plus haut des cieux et sur la terre paix pour ses bien-aimés. "" (Luc II, 8-15)
A qui se trouve annoncé la Bonne Nouvelle, à des bergers, à des êtres considérés comme impurs, par ceux qui s'estiment être des justes, des savants, suivre la Loi de Moïse, impurs ces bergers sont considérés comme tels, parce qu'ils sont en contact avec des animaux de ce fait ils sont par ailleurs interdits d'accès à la synagogue.
A l'être jugé indigne par les hommes, le Christ le conduit immédiatement au Salut : Notre Seigneur a évangélisé les enfers. Cet acte de Foi qui sera repris dans l'Eglise Universelle dans le cadre du Symbole dit d'Athanase (1) dans la seconde partie du V° siècle, s'il était partie de la Foi des semi-Ariens, apparaît dans la Tradition de l'Eglise Catholique au sens de St Vincent de Lérins, pour la première fois chez Rufin d'Aquilée vers 404 (2), lorsqu'il n'est pas sans intérêt d'évoquer la Constitution de l'Eglise Egyptienne vers 500 qui, à la place e la descente aux enfers, emploie les termes "a libéré ceux qui étaient enchaînés"(3).
Il n'est donc pas étonnant, que NSJ+C ait immédiatement conduit le bon larron en Son Paradis : " Jésus lui répondit : " En vérité, je te le dis, aujourd'hui, tu seras avec moi dans le paradis. " (Luc XXIII, 43)

4 - la réciprocité du Témoignage par les petits, les rejetés
" Or, quand les anges les eurent quittés pour le ciel, les bergers se dirent entre eux : " Allons donc jusqu'à Bethléem et voyons ce qui est arrivé, ce que le Seigneur nous a fait connaître. " Ils y allèrent en hâte et trouvèrent Marie, Joseph et le nouveau-né couché dans la mangeoire. Après avoir vu, ils firent connaître ce qui leur avait été dit au sujet de cet enfant. Et tous ceux qui les entendirent furent étonnés de ce que leur disaient les bergers" (Luc II, 15-19).

A ses propres disciples, Jésus répond quant à savoir qui serait le plus grand :
"" Qui accueille en mon nom cet enfant, m'accueille moi-même ; et qui m'accueille, accueille Celui qui m'a envoyé ; car celui qui est le plus petit d'entre vous tous, voilà le plus grand. "" (Luc IX, 48)


II
Reprenons si vous le voulez bien par les rapprochements scripturaires suggérés, notre méditation.

1 - Les conditions de et dans notre monde de la Naissance de l'Enfant Dieu, qui accepte d'anéantir Sa Gloire Divine dans le Temps de Son Incarnation, pour paraître tel un enfant semblant pareil à nous, montre l'HUMILITE de DIEU qui déjà s'oppose au scénario proposé par le Serpent à Eve : " vous serez comme des dieux" (Gen. III, 5).
La preuve de la Divinité de J+C résulte de Sa résurrection d'entre les morts, cette mort physique, conséquence du péché qui a fait entrer le temps de l'homme en remplacement du Temps de Dieu :

" C'est dans la peine que tu t'en nourriras tous les jours de ta vie." (Gen III, 17)

"A la sueur de ton visage tu mangeras du pain jusqu'à ce que tu retournes au sol car c'est de lui que tu as été pris. Oui, tu es poussière et à la poussière tu retourneras. " (Gen III, 19)

Une courte parenthèse, le récit de l'Oeuvre des six Jours, présente les Jours de Dieu, distinctement dans le plan de la Création nous concernant, alors que suite à la Chute, Dieu évoque les jours de la vie" installant la temporalité du monde avec pour fin, la mort physique de l'homme tu es poussière et à la poussière tu retourneras.

