4/23/2013

Le symbolisme de la Cène au degré de Chevalier R+C




ORDRE DE LYON


ORDRE MACONNIQUE RETABLI DE MEMPHIS ET MISRAIM

Souverain Sanctuaire Général Lyonnais

Souverain Sanctuaire de Béthanie

Chapitre Constant CHEVILLON
Vallée de Paris


                   Le symbolisme de la Cène au degré de Chevalier R+C  dans le cadre de l'Ancienne Maçonnerie, et son évolution dans le cadre de la révolution du pasteur ANDERSON.

Mes Bien Aimés Frères Chevaliers,

Ne l'oublions jamais, la Franc-Maçonnerie de Tradition ou Ancienne Maçonnerie est Chrétienne, et se trouve être plus précisément catholique.

Avant d'examiner l'évolution de la cérémonie de la Cène au degré de Chevalier R+C, qu'il me soit permis de  rappeler ces dispositions des Anciens Devoirs selon le Ms Regius : "Si le bon sens te manque, prie Dieu de t'en faire don car c'est le Christ qui nous l'enseigne : la sainte église est la maison de Dieu, elle n'est bâtie que pour y prier, comme il est dit... Quand tu entends sonner la cloche qui annonce le saint mystère, agenouillez-vous tous, jeunes et vieux, et levez au ciel vos deux mains et dites, à voix basse, et sans faire de bruit : « Seigneur Jésus, sois le bienvenu sous l'aspect du pain,  par ton saint nom protège-moi du péché, accorde-moi l'absolution de mes péchés avant que j'aille à la communion." " (1)
Et encore dans le même Manuscrit : "Si tu ne peux pas venir à l'église, en quelque endroit que tu travailles, quand tu entends sonner la messe,  prie Dieu, dans le silence de ton coeur, de te donner part à ce service, que l'on célèbre dans l'église." (2)


Le Ms REGIUS date de 1390, à cette époque, les Hauts Grades n'existent pas, le Protestantisme non plus dont l'influence modifiera le sens de la Cène qui alors était vécue dans le cadre du Mystère Eucharistique, Protestantisme réduisant cette cérémonie à un vague symbole invitant les Chevaliers à se souvenir  qu'ils sont frère. Cette dérive provoquée par la Maçonnerie moderne et Protestante, n'empêchera pas certaines Loges régulières essentiellement en France, tout au long du XVIII° siècle et donc après la diffusion des Constitutions de 1723, à faire célébrer et assister les Frères  à des Messes, notamment comme le souligne Jean BAYLOT : "Souvent la messe précède l'élection des Officiers afin que le Saint-Esprit éclaire de Ses lumières les choix qui seront faits."  (3), l'histoire montrant que les maçons français étant de tradition catholique, refuseront longtemps les réformes Protestantes qui- nous  le verrons - avaient pour vocation de déchristianiser la FM de Tradition.

I

Le Catholicisme des Rituels liés à l'Ancienne Maçonnerie

TSCOUDY ne se trompe pas quand il écrit en 1766 que le grade de R+C est catholique : "Je fais cependant un peu plus de cas du Rose Croix, non pas celui de la lampe inextinguible, mais le Rose Croix proprement dit, ou maçon d'Hérédon, quoiqu'à tout prendre, ce ne soit qu'une Maçonnerie renouvelée, ou le catholicisme mis en grade, je ne le crois pas à beaucoup près du calibre des autres."   (4)

Que l'on ne se méprenne pas ! Le Rituel de 1785 précise : "La fête du chapitre est le jeudi-saint."  (5)

Ce choix du jeudi-saint n'est pas fortuit, il est le Jour de la Cène de NSJ+C, où tout à la fois Jésus+Christ instituera le sacrement de l'Eucharistie, mais aussi ne fera communier qu'un disciple, notre Frère Judas, oui Frère et non mauvais compagnon, en ce que par le geste du Sauveur donnant la bouchée de pain à l'apôtre, ce dernier - récapitulant notre condition de Chute - permettra la mort et la résurrection, en l'occurrence la victoire sur la mort née du péché (6)

Nous le savons et partageons cette opposition des Francs Maçons du Royaume de France à l'égard de la Maçonnerie anglaise et Protestante.

