8/26/2010

Défense du rite de Misraïm - VERNHES (1822)

Défense du rite de Misraïm (1822)

GLOIRE AU TOUT-PUISSANT. SALUT SUR TOUS LES POINTS DU TRIANGLE, RESPECT A L'ORDRE. A tous les Maçons de tous tes rites. « Depuis longtemps la calomnie s'est déchainée contre L'ordre de Misraïm ; des discours virulents ont été prononcés dans le Grand-Orient, des circulaires ont été lancées par lui. Si rien n'a été répondu, jusqu'à ce jour, à toutes ces diatribes, c'est que, forts de leur conscience et de leur dévouement au gouvernement, les enfants de Misraïm dédaignaient ces odieuses diffamations, dont tout le blâme devait retomber sur ceux qui en faisaient retentir les voûtes des temples maçonniques. Mais les calomniateurs, enhardis par le silence des Misraïmites, sont parvenus à inspirer des soupçons à l'autorité civile. La saisie des archives a eu lieu sur plusieurs « points de nos vallées, et le public, instruit de ce fait par les journaux, a pu croire un moment que les maçons Misraïmites étaient des ennemis de l'État de vrais conspirateurs. Or, comme il appartient à un enfant de défendre l'honneur de sa famille et d'empêcher qu'aucun doute ne s'élève sur les intentions de ses membres, nous avons pensé que le meilleur moyen d'y parvenir était de faire imprimer une réponse au discours de l'orateur du Grand-Orient, afin de rendre tous les maçons juges de la conduite de leurs FF, les Misraïmites et de celle des Grands Orientistes. TT ILL, Ecl et PP FF Pour répondre victorieusement et en peu de mots au discours du F. *. Richard, il suffirait de transcrire ici, et en regard des divers paragraphes qui le composent, les définitions des vertus maçonniques ; les voici : elles y formeront un bien singulier contraste. - La première de ces vertus est la tolérance - La deuxième, la vérité - La troisième, l'humanité - La quatrième, la bienfaisance - La cinquième, la fraternité. Or, rien n'est moins tolérant que les principes contenus dans 1e discours du F.*. Richard. Rien n'est moins vrai que les faits qu'il y avance. Rien de moins humain que ses vagues et mensongères accusations. Rien de moins bienfaisant que sa fausse bienveillance. Rien de moins fraternel que ses perfides délations. Mais entrons dans quelques détails qui feront encore mieux ressortir l'absurdité des divagations du F. -. Richard. La maçonnerie, dit-il, est seulement tolérée en France ; donc le Grand-Orient est la seule autorité maçonnique légitime. C'est un bien grand abus du mot si respectable de légitimité, que de l'appliquer à une seule autorité maçonnique ; mais passons sur cet excès d'inconvenance. En raisonnant d'une manière tout opposée à celle du F Richard, nous sommes « sûrs de raisonner juste. Or, il est bien évident que dès que le gouvernement ne fait que tolérer la maçonnerie, toute autorité maçonnique qui n'est pas spécialement défendue par le gouvernement, est aussi légitime que le Grand-Orient. Les réunions qu'il tient sous sa dépendance, ajoute-t-il, les Loges qui se con forment à son rit sont tes seules dont il veuille être responsable. Mais cette responsabilité n'est elle pas purement morale et les diverses puissances maçonniques des autres rites n'offrent-elles pas à l'autorité civile une semblable garantie pour toutes les Loges et Conseils qui dépendent d'elles? D'ailleurs, pourquoi toutes ces vaines distinctions, ces subtilités insidieuses? Tous les ordres maçonniques ont un but commun, « tous doivent avoir pour base la tolérance, cette vertu sublime qui est le guide de tous les maçons : voilà leur vrai centre, leur point d'union. C'est à ce principe qu'ils doivent se rallier, et non à une seule et unique puissance qui, de son autorité privée, veut faire courber tous les maçons sous son joug, et qui, semblables à ces faux dévots qui crient au blasphème et lancent l'anathème contre ceux qui n'adorent pas Dieu à leur manière, voudrait voir crouler tous les temples à l'édification desquels elle n'a pas contribué. La maçonnerie est une, quel que soit d'ailleurs le rit que l'on y professe. Les mystères diffèrent entre eux ; mais le fond, le but, les effets sont tout-à-fait les mêmes. Tous les maçons reconnaissent une suprême intelligence, respectent le gouvernement et se sou mettent aux lois de leur pays ; et si quelque Maçon s'est écarté de ces principes, ce n'est pas dans l’ordre de Misraïm qu'on peut le trouver. Le