Noël présente la soumission à la temporalité du monde dans le cadre de la manifestation de l'Incarnation, mais le Christ vrai Roi, ne se soumet pas aux erreurs du monde qui pensent que le Messie aurait pour vocation de restaurer le royaume et libérer la terre d'Israël mais ne sommes-nous pas dans une vision et très humaine et très élitiste, qui s'oppose à l'universalité de Dieu, en l'espèce à Son Amour, c'est à dire à l'Amour ? A Pilate l'interrogeant, le Christ répond :
" Ma royauté n'est pas de ce monde." (Jean XVIII, 36)

" Ma royauté n'est pas de ce monde." Jésus+Christ s'Incarne non dans un palais, mais à l'intérieur d'une mangeoire. Cette mangeoire est un lieu qui permet de manger, de se rassasier, pour ce qui nous semble dépourvu d'un droit, d'une âme, à savoir les bêtes. Or, né dans une mangeoire, le Christ nous le rappelle :
"Je suis le pain vivant qui descend du ciel. Celui qui mangera de ce pain vivra pour l'éternité. Et le pain que je donnerai, c'est ma chair, donnée pour que le monde ait la vie. " (Jean VI, 51)

La temporalité disparaît au profit de l'intemporalité recouvrée.
Le Christ donne Sa chair pour sauver les hommes.

Cette mangeoire n'est pas seulement l'annonce du tombeau, les langes ne sont pas seulement la préfiguration du linceul, cette mangeoire, annonce le Pain de Vie, pour le Chrétien la Sainte Eucharistie, cette Cène du dernier repas à partir duquel il est dit " Maintenant, le Fils de l'homme a été glorifié, et Dieu a été glorifié par lui" (Jean XIII, 31)

La glorification intervient parce que le Christ a donné à Judas la bouchée de pain que Judas a donc communié par la main du Sauveur, là est un autre Mystère (5) qui ne peut intervenir dans le sujet posé ce soir.
L'espace particulier que constitue ce lieu préfigure la Passion et la Glorification avec pour héritage notamment ce Pain de Vie, ce Pain des Anges qui se distingue totalement à notre nourriture terrestre, et constitue l'un des aspects de cette re-Création permise par l'anéantissement de Dieu se faisant enfant.

2 Il conviendrait de ne pas continuer à dépendre des maladies spirituelles (6) liées à notre attache au monde et, jetant nos filets emplis de nos désirs trop humains, enfin aller à la rencontre de Dieu.

Aller à la rencontre de Dieu, c'st L'accueillir, et non pas tourner la tête vers Mammon ! Il n'y avait pas de place pour accueillir la naissance de Jésus, avons-nous accordé une place à notre Prochain, à nos prières, à notre tension vers Dieu, combien de temps accordons-nous à l'autre, aux autres, cela est-il épisodique, quotidien ? Noël nous invite à la Communion et non à l'égoïsme.

3 La réception de la Bonne Nouvelle et ses conséquences ne peut s'adresser à l'indécis, à celui qui croit savoir et connaître sinon disposer du monde, qu'il s'agisse des docteurs, des pharisiens, des prêtres grand prêtres confortés par leur assurance de connaître et respecter la Loi de Moïse (7), la Bonne Nouvelle ne peut être reçue par les tièdes : " Je sais tes oeuvres : tu n'es ni froid ni bouillant. Que n'es-tu froid ou bouillant ! Mais parce que tu es tiède, et non froid ou bouillant, je vais te vomir de ma bouche." (Apoc III, 15-17)

De quelle tiédeur s'agit-il ? Celui qui est tiède ne soufre pas de la chaleur ou du froid, dsans son confort, il ne se pose aucune question et vit l'instant, le déroulement de sa vie, en considérant que tout est naturellement harmonieux pour lui, et à supposer qu'il s'interroge sur Dieu il pensera sans doute que tout cela lui fut préparé, offert, de par son état ou ce qu'il considère comme ses bonne actions antérieures telle une récompense.

Ne nous méprenons-pas Mes Bien Aimés Frères, n'est-il pas rappelé lors de la fermeture du Chapitre que le but du Chevalier R+C est de " Rendre hommage à la Divinité dans son cœur, dans son âme et dans son esprit. Proclamer sa Gloire par des actes."

Celui qui est froid est appelé à acquérir cette Lumière, cette Chaleur liée à la conscience de La Présence, pentecôte personnelle à laquelle tous les êtres sont appelés. Certes, l'être peut vouloir demeurer froid et ne pas répondre à cette rencontre de La Grâce, qu'importe, le Temps de Dieu n'est pas le temps de l'homme, et finalement chacun reviendra à Dieu, au plus tard lors du Jugement qui est la rencontre de face à face où tous les êtres devant l'Amour, cet Amour Absolu, s'effaceront, dans un acte d'humilité qui devient reconnaissance consciente que nous sommes tous enfants de Dieu.

