10/23/2005
DOC- Méditations Initiatiques-CHEVILLON
BIBLIOTHÈQUE DES ANNALES INITIATIQUES
C. CHEVILLON
MÉDITATIONS INITIATIQUES
LYON Paul DERAIN
128, Rue Vauban 1953
DIEU EST UN ACTE PUR
Dieu est un acte pur éternellement réalisé. L'homme est un acte en voie de réalisation perpétuelle.
Toute réalisation étant basée sur une volonté, la volonté divine est donc immuable, en face d'une volonté humaine développée progressivement au rythme de l'action. Ainsi, identiques dans leur essence, elles diffèrent dans leurs modalités. La première n'a besoin d'aucun support ; la seconde, de toute évidence, doit être étayée, et la volonté divine, dans son immuabilité, seule peut lui servir de soutien. La nécessité de cet appui doit inciter la volonté humaine à ne point rechercher, ni en elle-même, ni dans le monde extérieur accidentel et passager, une fin particulière inadéquate à son devenir incessant. La fin dernière d'une volonté en évolution est de se modeler sur l'immuable
et de transposer l'écoulement temporel en mode d'éternité.
La conséquence, c'est que l'homme ne doit pas choisir son but ; il doit réaliser Dieu en lui-même, il doit faire, dans l'espace et le temps, l'œuvre de Dieu dont il est, en quelque sorte, le substitut.
Mais si le but est fixé, les moyens de réalisation sont du ressort de notre liberté: "Re/inqml mundutn disputationibus eorum". Or, dans ce domaine des réalisations, si l'ardeur et l'audace sont des vertus, il faut les enrober dans un manteau d'humilité, car toute activité humaine est une résultante de l'activité divine. Nous sommes entre les mains de Dieu des instruments susceptibles d'adaptation et notre liberté s'épanouit dans le respect et le développement de l'harmonie universelle.
Si notre esprit peut s'élever à cette conception et s'y conformer, la paix descendra sur nous, la paix qui est la joie d'être dans la voie droite. La paix n'est donc pas un repos, une paresse de l'âme et du corps que rien ne vient troubler, c'est une lutte, une conquête spirituelle, dont la perpétuelle tension contraint l'harmonie divine à se réaliser en nous.
DIEU EST AMOUR
Dieu est amour. Il est même tout amour ; toutes ses facultés, toutes ses prérogatives, son essence entière sont amour. Donc, comme il y a trois personnes en Dieu, il doit y avoir trois aspects de l'amour. En effet, celui-ci est substance, distinction et unité ; dans ces trois concepts se trouvent développées toute la métaphysique, toute la science et toute la philosophie de l'amour.
Le premier stade c'est la vie, le débordement de la vie. On veut étreindre l'amour, on veut communier avec tous les êtres, on veut soulever le monde ou le créer. C'est l'amour du Père qui donne la substance à tous les êtres, car il est la racine essentielle de la vie. La vie bouillonne en lui, elle déborde en quelque sorte et veut se répandre partout. L'amour du Père donne la vie, il est l'amour qui se donne, selon la parole
de l'apôtre Jacques : " Omne datum perfectum a pâtre luminum ".
Mais ce débordement, cet immense désir de se donner, que nous avons tous ressenti aux jours de notre adolescence, ne peut se réaliser sans un objet adéquat. Il faut à l'amour un autre stade, un moyen d'expression, et ce moyen nous le trouvons dans le Verbe, deuxième hypostase du divin ternaire. Pour donner son amour et par conséquent la vie, il faut opérer un choix, il faut entre tous les objets possibles de l'amour en distinguer un. Or, comme la faculté de distinction du Verbe est infinie, cette phase de l'amour est la plus vaste de toutes et la plus féconde ; les poèmes et les livres qu'elle a inspirés sont nombreux comme les étoiles du ciel, ils sont toujours jeunes et toujours lus. C'est, en effet, la distribution de l'amour. Le Père a tout conçu et créé, mais il a créé par son Verbe. Et le Verbe s'est complu dans la création parce qu'il est le distributeur de l'amour. C'est pourquoi, sous le calame de Salomon, la Sagesse, qui est le Logos éternel, s'écrie : " Delkiae meae esse cum filiis hominum ".Le Verbe, même, va plus loin ; lorsque l'homme eut péché et rompu tout rapport d'amour avec le créateur, le Fils, qui est le Verbe incarné, tendit la main au pêcheur
pour lui donner une preuve inouïe de son amour. Jésus aimera ses apôtres et ses disciples, il aimera la Samaritaine et la pécheresse de Magdala, il aimera Jean et Lazare d'un amour de dilection. Il mourra sur la croix du Golgotha pour donner à tous la possibilité de redevenir les fils du Père. Il n'y a pas de fibre humaine et de faculté spirituelle qui restent insensibles dans la diffusion de l'amour.