Alors que les Constitutions que nous décrions du pasteur prétendent présenter la Nouvelle Maçonnerie ou Maçonnerie Moderne comme :"la religion sur laquelle tous les hommes sont d'accord", en réponse à ce qui ne peut se définir comme une religion, en 1735, Les Devoirs enjoints aux maçons libres précise :
"on a jugé plus à propos de n'exiger d'eux que la religion dont tout chrétien convient." (7)

Fidèle aux Anciens Devoirs, l'Ordre de Lyon; en son Rituel d'affiliation, rappelle ce même principe :

"Mon Frère (Ma Sœur), lorsque vous avez demandé à rejoindre notre Vénéré Rite, vous avez été averti que celui-ci ne pouvait être suivi que par un observateur fidèle des usages anciens. Je vais donc vous donner lecture d’un extrait des « Règles et Devoirs de l'Ordre des Francs-Maçons du Royaume de France » l’Ordre de Lyon se référant à la version française la plus ancienne, datant de 1735 remises en novembre 1737 au baron de Scheffer à l'effet de constituer des Loges dans le Royaume de Suède :

« Un Franc-Maçon est obligé par son état de se conformer à la Morale et, s'il entend bien l'Art, il ne sera jamais un athée, ni un libertin sans religion. Dans les siècles passés, les Francs-Maçons étaient obligés de professer la reli­gion catholique, mais depuis quelque temps, on n'examine pas sur cela leurs sentiments particu­liers, pourvu toutefois qu'ils soient chrétiens, fidèles à leur promesse, et gens d'honneur et de probité. » (8)

Ces rattachements de la Franc Maçonnerie de Tradition au Christianisme, devaient être rappelés. Il nous échet de revenir plus précisément sur notre sujet, le sens de la Cène dans le cadre de la Tenue capitulaire des Chevaliers Rose+Croix.

Ce rapport, certes symbolique, au Saint Mystère ou Communion Eucharistique est affirmé dans le plus ancien Rituel de la Cène rattaché au degré de Chevalier R+C, où en 1765 il est précisé dans ce qui est considéré comme l'un sinon le plus ancien rituel : "Le Chapitre n'a de cérémonie de table que celle qui suit. Elle est indispensable  étant une commémoration de La Pasques et de l'apparition de J+C à ses disciples en Emmaüs."  (9)

Il est en effet un autre rituel à la même date que Paul NAUDON transcrit, et dans la prière du Très Sage un mot est changé qui est fondamental : alors que généralement il est dit "...béni la nourriture que nous allons prendre  et qu'elle soit à  ta plus grande gloire et à la satisfaction de tous les FF Chevaliers ..." (10), le mot "satisfaction" est remplacé explicitement par ces termes :
"Souverain Créateur de toutes choses, qui pourvoit aux besoins de tous, bénis la nourriture corporelle que nous allons prendre, qu'elle serve  à Ta gloire et à notre sanctification. Ainsi soit-il." (11)

Mes Bien Aimés Chevaliers R+C, prenons acte que la Cène primitive de notre illustre Degré ou Grade, s'inscrit dans la fidélité à l'unique Sacrifice accompli dans un Temps hoirs du Temps,  c'est à dire, que cette Cène s'inscrit symboliquement au Sacrifice propitiatoire renouvelé et se fondant dans l'unique sacrifice expiatoire de NSJ+C.

Entendons bien ce que rappellent  les plus anciens Rituels :

- la fête du Chapitre se déroule le Jeudi Saint où Jésus+Christ institua la Sainte Eucharistie,

- notre Cène repose sur une commémoration de la fête de Pâques et la reconnaissance par les disciples d'Emmaüs de la Résurrection du Sauveur par la fraction du pain,

- notre Cène peut être sinon prétexte du moins lieu de sanctification.

Nous n'avons certes pas encore abordé tous les aspects  sous tendus des Anciens Rituels, ni pris acte des volontaires déformations du sens spirituel de cet illustre Degré, posons toutefois deux points avant d'aller plus outre :

- Oui, il y a queste d'une sanctification, ainsi se comprend l'interrogation du Très Sage :
- "- Chev\ premier Grand Gardien, quel est le but du Chev\ R.+C. ?
1er Gr\Gard\    - Rendre hommage à la Divinité dans son cœur, dans son âme et dans son esprit. - Proclamer sa Gloire par des actes." (12)

- C'st bien NSJ+C qui se trouve évoqué par les initiales INRI, que le protestantisme transformera dans ce que livrent les rituels modernes, ne nous y trompons pas, le Rituel de 1865 conservé à Paris précise dans le catéchisme :
"I.N.R.I. Ce qui signifie Jésus de Nazareth, Roi des Juifs."  (13) 

Oui, le Chapitre R+C  est chrétien et la Cène est bien une commémoration de la pâque et du repas eucharistique, ainsi que le rappelle  le rituel de 1785 :
"Le chapitre de Rose croix n’a de cérémonie de table que celle qui va être dite mais elle est indispensable étant en commémoration de la pâque et du repas que Jésus-Christ fit lorsqu’il se fit reconnaître à ses disciples après sa résurrection" (14)

"Le Chapitre n'a de cérémonie de table que celle qui suit. Elle est indispensable  étant une commémoration de La Pasques et de l'apparition de J+C à ses disciples en Emmaüs."  (9) a-t-il été rappelé en évoquant le Ms de 1765.