A celui qui est chaud, appartient la responsabilité d'agir dans le monde, il n'est pas dans le confort illusoire du tiède, celui qui est chaud sait même qu'il pourrait trébucher, se relever alors avec cette humilité constamment présente de ceux qui savent, il peut être un ouvrier, mais aussi un aide pour le Maître de la moisson, parce que par sa vie, il indique la Voie, cette Voie de Celui qui a dit : " Je suis le chemin et la vérité et la vie. Personne ne va au Père si ce n'est par moi." (Jean XIV, 6)

Ainsi comme le rappelle NSJ+C : "'il y aura de la joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n'ont pas besoin de conversion." (Luc XV, 7) et l'Apôtre d'ajouter : "Voilà ce qui est beau et agréable aux yeux de Dieu notre Sauveur, qui veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité" (I Timothée II, 3,4)

4 En ces jours qui précèdent Noël, rappel de l'Incarnation de Celui qui nous a déjà sauvé, réintégré mais dont nous devons parce que par Amour Il nous a laissé la liberté, accepter librement le Salut, Mes Bien Aimés Frères Chevaliers R+C je vous le demande, quel est notre Devoir ?
" Rendre hommage à la Divinité dans son cœur, dans son âme et dans son esprit. Proclamer sa Gloire par des actes."

Proclamer la Gloire de Dieu par des actes !

"Puisque donc toutes ces choses doivent se dissoudre, quelles ne doivent pas être la sainteté de votre conduite et votre piété, tandis que vous attendez et hâtez l'avènement du jour de Dieu." (II Pierre III, 11, 12)

Nous sommes bien dans une re-Création, permise par l'Incarnation et actualisée par la Résurrection, mais ne nous trompons pas, si l'Esprit Saint est revenu parmi les hommes une première fois au soir de la Résurrection, cette Pentecôte trop souvent oubliée rappelée par Jean XX, 19-24 : "Le soir de ce même jour qui était le premier de la semaine, alors que, par crainte des Juifs, les portes de la maison où se trouvaient les disciples étaient verrouillées, Jésus vint, il se tint au milieu d'eux et il leur dit : " La paix soit avec vous. " Tout en parlant, il leur montra ses mains et son côté. En voyant le Seigneur, les disciples furent tout à la joie. Alors, à nouveau, Jésus leur dit : " La paix soit avec vous. Comme le Père m'a envoyé, à mon tour je vous envoie. " Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et leur dit : " Recevez l'Esprit Saint ; ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis. Ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus. ", il nous revient d'être fidèle :"Priez sans cesse, rendez grâce en toute circonstance, car c'est la volonté de Dieu à votre égard dans le Christ Jésus. N'éteignez pas l'Esprit." (I Thessaloniciens, V, 17-20)

N'éteignez pas l'Esprit, c'est-à dire maintenons la Présence de l'Esprit Saint dans la re-Création du monde, cet Esprit qui avait quitté le monde à la suite e la Chute.

Maintenir la Présence de l'Esprit dans le monde, l'Esprit Saint qui procède de toute éternité du Père (Jean XV, 26), et qui dans le champ de la Création est notamment la relation d'Amour entre le Père et le Fils, en ce qu'Il procède alors du Père par le Fils, ne pas éteindre l'Esprit mais maintenir au contraire Sa Présence, suppose que par la pratique de l'Amour, la tension vers Dieu, par nos bonnes actions et nos prières, comme le rappelle Pierre, nous agissions pour hâter l'avènement du Jour de Dieu, Jour ne dépendant pas de J+C mais de notre action pour le monde que nous entrainions dans notre Chute.

C'est à l'homme que revient cette tâche d'amener la Nature à sa délivrance ainsi que le rappelle l'Apôtre (Romains VIII, 19-23) et non à Dieu, aussi le Christ s'adressant au Père le déclare : "Je prie pour eux ; je ne prie pas pour le monde" (Jean XVII, 9).