discours du F Richard est plus qu'intolérant, il est délateur ; car il cherche à déverser le blâme sur tous les rites étrangers au Grand-Orient, à exciter la haine contre eux, à appeler plus particulièrement l'attention du gouvernement sur celui de Misraïm, qu'il se plaît à dénigrer et à dénoncer. Lui dénoncer Misraïm, lui F Richard qui, pour être élevé au 81e degré dans ce même ordre, a, malgré ses hauts grades dans le Grand- Orient, prêté serment de fidélité en ces termes : « Je, Jean-Marie Richard, âgé de 59ans, natif de Coucy-le-Château, Souverain Grand-Prince du 77° degré du rit maçonnique de Misraïm, jure, promets et m'engage, sur la foi de mes précédentes obligations, sur mon honneur, sur le livre sacré de la loi et entre les mains du Supérieur Grand-Conservateur de l’ordre maçonnique de Misraïm et de ses quatre séries pour la France, des Souv Grands Princes ici présents, de ne jamais communiquer à aucun maçon des degrés inférieurs, ou appartenant à un autre rit, les mystères de la 4e série qui me seront communiques, dût-il m'en coûter ma fortune et ma vie : promettant en outre la fidélité la plus absolue au rit de Misraïm, que je n'abandonnerai en aucun temps, même dans le cas où cette condition me serait imposée par tout autre rit dans lequel je suis ou pourrais être agrégé, m'obligeant à renoncer plutôt au rit qui me prescrirait de me séparer de celui de Misraïm, auquel je jure à jamais le plus inviolable attachement et obéissance à ses statuts « généraux, me soumettant, en cas d'infraction, à la honte et au déshonneur que mérite le parjure. Fait et signé, sur mon honneur et conscience, à la Vallée du Monde, sous un point fixe de l'étoile polaire, répondant au 48° D. \ 50 m. \ 14 S. Lat. \ septent. \ À « L’O.de Paris, le 14e jour du 1er mois, anno lucis5816 (14 mars 1816). « Signé, RICHARD. » Ceci n'est point de la calomnie, F.'. Richard ! C’est une vérité palpable, c'est une pièce existante, écrite en entier de votre main, consentie de votre libre volonté, signée de vous, et déposée dans les archives de la puissance suprême de Misraïm ; et, si vous osiez la démentir, on pourrait en faire imprimer le fac-similé, et renvoyer à tous les At. maçonniques. Et c'est vous, F Richard, vous qui, en 1816, avez sollicité la faveur d'être promu au sublime grade du 81° degré, c'est vous, F Richard, qui trahissez aujourd'hui tous vos serments, et devenez le dénonciateur de l'ordre de Misraïm !! C'est vous qui le calomniez et le dénoncez comme troublant le repos des magistrats! Vous lancez les anathèmes contre un rit qui vous a accueilli fraternellement et qui vous avait assigné une place distinguée et honorable parmi ses membres ! Pour confondre toutes vos calomnies et répondre à tous vos mensonges, F Richard, il suffira de faire connaître à tous les maçons ce que vous-même feignez d'ignorer, en prétendant que Misraïm s'est réuni aux débris des deux sociétés écossaises. Depuis longtemps l'ordre de Misraïm était connu en France, et il existait même des Misraïmites, parmi les fiers disciples du Grand Orient. C'est en 1803, que, sous la protection des lois, ces FF, se constituèrent en France, et quoique ce ne soit qu'en 1813, que les travaux du 70 degré aient été régularisés, ce Souv Conseil, dans lequel vous avez, par la suite, prêté votre premier serment, existait bien longtemps avant qu'il fît la brillante acquisition du F Richard, et heureusement, la destinée de Misraïm ne dépend pas de l'absence ou de la présence de ce F. Bientôt, et peu à peu, divers temples se sont élevés, non sur de mobiles pyramides égyptiennes, mais sur des colonnes vraiment maçonniques. Les bases en sont inébranlables, impérissables, car ce sont les vertus elles mêmes. Vous ne savez plus quel nom donner à une société, de laquelle vous ayez désiré faire partie, et à laquelle vous avez prêté serment! Quelle inconséquence de votre part, ou bien quelle mauvaise foi!!! Quel est donc votre aveuglement, F Richard, et comment tant de fiel entre-t-il dans l'âme... d'un maçon, orateur du Grand-Orient? Mais tâchons de vous remettre sur la voie : « En 1816, divers membres du Grand-Orient, aux nombre desquels vous étiez, F Richard, sollicitèrent la faveur d'être initiés à nos mystères, et c'est ensuite qu'ils proposèrent individuellement une réunion au Grand-Orient. Mais les membres de la Puissance suprême connaissaient