Plus affirmé  s'il était besoin, le 22° Degré du Rite Ecossais primitif, appelé aussi Rite primitif de Namur, relate  quant au Banquet mystique que la table recouverte d'une nappe blanche, comprend outre les trois bougies blanches, le pain  et une coupe remplie de vin, "un christ", en l'espèce, un crucifix.
Le Très Sage après une prière "fait une génuflexion au Christ (devant le crucifix comprenons-nous) prend le pain, le lève vers le ciel, et en rompt un morceau qu'il mange, après avoir dit : "Il prit le pain, le bénit, le rompit et le mangea."
Il prend ensuite la coupe, la lève vers le ciel, et boit après avoir dit ;"Il prit le vin, le bénit et le but." Il fait ensuite une génuflexion au Christ." (15)

Outre l'évocation des paroles de l'Institution fortement actualisées d'une certaine façon, est tout aussi unique dans ce Rituel la présence d'un crucifix, Le Christ sur la croix, c'est la victoire sur la mort née du péché, en l'occurrence la condition pour notre rédemption, de première part l'Apôtre le déclare :
"Voilà pourquoi, de même que par un seul homme le péché est entré dans le monde et par le péché la mort, et qu'ainsi la mort a atteint tous les hommes : d'ailleurs tous ont péché..." (Romains V, 12), de seconde part :
"Si en effet, quand nous étions ennemis de Dieu, nous avons été réconciliés avec lui par la mort de son Fils, à plus forte raison, réconciliés, serons-nous sauvés par sa vie." (Romains V, 10)

Cette croix, ce crucifix, n'est pas l'expression de Dieu souffrant, la Passion fut vécue à Gethsémani, et le moyen choisi par Dieu pour permettre notre Rédemption et par voie conséquence notre Réconciliation, ce que certains théosophes chrétiens nomment la Réintégration des êtres dans leur état originel.

La Cène des Chevaliers Rose+Croix, - avant qu'elle ne soit plus tard déchristianisée par une maçonnerie a-dogmatique née d'un Protestantisme opposé au Catholicisme, ainsi que  les Rituels Andersoniens  que nous étudierons en la seconde partie de notre réflexion le monteront -,  s'inscrit bien dans l'attente du Huitième Jour dont Notre Seigneur Jésus+Christ précise : "Je vous le déclare : je ne boirai plus désormais de ce fruit de la vigne jusqu'au jour où je le boirai, nouveau, avec vous dans le Royaume de mon Père. " (Matthieu XXVI, 29)

A l'issue de cette communion des Chevaliers, que nous disent les Rituels ?

Tous les rituels que nous évoquons se terminent par cette parole du Très Sage adressée aux Chevaliers :

1° -  "La paix soit avec vous."
- Dans le Rituel  du 22° Grade du Rite primitif de Namur (15)
- Dans le Rituel de 1765 (16)
- Dans le Rituel du Grade du Chr de l'aigle souverain prince de Rose Croix (17)
Dans le Rituel de 1785 (18)
Une variante, attendu que c'est le Surveillant qui répond  au Très Sage et en latin

2° -  "Pax  vobis."
Dans le Recueil précieux de la maçonnerie adonhiramite (19)
La Paix soit avec vous.

Mes Bien Aimés Chevaliers,

Les disciples d'Emmaüs "partirent et retournèrent à Jérusalem ; ils trouvèrent réunis les Onze et leurs compagnons,  qui leur dirent : " C'est bien vrai ! Le Seigneur est ressuscité, et il est apparu à Simon. "  Et eux racontèrent ce qui s'était passé sur la route et comment ils l'avaient reconnu à la fraction du pain.  Comme ils parlaient ainsi, Jésus fut présent au milieu d'eux et il leur dit : " La paix soit avec vous. "  (Luc XXIV, 33-37)

Au soir de la résurrection, " alors que, par crainte des Juifs, les portes de la maison où se trouvaient les disciples étaient verrouillées, Jésus vint, il se tint au milieu d'eux et il leur dit : " La paix soit avec vous. "(Jean XX, 19)

Cette paix, La Paix, que NSJ+C donne aux disciples, est liée à La Résurrection et ne se trouve pas offerte par le Christ, avant l'accomplissement par le Sauveur de notre Rédemption permise par le Sacrifice du Calvaire.

il est un autre, troisième et dernier passage, sinon le premier dans les Ecritures où cette paix est évoquée, cela peut sembler anodin, en Genèse XLIII, 23 :
" L'intendant répondit: Que la paix soit avec vous! Ne craignez rien. C'est votre Dieu, le Dieu de votre père, qui vous a donné un trésor dans vos sacs."