A l'homme et non à Dieu " Car la création attend avec impatience la révélation des fils de Dieu : livrée au pouvoir du néant-non de son propre gré, mais par l'autorité de celui qui l'a livrée, elle garde l'espérance, car elle aussi sera libérée de l'esclavage de la corruption, pour avoir part à la liberté et à la gloire des enfants de Dieu." (Romains VIII, 20-22)

L'humilité dans Sa naissance de l'enfant Dieu, dans la manifestation de Sa vie visible, ne peut que nous indiquer qu'à notre tour nous devons être simples comme les bergers, comme les apôtres qui par la seule tension de leur coeur suivent immédiatement Jésus, certes ils ne comprennent pas grand chose sur qui est leur Sauveur, ils doutent, ils trébuchent, sont-ils toujours de bonne foi dans leur façon de juger leur prochain tel Jean à l'encontre de Judas, ils ne sont que des hommes mais ils témoigneront.

A notre tour, il nous est demandé de témoigner puisqu'il nous échet de proclamer la Gloire de Dieu par des actes. Par la prière et les bonnes actions, agissons dans le secret de la plus stricte humilité, alors en communion avec l'enfant Dieu s'étant anéanti dans une humilité totale, me revient en mémoire cette pensée de Louis Claude de St Martin, à l'origine de ce Martinisme autrefois Chrétien et qui aujourd'hui ne l'est que peu ou prou ou pas du tout : "J'ai désiré faire du bien, mais je n'ai pas désiré faire de bruit, parce que j'ai compris que le bruit ne faisait pas de bien, comme le bien ne faisait pas de bruit."

J'ai dit.



NOTES




Particulièrement exemplaire de la mise en image d’un discours théologique, l’icône de la Nativité illustre la christologie élaborée au cours des 7 premiers conciles oecuméniques (du 4e au 9e siècle) et insiste sur la nature du Christ " vrai Dieu et vrai homme". Au centre de l’icône la Mère de Dieu ( la Théotokos) allongée sur un linge pourpre en forme de mandorle est tournée, non vers son nouveau-né, mais vers l’humanité . Elle est revêtue du maphorion marqué de trois étoiles symbolisant sa virginité avant, pendant et près la naissance du Christ




Derrière elle, se détachant sur une grotte enténébrée, l’Enfant repose sur une structure en forme de tombeau et il est enveloppé de langes évoquant les bandelettes du linceul futur. Autant de signes qui préfigurent la Descente aux Enfers et la Résurrection de Celui qui est venu " illuminer ceux qui étaient assis dans les ténèbres et l’ombre de la mort". Au-dessus de la grotte brille l’étoile se divisant en trois rayons où l’on distingue parfois la colombe de l’Esprit Saint, image trinitaire soulignant l’origine et la nature divines du Christ. A ses côtés figurent l’âne (remplacé par un cheval sur les icônes russes) et le boeuf symbolisant les simples ou le peuple juif selon certaines interprétations et reprenant des prophéties de l’Ancien Testament.
Toujours dans la partie médiane sont figurés les trois Rois Mages sous les traits de trois hommes incarnant les trois âges de la vie (jeunesse, âge mûr, vieillesse) apportant l’or au Roi des cieux, l’encens au Fils de Dieu et la myrrhe pour l’ensevelissement du Fils de l’Homme. Ils incarnent les nations. Symétriquement se trouvent les bergers : les hommes de bonne volonté qui ont cru à l’annonce proclamée par les anges "Gloire à Dieu au plus haut des cieux, paix sur la terre et bienveillance parmi les hommes .et sont accourus contempler la merveille.
Au registre inférieur on remarque sur la droite un groupe formé par les sages femmes donnant le bain au nouveau-né. Si la scène est inspirée de l’iconographie antique hellénistique (le bain de Dyonisos) elle a surtout pour but de souligner la nature humaine du Christ incarné. A l’opposé on distingue Joseph, assis la main contre la joue dans une attitude connotant la tristesse ou du moins une réflexion embarassée. Il est en dialogue avec un berger que l’on identifie parfois comme le Tentateur. Joseph s’interroge sur l’insondable mystère de l’Incarnation qui se déroule sous ses yeux.