le concordat passé, en 1804, entre le Grand-Orient et le suprême Conseil « écossais, et surtout la manière indécente avec laquelle il avait été rompu en 1805, époque à laquelle les membres du Grand-Orient, au mépris des devoirs les plus sacrés, violèrent le serment solennel qu'ils avaient prêté. Ce fait est malheureusement trop fameux dans les annales maçonniques. Lorsque vous prétendez l'ignorer, F Richard, vous en imposez à votre propre conscience, et si votre « mémoire oublie les faits, comme votre cœur oublie vos serments, vous pourrez du moins réparer le tort de celle-là, en consultant la « brochure intitulée : Extrait du cinquième « cahier de l'Encyclopédie maçonnique, etc., « par le F Chemin-de-Pontes, page 358 et suivantes. La connaissance de ce fait fut suffisante pour éclairer les vrais Misraïmites sur les vues ambitieuses du Grand-Orient. Les propositions verbales qui furent faites à quelques uns d'entre eux furent repoussées avec indignation, et Misraïm resta dans toute sa pureté. Nous pouvons vous porter le défi, F Richard, de produire ou même de citer une seule démarche officielle faite par la Puissance suprême, auprès du Grand-Orient, pour qu'une « semblable fusion s'opérât, à moins que cette démarche ne fût l'œuvre de quelques parjures ou transfuges de votre espèce qui, sans aucune instruction, sans aucun pouvoir, se seraient arrogés cette mission. C'est dès lors que vous et les vôtres n'avez cessé d'attiser les brandons de la discorde, et d'exciter à la guerre les paisibles maçons ; mais vos efforts ont été vains: la Puissance suprême est restée calme, et ses enfants, ralliés autour de l'autel sacré, ont adressé leurs vœux au Tout-Puissant pour qu'il dissipât vos erreurs, et fit cesser votre aveuglement. Mais, dites-vous, le 27° jour, 10e mois 5811, le Grand-Orient a prie un arrêté en 7 articles par lequel, etc. Et de quel droit, s'il vous plaît, le Grand- Orient a-t-il agité la question d'adopter un rit qui ne lui a pas été offert? D'où émanent ses pouvoirs? Quels sont ses titres pour se déclarer ainsi le chef suprême de toute la maçonnerie en France? S'il eût été bon père de famille, ii n'aurait pas été abandonné par ses propres enfants, il ne chercherait pas à ravir ceux des autres.

On doit cependant vous savoir quelque gré, F.*. Richard, de la grande faveur que vous nous faites en convenant que le rit de Misraïm ne présente à la vérité rien de répréhensible, et qu'il renferme des principes de morale et de philosophie. Mais comment allier cette charité, cette apparente douceur, dont vous faites tant d'ostentation, avec les injures et les outrages dont vous blessez sans cesse vos propres FF. Votre fausse bienveillance n'est donc que de l'hypocrisie, et celle-ci vient tout naturellement au secours de la calomnie. Vous accusez les membres de la puissance suprême de ne pas connaître ce qu'ils prétendent enseigner? Mais vous, F. \ Richard, savez-vous bien ce que vous vous mêlez de professer? Êtes-vous aussi bon maître d'école dans le monde profane, que vous êtes bon rhéteur en maçonnerie? Professez-vous la logique, F Richard? Ah ! Dieu garde vos élèves de faire des progrès sous votre direction. Vous fausseriez leur judiciaire, vous n'en feriez que des pédants, des cuistres et des dénonciateurs. Et, en effet, ne dénoncez-vous pas vos FF Misraïmites comme éveillant les soupçons des magistrats, et se faisant emprisonner journellement? Sommé de fournir les preuves d'un tel fait, pourriez-vous les administrer? Et ne tremblez-vous pas d'être honteusement démenti par ceux qui peuvent vous prouver qu'au lieu d'être incarcérés, tous les maçons Misraïmites ont été reçus partout de la manière la plus fraternelle? Si du moins, vous étiez conséquent dans vos inventions, vous ne retomberiez pas sans cesse dans des contradictions manifestes, vous n'auriez pas affirmé avec tant d'assurance que les cahiers du premier rit de Misraïm n'existaient pas, pour déclarer ensuite effrontément qu'ils étaient en votre possession, que nous n'en avions que des copies. Le contraire serait bien plus vrai, F Richard? Et avouez même, que si vous en avez des copies, le moyen par lequel vous les avez eues n'est pas trop licite, et que cette manière de s'instruire n'est pas celle d'un franc-maçon. C'est avec la même impudeur que vous niez l'existence de nos 90 degrés, tandis que votre Grand-Orient, qui, pour vous, doit être l'oracle suprême, a proclamé par sa circulaire du 27e j.