Quel est ce trésor lié à la Paix ? " Car où est ton trésor, là aussi sera ton coeur."(Matthieu VI, 21), et si " " Le Royaume des cieux est comparable à un trésor qui était caché dans un champ." (Matthieu XIII, 44), ce trésor caché ne nous renvoie-t-il pas à la Parole perdue à retrouver : I. N. R. I. ...

Quel autre sens est-il à réserver à ces quatre lettres, sinon les attribuant au Christ Jésus, dans une totale humilité, dire qu'ils sont le résumé d'un Mystère, du Mystère de la Gloire de Dieu, ayant accepté par l'Incarnation d'être le plus humble, afin qu'il nous soit permis un jour de contempler Sa Gloire, car ainsi que le souligne l'apôtre " Mais maintenant, en Jésus Christ, vous qui jadis étiez loin, vous avez été rendus proches par le sang du Christ."  (Ephésiens II, 13)

Ce sang de NSJ+C, est explicitement rappelé dans les Rituels évoqués, mais peut-être de manière à n'être entendu que par les Chevaliers qui se reconnaissent comme Amis du Sauveur, lorsque tous les Rituels étudiés et rappelés énoncent cette phrase : "... il se passe un dérangement sur la surface de la terre, le voile du temple s'est déchiré, les Ténèbres se répandent sur la terre, la lumière s'est obscurcie, l'Etoile flamboyante est disparue, la pierre cubique a sué sang et eau, et la Parole est perdue."  (20)

Ainsi que l'on ne saurait le contester selon l'esprit des Rituels de l'Ancienne Maçonnerie, les initiales INRI sont bien  reliés à l'instant où les ténèbres s'obscurcirent, où le voile de ce qui ne pouvait n'être que le Temple de l'Ancienne Alliance, se déchirait, alliance révolue par le Sacrifice du Sauveur, où à la question du Très Sage demandant aux Surveillant comment retrouver la Parole, il lui est répondu  dans le Ms de 1785: "Embrasser la nouvelle loi" (21)

Oui, la Pierre est bien le Christ.

Notre Seigneur a sué sang et eau, d'une part à Gethsémani, alors que les disciples dormaient comme le relate Luc XXII, 44 : " il priait plus instamment, et sa sueur devint comme des caillots de sang qui tombaient à terre.", le Sauveur étant mort dans la condition de notre vie terrestre, " un des soldats, d'un coup de lance, le frappa au côté, et aussitôt il en sortit du sang et de l'eau."  (Jean  XIX, 34)

L'apôtre nous le rappelle : " Vous avez été édifiés sur le fondement des apôtres et des prophètes, Jésus-Christ lui-même étant la pierre angulaire" (Ephésiens  II;20)

La Pierre a sué sang et eau, il échet de constater que tous les rituels usent du passé composé. Ce choix grammatical qui n'est ni l'imparfait quant à un fait révolu, ni le présent quant à un fait obligatoirement actuel, pose que cette sueur si j'ose dire de sang et d'eau, expression de la Passion morale, cette Passion morale n'est pas rompue par le présent ni par un passé révolu : ne nous revient-il pas Chevaliers Rose+Croix de prendre ce soir conscience que nous sommes susceptibles  - parce que nous sommes es hommes et donc des pécheurs - que nous sommes susceptibles de  maintenir cette Douleur ressentie par Notre Seigneur à Gethsémani, alors qu'il nous revient d'être un jour trouvés fidèles selon le dialogue du Fils à Son Père que relate le Chapitre XVII de Jean.

Si les apôtres sont endormis, et qu'il nous est demandé de veiller, cette veille ne signifie pas d'user de n'importe quels propos, elle suppose parfois le silence et non d'articuler des formules vides d'un quelconque sens spirituel.