Ce schéma byzantin que l’on retrouve avec des variantes dans toutes les icônes orthodoxes de la Nativité du Christ jusqu’à nos jours, influencera également l’iconographie occidentale pratiquement jusqu’au 14e siècle comme en témoignent bon nombre de vitraux et de peinture murales de nos églises d’Europe occidentale. Mais dans le Christianisme occidental ce schéma théologique du mystère de l’Incarnation divine évoluera en une représentation humaniste voire sentimentale de la Sainte Famille entourée souvent de notables et donateurs religieux ou laïcs.
Michèle Nikitine
Source : http://egliseorthodoxelemans.fr/spip/spip.php?article14

2 DENZINGER : Symboles et définitions de la Foi catholique, Cerf Ed, N° 75 et 76 ; et édition électronique partielle : http://tho.org/9.php?d=g0 (ici §§ 76 et 76)

Symbole ." Quicumque ", dit d'Athanase.
(probable origine entre 430 et 500 dans le Sud de la France?)
(1) Quiconque veut être sauvé, doit avant tout tenir la foi catholique : (2) celui qui ne la garde pas intègre et inviolée ira, sans aucun doute, à sa perte éternelle.
(3) Or la foi catholique consiste en ceci : nous vénérons un seul Dieu dans la Trinité et la Trinité dans l'unité, (4) sans confondre les personnes ni diviser la substance : (5) autre en effet est la personne du Père, autre celle (la personne) du Fils, autre celle (la personne) de l'Esprit Saint ; (6) mais le Père, le Fils et l'Esprit Saint ont une même divinité, une gloire égale, une même éternelle majesté.
(7) Comme est le Père, tel est le Fils, tel (aussi) l'Esprit Saint : (8) incréé est le Père, incréé le Fils, incréé l'Esprit Saint ; (9) immense est le Père, immense le Fils, immense l'Esprit Saint : (10) éternel est le Père, éternel le Fils, éternel l'Esprit Saint ; (11) et cependant ils ne sont pas trois éternels, mais un seul éternel ; (12) ni non plus trois incréés, ni trois immenses, mais un seul incréé (immense) et un seul immense (incréé). (13) De même tout-puissant est le Père, tout-puissant le Fils, tout puissant l'Esprit Saint ; (14) et cependant ils ne sont pas trois tout-puissants, mais un seul tout- puissant. (15) Ainsi le Père est Dieu, le Fils est Dieu, l'Esprit Saint est Dieu ; (16) et cependant ils ne sont pas trois dieux, mais un seul Dieu. (17). Ainsi le Père est Seigneur, le Fils est Seigneur, l'Esprit Saint est Seigneur; (18) et cependant ils ne sont pas trois Seigneurs, mais il y a un seul Seigneur : (19) car de même que la vérité chrétienne nous commande de confesser chacune des personnes en particulier comme Dieu et Seigneur, (20) de même la religion catholique nous interdit de dire qu'il ya trois dieux ou trois seigneurs.
(21) Le père n'a été fait par personne, ni créé, ni engendré ; (22) le Fils est du Père seul, non pas fait, ni créé, mais engendré ; (23) l'Esprit Saint est du Père et du Fils, non pas fait, ni créé, ni engendré, mais il procède. (24) Donc un seul Père, non pas trois Pères ; un seul Fils, non pas trois Fils, un seul Esprit Saint, non pas trois Esprits Saints. (25) Et dans cette Trinité rien n'est antérieur ou postérieur, rien n'est plus grand ou moins grand, (26) mais toutes les trois personnes sont coétemelles et coégales, (27) si bien qu'en tout, comme il a déjà été dit plus haut, on doit vénérer aussi bien l'unité dans la Trinité que la Trinité dans l'unité (28) Celui donc qui veut être sauvé doit penser cela de la Trinité.