\ 10e mois 5817, que de ces 90 degrés, il en possédait au moins 68. Vous désignez les délégués Misraïmites comme des êtres rapaces qui vendent à tous prix ces 90 degrés; vous prétendez qu'ils recrutent leurs adeptes dans les lieux publics; vous comparez leur style emphatique à celui de Cagliostro; enfin, vous cherchez par tous les moyens possibles à ridiculiser une association maçonnique dont vous fîtes partie, et peut-être par cela seul que vous n'êtes plus digne d'y figurer. Mais répondez franchement à cette question (si toutefois cela vous est possible) : Comment le Grand-Orient fait-il pour payer son local, et solder ses secrétaires ? Les meneurs de sa HAUTE PUISSANCE fouillent sans doute dans leur poche, et, par une suite de cette même générosité, toutes les loges et tous les maçons de leur dépendance, reçoivent gratis les lettres constitutives, diplômes, instructions, etc., etc. Qu'en dites-vous, F Richard? Malheureusement on sait le contraire, et l'on pourrait citer des LL qui se plaignent d'avoir envoyé des fonds, et de n'avoir jamais reçu du Grand-Orient les objets qu'ils avaient demandés. Beaucoup plus francs que vous, nous vous dirons : que nos chargés de pouvoir, qui, par une double ironie bien déplacée, sont qualifiés par vous de missionnaires, ont créé sur les divers points du triangle des loges et des conseils, composés en grande partie de maçons très éclairés que l'intolérance du Grand-Orient a éloignés de son sein ; que les néophytes admis par eux à nos mystères ont toujours été choisis parmi des hommes dont la morale et la probité étaient à toute épreuve ; que tous ces FF ont payé le juste tribut administratif de l'ordre ; mais qu'en échange, la Puissance Suprême a accompli envers eux tous ses engagements, et que chaque jour, ces FF se félicitent de leurs relations maçonniques avec elle. A quoi tendent donc, F Richard, toutes ces vagues diffamations? Auriez-vous cru, par hasard, qu'en nous désignant pour victimes, vous échapperiez au sacrifice? C'est là le rôle du délateur, vous en seriez-vous chargé ? Et comment n'avez-vous pas senti qu'en voulant renverser les temples de Misraim, vous ébranliez vous-même les colonnes de votre Orient. Le gouvernement est trop juste pour ne pas protéger ou frapper également. Si tel a été votre aveuglement, F Richard, si dominé par le fatal esprit de secte, vous avez espéré susciter contre nous une persécution spéciale, votre but a été rempli en partie et vous devez avoir éprouvé une certaine satisfaction, en voyant que vos calomnies et vos diffamations ont en effet éveillé l'attention de l'autorité civile et lui ont inspiré des soupçons contre nous; mais votre joie ne sera qu'éphémère ; modérez-en les transports ; ne vous enorgueillissez pas du succès. Nouveau Jupiter-Scapin, vous croyez peut-être avoir foudroyé Misraïm, et vous avez, au contraire, préparé son grand triomphe. C'est dans le temple de la justice que l'on compulse les papiers nombreux qui appartiennent à notre ordre, leur examen prouvera la pureté de nos actions, l'antiquité de notre institution, la régularité de nos travaux, la tolérance qui accompagne toutes nos actions, notre dévouement aux lois et au gouvernement paternel qui nous régit. Croyez cependant que, rentrés en possession de ces mêmes papiers, et rendus au libre exercice de leurs mystères, les Misraïmites n'en seront ni plus vains ni moins tolérants. Si même, les membres du Grand-Orient, revenus de leurs erreurs, renoncent à leur système oppressif et tyrannique, les enfants de Misraïm, qui ne les ont jamais exclus de leurs temples, les verront avec plaisir se rapprocher d'eux et dans leurs épanchements mutuels, renoueront avec une douce satisfaction la chaîne d'union qu'ils n'ont jamais rompue, et qui doit resserrer les liens de la fraternité maçonnique. Voilà nos vœux ; puissent-ils se réaliser ! Puissions-nous voir les maçons de tous les rites, éclairés du flambeau de la vérité, prospérer sous les lois de la tolérance et de la charité fraternelle, et adresser des concerts de louanges au Tout-Puissant, pour qu'il répande ses bénédictions sur nos travaux, qui n'ont pour but, que la gloire de son nom, la pratique des vertus, et le bien de l'humanité.

VERNHES, 87°

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