Ainsi, tous les Rituels évoqués lors de la Cène font expressément garder le silence aux Chevaliers R+C partageant le Pain et le Vin (23)

Benoît, le Patriarche des moines d'occident expose que : "l'observance du silence  favorise grandement l'esprit de prière." (24)

Le mystère du silence s'inscrit dans l'éducation de l'ouïe qui conduit à l'éveil de la vue, de la vision, de la vision béatifique :"Ecoute ma fille, vois et prête l'oreille" dit le Psalmiste  (Ps. XLV, 11).

Si l'Apprenti doit garder le silence dans le cadre de ce premier cycle de son éducation maçonnique, après avoir franchi les degrés attachés à ce que l'on pourrait dénommer l'Ancienne Alliance,  par distinction et opposition d'une certaine manière à cette Ancienne Alliance, le maçon admis au Chapitre des Chevaliers R+C, embrasse la Nouvelle Loi, cette Nouvelle Alliance et là redevient un Apprenti dont le devoir de silence n'aura plus les mêmes motifs : alors qu'antérieurement il s'agissait pour  lui de canaliser et dompter ses pensées et réactions immédiates, une indiscipline pouvant le conduire à ne pas maîtriser ses passions, le silence du Chevalier R+C  a pour vocation de le conduire vers la contemplation de la Gloire de Dieu, silence ne signifiant surdité mais  écoute de cet invisible car à l'école de Bernard de Clairvaux il est rappelé
"le Saint-Esprit même observe cet ordre dans l'avancement spirituel de l'âme, et qu'il forme .l'ouïe avant de réjouir la vue."(25)
Ainsi, le spirituel précisait-il : "Pendant que la vue n'est pas encore préparée, que l'ouïe s'excite donc, qu'elle s'exerce  et reçoive la vérité." (26)
Pour en finir, certes trop hâtivement avec Bernard, citons ce dernier passage :
"Quelle merveille que l'oreille entende la vérité puisque la foi vient par l'ouïe (Rom. X, 17), que l'ouïe se forme, par la parole de Dieu, et que la parole de Dieu est la vérité? (27)

Aux vociférations du grand prêtre, "Jésus gardait le silence" (Matthieu XXVI, 63). Quand finalement et après ce silence le Christ répond : "je vous le déclare, désormais vous verrez le Fils de l'homme siégeant à la droite du Tout-Puissant et venant sur les nuées du ciel. " (Matthieu XXVI, 64)

Après cette étape du silence qui nous est demandé lors de la Cène,  ainsi que le signalent les plus anciens Rituels, afin de comprendre le sens de notre engagement en qualité de Chevalier R+C. qu'il nous échet de rappeler :
"Rendre hommage à la Divinité dans son cœur, dans son âme et dans son esprit. - Proclamer sa Gloire par des actes." (12)

Après ce silence choisi par le Sauveur, Le Christ  nous dit : " vous verrez le Fils de l'homme siégeant à la droite du Tout-Puissant et venant sur les nuées du ciel. " (Matthieu XXVI, 64)

En l'occurrence, dès lors que notre silence s'anéantit dans notre tension que nous pouvons appeler Prière et proclame la Gloire de Dieu, il nous sera peut-être permis  sinon de Communier à la Présence, déjà d'accéder à la conscience de ce qui est le Mystère des Mystères.

Si nous gardons consciemment  le Silence lors de la Cène, parce que ce repas est un rappel respectueux du partage du pain avec les disciples d'Emmaüs, et non  le prétexte sinon l'occasion de proférer des mots vides de sens dans la transmission du pain puis du vin au Chevalier à qui nous tendons ensuite des éléments, alors,

- nous ne nous  trompons pas sur le sens de cette Coupe que nous partageons.

- nous ne nous trompons pas sur le sens de ce Pain que nous partageons.

Certes, il serait possible de gloser longtemps encore sur les Rituel de cette Ancienne Maçonnerie qui perdure malgré la révolution Andersonienne.

Il nous échet  d'évoquer les Rituels modernes, occasion sans doute de distinguer les différences volontairement posées par une Maçonnerie a-dogmatique et libérale.

II

Le Protestantisme des Rituels liés à la Maçonnerie moderne et libérale

Si pour notre part, nous estimons que la déchristianisation du Degré de Chevalier R+C émane des conséquences de la révolution Protestante du pasteur Anderson s'opposant explicitement à Rome et par ce fait au Mystère Eucharistique, le dit réformateur d'une Maçonnerie Moderne a-dogmatique  et libérale (24), il est vrai que cette idée gêne bien des maçons, bien des historiens, fussent-ils parmi les meilleurs, comme Pierre MOLLIER qui dans son importante étude n'évoquera pas Anderson (25)

Toutefois, il échet de reconnaître la grande valeur des travaux historiques de Pierre MOLLIER et,  pour notre part, meilleur connaisseur de l'Ancienne Maçonnerie cette Maçonnerie de Tradition est parfaitement défendue par cet autre excellent historien Patrick NEGRIER.