(29) Mais il est nécessaire au salut éternel de croire fidèlement aussi en l'incarnation de notre Seigneur Jésus Christ. (30) C'est donc la foi droite que de croire et de confesser que notre Seigneur Jésus Christ, Fils de Dieu, est Dieu et homme (aussi bien Dieu qu'il est également homme) : (31) il est Dieu, engendré de la substance du Père avant les siècles, et homme né de la substance de la mère dans le temps ; (32) Dieu parfait, homme parfait, composé d'une âme raisonnable et d'une chair humaine ; (33) égal au Père selon la divinité, inférieur au Père selon l'humanité ; (34) bien qu'il soit Dieu et homme, il n'y a pas cependant deux Christ, mais un seul Christ ; (35) un, non pas parce que la divinité s'est changée en chair (dans la chair), mais parce que l'humanité a été assumée en Dieu ; (36) un absolument, non par un mélange de substance, mais par l'unité de personne. (37) En effet de même que l'âme raisonnable et le corps font un homme un, de même Dieu et l'homme font un seul Christ. (38) Il a souffert pour notre salut, il est descendu aux enfers, le troisième jour il est ressuscité des morts, (39) il est monté aux cieux, il siège à la droite du Père, d'où il viendra juger les vivants et les morts. (40) A sa venue tous les hommes ressusciteront avec (dans) leurs corps et rendront compte chacun de leurs actes ; (41) ceux qui ont bien agi iront dans la vie éternelle, mais ceux qui auront mal agi, au feu éternel. (42) Telle est la foi catholique : si quelqu'un ne la croit pas fidèlement et fermement, il ne pourra être sauvé."



3 DENZINGER : op cité, N° 16, et édition électronique citée : http://tho.org/9.php?d=g0 (ici § 15) :
- Tyrannius Rufinus : Expositio (ou Commentarius) in symbolum.
écrit vers 404, symbole d'Aquilée, sa patrie

Je crois en Dieu, le Père tout-puissant, invisible et impassible, et en Jésus Christ, son Fils unique, notre Seigneur, qui est né par l'Esprit Saint de Marie la Vierge, qui a été crucifié sous Ponce Pilate et enseveli, est descendu aux enfers, le troisième jour est ressuscité des morts, est monté aux cieux, siège à la droite du Père, d'où il viendra juger les vivants et les morts ; et en l'Esprit Saint, la sainte Eglise, la rémission des péchés, la résurrection de cette chair.

4 DENZINGER : op cité, N° 62, 63; éd électronique citée, N° 62 :

Constitutions de l'Eglise égyptienne. Cf. [Can.3>3]
a) Version copte : profession de foi après le baptême.
Tu crois en notre Seigneur Jésus Christ, le Fils unique de Dieu le Père, qui, d'une manière admirable, est devenu homme à cause de nous en une unité inconcevable par son Esprit Saint de Marie la Vierge sainte, sans la semence de l'homme,
et qu'il a été crucifié pour nous sous Ponce Pilate, est mort en même temps pour notre salut selon sa volonté, est ressuscité le troisième jour, a libéré ceux qui étaient enchaînés, est monté aux cieux, siège à la droite de son Père bon dans les hauteurs, et vient à nouveau juger les vivants et les morts selon sa révélation et son Règne.
Et tu crois en l'Esprit Saint, bon et qui donne la vie, qui purifie tout, dans la sainte Eglise.

5 J-P BONNEROT : Judas ou les conditions de la rédemption, Cahiers d'Etudes Cathares, N° 104, hiver 1984. Pour un accès Internet : http://misraim3.free.fr/gnosticisme/JUDAS.PDF

6 http://theologie-et-questions-disputeses.blogspot.fr/2012/12/les-maladies-spirituelles-et-leurs.html

7 Sur les vingt-sept irrégularités du faux et mauvais procès fait à NSJ+C, il convient de revenir sans cesse au travail magistral des Mgrs Augustin et Joseph LEMANN : Valeur de l'assemblée qui prononça la peine de mort contre Jésus-Christ, nombreuses éd dont la dernière Editions DFT.
Pour un accès internet, plusieurs sites, mais celui-ci est à recommander ;
http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/Lemann/Valeur/Objet.html






MINUIT DE NOEL AU PAYS DE TRISTAN par Joséphin PELADAN



Les lames détonnaient lourdement contre les rochers avec une clameur prolongée de bataille. La lune étincelait. Du linceul de neige étendu sur la campagne, les arbres décharnés se dressaient en ossatures énigmatiques. La bise sifflait si aiguë aux jointures de la fenêtre que je me rapprochai de l'âtre où crépitait un feu de genêts.

La vieille bretonne qui me donnait l'hospitalité ce soir-là portait gaillardement ses quatre-vingts ans. Ses trois maris avaient péri en mer. Mère de onze enfants tous disparus, elle vivait avec sa nièce, grande fille silencieuse et farouche qui s'était hâtée de disparaître à mon arrivée.