 Pour cette partie moderne, nous conseillerons  de prendre connaissance des leçons de Pierre MOLLIER (25)
Notre réflexion concerne maintenant le XIX° siècle et, en 1806, Antoine-Guillaume CHEREAU écrit en son  Explication de la croix philosophique : "Les quatre lettres du mot des chevaliers R+C, INRI, n'ont pas toujours  été prises pour l'emblème de Jésus+Christ : Ces quatre lettres mystérieuses étaient connues longtemps avant sa naissance, par les anciens philosophes païens qui avaient arraché les grands secrets à la nature. En pénétrant jusqu'au sanctuaire, ils avaient  appris qu'elle se renouvelait à son propre foyer. (le travail de son organisation dépendant continuellement du grand Jehova, âme et matière universelles." (28)

La nature se renouvelle à son propre foyer. Pierre MOLLIER a raison de voir dans cette formule de CHEREAU, sinon de suggérer l'origine de la phrase : Igne Natura Renovatur Integra, cette formule toute païenne C'est par le feu que la nature se renouvelle, remplacera pour le Rituel de 1765 : Jésus de Nazareth Roi des Juifs et pour les autres rituels préalablement  étudiés : Emmanuel assimilé à l'explication des initiales INRI (29)

Nous sommes bien dans une déchristianisation du Rite !

Afin de ne pas conséquemment augmenter le temps de votre écoute et compte tenu que vous avez en main un ou des rituels de Chevalier R+C, que fort des observations émises, il vous sera aisé de percevoir la révolution organisée dans l'évolution du Rituel du Chevalier R+C à compter du XIX° siècle, qu'il me soit permis deux remarques quant à ces derniers :

RAGON en son Rituel remplacera les réponses à INRI par celles-ci : D. Mon F:. D'où avez-vous tiré le plus de connaissance ? - R. De l'Inde. - D. Qui vous a le mieux guidé ? - R. La Nature. - D. Qu'a-t-elle produit en vous ? - R. La Régénération. D. Qu'avez-vous eu à combattre ? R. Mon Ignorance." (30)

Obligé de suivre certaines lignes du Rituel RAGON, déformera toutefois le sens de ce dernier autant que faire se pourra, aux 33 ans de NSJ+C s'étant Incarné et dont le sens est suggéré par les anciens Rituel, il préférera prétendre que cet âge représente
"deux 3 {qui]indiquent deux triangles ou les deux hémisphères."  (31)

Alors que toujours est suggéré le Christ, RAGON préfère à cette question répondre en évoquant la Loge : "D. Qui vous a reçu ? - R. Le plus modeste de  tous. D.  Qu'entendez-vous par ces paroles ? - R. Que dans nos réunions, on ne se distingue que par les talents, et le plus instruit voit qu'il ne sait rien en comparant ce qui lui reste à apprendre." (32)

Par ailleurs, il est donc des rituels disant lors de la Cène : "Donnez à manger à celui qui a faim"  et aussi  "Donnez à boire à celui qui a soif."

Déjà que l'actuel Benedicite dans sa formule dite Latine ou Romaine, suggère ce qui relève d'une fausse charité car dans les faits, quel Chevalier ira donner à manger ou à boire après ou avant la Cène à celui qui  faim et qui a soif.

Sous l'extrême réserve de s'appliquer cette discipline : "j'ai eu faim et vous m'avez donné à manger ; j'ai eu soif et vous m'avez donné à boire." (Matthieu 25, 35), ne proférons pas des paroles qui exposent un engagement que nous ne saurions tenir.

Si nous devions vraiment parler; il sera préféré cette formule traditionnelle : " Que la main de Jésus-Christ nous bénisse, nous et la nourriture que nous allons prendre. Ainsi soit-il." (32)

Car c'est Dieu qui pourvoit et non l'homme, fuit-ce par la main de l'homme,  ainsi cette prière avant le repas :
" Les regards de toutes les créatures se lèvent vers Toi, Seigneur, Tu leur accordes la nourriture en temps opportun; Tu ouvres ta main généreuse et Tu combles tout ce qui vit des dons de ta sollicitude."  (33)

Il nous revient de conclure. Certes bien des points furent abordés et j'ose espérer ne vous avoir pas trop importuné.

S'il nous échet de ne pas oublier notre Devoir : "Rendre hommage à la Divinité dans son cœur, dans son âme et dans son esprit. - Proclamer sa Gloire par des actes." (12),  alors comprendrons-nous au travers de la Cène, ce rappel de l'apôtre : " Soit donc que vous mangiez, soit que vous buviez, soit que vous fassiez quelque autre chose, faites tout pour la gloire de Dieu." (I Cor. X, 31)

Que l'occasion de cette Cène, de ce partage silencieux, soit un instant privilégié pour nous rappeler nos Devoirs, quand bien même il ne s'agit pas au travers de cette cérémonie d'actualiser le Dernier Repas de Notre Seigneur pris avec ses apôtres, du moins pour rendre gloire à Dieu, ne nous trouvons nous pas aidés par cette Présence spirituelle promise par le Sauveur : " là où deux ou trois se trouvent réunis en mon nom, je suis au milieu d'eux. " (Matthieu 18, 20)

Cette communion la partageons-nous ? Il nous échet par nos actes de rendre témoignage, alors nous n'aurons pas failli à notre devoir de Fraternité envers tous les êtres qui, en ce Grade se décline selon les trois Vertus théologales, trésor  de la FM Universelle, car ainsi que le rappelle l'apôtre :
" Quand j'aurais le don de prophétie et que je connaîtrais tous les mystères et toute la science, quand j'aurais la plénitude de la foi, une foi à transporter des montagnes, si je n'ai pas la charité, je ne suis rien."  (I Corinthiens XIII, 2)

J'ai dit.

----------------- Notes

1 - Ms REGIUS, vers  585 à 591 puis 637 à 648. Nous suons par commodité d'une édition Internet, toutefois pour une version imprimée : La franc-maçonnerie : documents fondateurs, Cahiers N° 62, L'Herne Ed, pages 59 et 61.

2 - Id. vers 687 à 693, op. cité page 63  

3 - Jean BAYLOT : Dossier français de la FM régulière, Paris, Ed VITANO, 1965, page 79.

4 - Théodore de TSCOUDY : L'Etoile flamboyante, tome 1, page 149, éditions numérisées disponibles sur Internet, notamment : http://www.masoniclib.com/

5 - Rituel : Chevalier de l'Aigle Souverain Rose Croix Ms 3080  Avignon, Musée Calvet, pages 64 et 75 selon transcription sur Internet : 1785 TROISIEME POINT DU ROSE CROIX

6 - J-P BONNEROT : Judas ou les conditions de la rédemption, Cahiers d'Etudes Cathares Ed, 1984, N° 104. Parmi les accès via Internet : http://misraim3.free.fr/gnosticisme/JUDAS.PDF

7 - Anonyme : Les Devoirs enjoints aux Maçons libres 1735-1736 Bnf, Ms N° FM4 -146, texte donné intégralement par Alec MELLOR : La charte inconnue de la franc-maçonnerie chrétienne. Mame Ed, 1965 page 11, Cf., par ailleurs le chapitre 2 "La religion dont tout chrétien convient." pages 49 et ss.

8 - Ordre de Lyon : Rituel d'affiliation, pages 2 et 3 extraits.

9 - Anonyme : Un rituel du grade de Rose+Croix daté de 1765. Bibliothèque historique de la ville de Paris, Ms 23191, transcrit in Renaissance Traditionnelle, Numéros 5, 6 et 7, janvier, avril et juillet 1971, présentement N° 7, page 241.
A propos d'Emmaüs : ... "Et eux racontèrent ce qui s'était passé sur la route et comment ils l'avaient reconnu à la fraction du pain.  Comme ils parlaient ainsi, Jésus fut présent au milieu d'eux et il leur dit : " La paix soit avec vous. " (Luc XXIV, 35-37)

10 - Id, page 242, Le Ms Kloss  XXXIV-2 (non paginé) offre une prière pratiquement similaire
Ce rituel fut donné en son temps sur le site du groupe Martiniste  Yahoo Maitre Inconnu. Certains furent placés sur le site de l'ODL, il est envisagé de placer d'autres Ms Kloss.

11 - Paul NAUDON : Histoire et rituels des hauts grades maçonniques. Dervy Ed, 1972, page 259.

12 - Ordre de Lyon : Rituel de Chevalier R+C,  ouverture, clôture, célébration de la Cène, page 15.

13 - Anonyme : Un rituel du grade de Rose+Croix daté de 1765, op. cité, page 246.

14 - Rituel : Chevalier de l'Aigle Souverain Rose Croix Ms 3080  Avignon, op. cité, pages 63 et 75 de l'édition Internet utilisée.