- « La mère - lui dis-je – vous avez certainement vu des choses de l'autre monde, des choses de la mort et du purgatoire : et vous devez vous en souvenir aujourd'hui, jour de Noël ? … »

L'aïeule hocha la tête, gravement affirmative.

- « Que sont devenus les korrigans, les fées ? … l'ancienne amitié entre ce monde et l'autre a cessé… les âmes en peine n’apparaissent plus, implorant des prières et des messes… je donnerais beaucoup, la mère, pour voir ce que vous avez vu… »

Elle tournait vers la flamme la paume de ses mains ridées aux doigts déformés et se voûtait sous le poids de lourds souvenirs ? Je devinais des singularités dans sa vie, mais comment délier la langue d'une femme de Léonois ?

- « Voyons la mère, dites-nous si l’on peut voir encore des esprits, des revenants, quelque chose de surnaturel ? »

Lentement et sans me regarder, elle laissa tomber ceci :

- « On peut toujours voir les morts qu’on a aimés !
- « Avez-vous donc revu vos maris ?
- « Pour chacun, j'ai mis le deuil avant qu'on sût le naufrage... chaque fois on me crut folle ; mais moi je les ai vus, raides dans l'eau, les pauvres. Alors, on a dit dans le pays que j’allais à la pierre aux Fées et Monsieur le doyen me refusa longtemps l’absolution. Je ne suis jamais allée à la pierre aux Fées, je suis allée au calvaire.
- « Au calvaire ? Pourquoi au calvaire ? »

Elle se pencha et baissant la voix :

- « On entoure une vieille croix de ses bras et on prie jusqu’à ce qu’on connaisse le sort des siens, leur sort de la terre comme celui de là-bas…

Et sentencieuse, recueillie, elle ajouta avec des accents d'autorité :

- « C'est le devoir de la chrétienne… On doit penser à l’époux qui passe en jugement de Dieu et l’aider par les chapelets, les messes, le bien qu’on fait aux pauvres, en son nom »

Ces derniers mots furent prononcés impérieusement. Le paysan breton considère l'homme du pays d'en haut (Paris) comme un mécréant, négateur systématique de toute mysticité, et bien que la vieille connût mon dessein d'aller à la messe de minuit, elle ne cessait pas de voir en moi un sceptique.

- « Comment sait-on, la mère, que celui pour qui l’on prie est délivré ?
- « On le sait, la nuit de Noël…

Posant sa main sur mon bras, pour forcer mon attention, elle dit :

- « Au moment où le curé élève l'hostie de Noël à la paroisse du défunt, si, alors, on tient embrassée la croix d’un calvaire, on voit jusqu’aux enfers et jusqu’au ciel si le mort est souffrant ou triomphant ! »

En demandant une explication, j'aurais arrêté le mouvement de sa confiance. Elle avait reçu ces idées comme des dogmes traditionnels de sa race. Mon attention silencieuse lui plut car elle m'attira du geste :

- « Ecoute fils, écoute l’histoire de ma nièce. Elle a fui à ton arrivée et tu n’as pu voir que malgré ses vingt ans, elle en paraît quarante. Ecoute… Elle avait un promis, le plus beau gars du pays et brave cœur ! Il partit par le sort sur la marine de l’Etat. Elle l'attendit, sage comme une religieuse, la coiffe si serrée qu’on ne voyait pas ses cheveux. Elle ne dansa pas une fois en trois ans ! Elle comptait les jours Elle en compta mille ! Quand il débarqua à Brest, il était si heureux de marcher sur la terre qu’il but, qu’il but et tant, qu’il se querella. Dans la batterie une bouteille le frappa à la tempe… Oh ! le sort ! il était à vingt heures d’ici quand il but et se querella. Ma nièce pleura tout son cœur, mais elle n’abandonna pas le mort comme eut fait une fiancée des villes. Pour celui qui passe dans la colère et la boisson, point de paradis ! Yvonne est bonne ouvrière, elle travailla jour et nuit avec son gain elle fit dire des messes et distribua des aumônes. Voici quatre ans qu’elle s’exténue ! Elle voit sans cesse son pauvre fiancé se tordre dans le feu du Purgatoire et son aiguille court fiévreusement : elle mourra à la peine. »

La bretonne exhala une plainte profonde.