15 - Rit Ecoss:. primitif, R:.+, 22e GRAD:.; CAHIER DU T:. SAGE. sOUV:. Chap:. de la Bonne Amitié, Val:. de Namur, Ms non paginé,  aimablement transmis par un Frère. Sauf erreur, Ms Kloss VL4

16 - Anonyme : Un rituel du grade de Rose+Croix daté de 1765. Bibliothèque historique de la ville de Paris, Ms 23191, op. cité, page 244

17 - Ms Kloss XXXIV-2, déjà cité en note 10, sans pagination originelle

18 - Rituel : Chevalier de l'Aigle Souverain Rose Croix Ms 3080  Avignon, Musée Calvet,
op. cité, pages 63 et 75

19 - Anonyme : Recueil précieux de la Maçonnerie Adonhiramite (tome2), 7° Grade, 1786, page 133. Pour un accès Internet via Google par exemple.

20 - Rituel de 1865, op. cité, page 158 ; Rituel de 1785, op. cité, page 57 et 69 ;
Rite primitif de Namur, non paginé ; Ms Kloss, op. cité, non paginé ; Recueil précieux, oP; cité, tome 2, page 122 ; Rite Français, Ms 1786, Travaux du Souverain Chapitre en ses Quatre Ordres, A L'ORIENT Ed, 2002, page 125.
>>> Il sera signalé qu'en dehors du Ms de 1765, les autres textes ajoutent  que les outils et/ou les colonnes de la Loge sont brisés.

22 - Travaux du Souverain Chapitre en ses Quatre Ordre, op. cité, page 131

23 - Rituel de 1865, op. cité, pages 242, 243 ; Rituel de 1785, op. cité, page 63 et 6( ; Rite primitif de Namur, non paginé ; Ms Kloss, op. cité, non paginé ; Recueil précieux, op; cité, tome 2, page 133 ; Rite Français, Ms 1786, Travaux du Souverain Chapitre en ses Quatre Ordres, op. cité, page 153.
>>> Il sera signalé une légère variante dans le Recueil précieux où le Très Sage en donnant la coupe au 1er Surveillant, dit : Emmanuel, et le 1er Surveillant lui répond  Pax vobis.

24 - Daniel LIGOU : Constitutions d'Anderson, Ed maçonniques de France, page 187 : "article 6 De la conduite à tenir  [relativement à ce qui touche le devoir de ne pas évoquer la religion, la Nation, la politique de l‘Etat, Anderson termine le §2 ainsi] : « Cette obligation de toujours a été strictement enjointe et observée, mais particulièrement depuis la Réforme en Grande Bretagne vu la séparation et la sécession de ces Nations de la communion de Rome. »

25 - Pierre MOLLIER : Le grade maçonnique de Rose-Croix  et le christianisme : enjeux et pouvoir des symboles, L'Age d'Homme Ed, collection POLITICA HERMETICA, N° 11, 1997, pages 85 à 114

24 - Règle de notre père saint Benoît, traduction de Philibert SCHIMITZ, Ed BREBOLS,  chapitre 19, article 63, page 46.

25 - St BERNARD : Sermons sur le cantique des cantiques, in œuvres mystiques, sermon 28, 7, Ed du Seuil, page 342.  Pour un accès Internet :
http://www.abbaye-saint-benoit.ch/saints/bernard/ 
Nous utilisons, par commodité, de  l'édition Internet pour les citations.

26, id. 28,6. page 341

27 - id. 28, 7, page 343

28 - Antoine-Guillaume CHEREAU : Explication de la croix philosophique, Gutenberg reprint, page 11
Il échet de signaler l'imprécision de  Pierre MOLLIER en sa note N° 44, page 111,  l'éminent historien cite la page 11 dudit texte, sans distinguer qu'une même  pagination existe  pour un autre texte inséré sur l'"Explication de la pierre cubique,
d'autant que le titre donné comprend les deux opuscules, mais leur pagination ne se suit pas.

29 - A titre d'exemple, tous les rituels principalement étudiés sauf celui de 1765, exposent : D. INRI -R. Il est juste Très Sage Maître - D. Ne vous a-t-on rien donné de plus ? - R. Très Sage on m'a donné le mot de passage qui est  Emmanuel.

30 - J-M RAGON : Ordre Chapitral nouveau GRADE DE ROSE-CROIX, fac-similé, Ed du Prieuré,  page 69

31 - Id. page 73

31 - Id. page 75

32 - http://hcrouzablanque.free.fr/parties/prieres.htm#benedicites

33 - http://calendrier.egliseorthodoxe.com/pages/prieres/midi.html

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