- « Elle fait son devoir de fiancée bretonne » conclut-elle.

Cette pauvre couturière de village était la sœur sublime d'Elisabeth, la sainte de la Wartburg ! Je fus frappé d'admiration.

- « Voulez-vous, la mère, que j'accompagne votre nièce à la messe de minuit ?
- « Non mon fils, il ne le faut pas ! »

La demie de onze heures tinta à l'horloge au balancier de cuivre. On entendit un peu de piétinement et Yvonne descendit l'escalier en échelle, semblable dans sa mante à une béguine. Elle échangea quelques mots en bas breton avec sa tante et passa sans que je l'eusse dévisagée : mais toutes les paroles de la paysanne s'illuminèrent. Yvonne allait au calvaire ! Il m'était ainsi donné de contempler un très beau rite de Foi celtique.

- « Alors - dis-je d'un air détaché en boutonnant mon pardessus – Voilà l’heure de partir pour être sûr d’une chaise. »

Au dehors, une rafale soufflait qui emporta mon feutre au premier pas : la neige tourbillonnante m'aveuglait. La mer hurlait d'une voix rauque des plaintes mêlées à des imprécations mystérieuses. De quel côté s'élevait le calvaire ? Je l'ignorais et courus sans orientation. Ma vie entière me semblait engagée par ma curiosité et j'éprouvai une angoisse inexprimable. Au détour d'une ferme, j'aperçus la longue silhouette d'Yvonne. Elle marchait d'un pas sec et très sûr, dans la direction de la mer. Je la suivis avec un passionnement d'halluciné. Brusquement, l'énormité noire et convulsive de l'océan apparut et sur ce fond d'horreur mouvante se dressait, élevé de quelques gradins, une antique croix de granit. Selon cette piété armoricaine qui donne comme tenant au divin crucifié la Sainte Mère et le disciple bien-aimé, la Vierge et Saint-Jean se tenaient sur le croisillon. Yvonne monta les marches comme la prêtresse druidique son aïeule s'approchait du dolmen. Elle ne s'agenouilla pas : elle ouvrit les bras d'un geste que je vois encore, d'un geste qui dessiné serait immortel et les referma sur la pierre, passionnément. Ainsi attachée au signe rédempteur, comme un naufragé à l'unique mât, elle incarnait ce gémissement qui sort de toute créature, véritable sainte fille, vierge au cœur héroïque que la mort de l'Aimé n'avait point refroidi.

A demi caché par une guérite de douanier, je la contemplais. La neige cessa de tomber, la lune se dégagea des nuages, Yvonne, la tête en arrière, fixait des yeux extatiques sur le Christ et le vent agitait sa mante en ailes noires. Elle attendait un signe ? Lequel ? Une voix intérieure répondrait-elle à son angoisse ou bien l'invisible allait-il se manifester ?

Tout à coup une forme ailée vint du large et s'abattit sur la croix : c'était une grande mouette. Elle secoua ses ailes et reprit son vol, en poussant un cri d'une douceur, d'une humanité qui me fit frissonner. Un autre cri, surhumain celui-là, déchira l'air avec un accent de gratitude et de joie indicibles. Les bras d'Yvonne se détachèrent de la croix et la grande ligne sombre s'affaissa. Je m'élançai pour la secourir : elle ne me vit pas, toute à son action de grâce, car la mouette figurait l'âme, la chère âme de son fiancé sortie de la géhenne, rachetée et maintenant bien heureuse. Avais-je vu un mirage ? Je me posais la question lorsque la bretonne se leva, sautant les marches et courut vers le village. Je m'élançai à sa suite et nous arrivâmes ensemble à la petite église brillante de cierges, bourdonnante de cantiques, pleine de joie sainte.

Yvonne tomba à genoux et je pus étudier les traits fins et entêtés de cette Elisabeth qui avait expié, comme la nièce du landgrave, le péché de son promis. Et je me souvins alors que j'étais en Cornouailles, non loin de Caréol, au pays de Tristan.


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Conte inédit publié pour la première fois in la Revue des Etudes Péladanes N° 3, décembre 1975, Bibliothèque de l’Arsenal Ms 13413