Ce n'est pas tout. Créer de la vie et de l'amour, les distribuer, ne constitue pas une fin, ce sont des étapes vers une réalisation plus haute. A l'amour il faut un but et ce but c'est l'unification de l'Etre et des êtres. C'est la troisième et dernière stase, consacrée au sein de l'essence divine par le Saint-Esprit. L'amour unifie, car il crée la famille, la nation et la communauté humaine. Bien plus, par delà la mort, il va à ceux qui ne sont plus, à ceux qui ont aimé, se sont épanouis et ont souffert dans l'amour, c'est l'Eglise universelle, la Communion des saints. Sur ce faîte, l'amour épuise ses modalités mais non pas sa puissance, il se développe à travers l'infinité des formes et des êtres, et ne peut se fixer de limite. Ainsi l'homme qui ne peut tout savoir, ni tout comprendre, sans se lasser pourtant de poursuivre l'actualisation totale de la science, l'homme peut et doit,
dans sa conscience limitée, atteindre la totalité de l'amour, la Charité universelle. Tout aimer, telle est la loi suprême de l'amour. C'est pourquoi Paul dit aux Ephésiens (III, 14 à 19) : " Je prie pour que... enracinés et fondés dans l'amour, vous puissiez comprendre quelle est la longueur, la largeur, la hauteur et la profondeur".
L'amour dans sa première phase est une énergie impétueuse, un débordement de vie sans spécification, la tendance à s'extérioriser et à tout embrasser. A sa deuxième étape, il se présente à nous comme une distinction et un choix, comme une lutte qui comporte des alternatives de triomphe et de déboire. A son apogée, c'est la paix et la sérénité dans l'union et dans la force.
Sondez l'essence divine et vous y trouverez l'amour, un et trois comme Dieu lui-même ; sondez l'homme et vous le rencontrerez encore sous le couvert phénoménal de la nature contingente. Dieu est tout amour et l'homme créé à son image est le reflet de cet amour.
Maintenant, transposez tout ceci en mode sensible et vous aurez toute la joie humaine ; appliquez-le au plan divin et vous aurez toute la gloire de la Béatitude éternelle.
DIEU DANS LA CONSCIENCE HUMAINE
Dieu est infini, absolu, ineffable.' Il-, est parfaitement inintelligible, dans 'son essence suprême, pour tout être créé, cet être eût-il gravi la plus haute cime de la spiritualité. Les hommes pourtant peuvent s'élever vers les confins de la sphère divine, grâce à la foi, soutenue par l'espérance et l'amour. Ils se haussent par l'intelligence et consolident leur position de croyant par la volonté. Mais, si la volonté, dans sa faiblesse, ne connaît pas de borne pour son amour, la raison et l'intellect sont impuissants à saisir les choses et les êtres dans leur ipséité elle-même, impuissants à transgresser là relativité des rapports engendrés par la science. Ils ne peuvent s'asseoir en des notions définitives et ne varietur-, la connaissance, comme son instrument, est un devenir. Nous ne pourrons donc jamais connaître Dieu, l'acte
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pur, sinon par ses qualités et attributs, envisagés à la manière humaine. En d'autres termes, nous ne comprenons pas Dieu, mais la divinité ; et celle-ci, un des plus grands mystiques du xme siècle nous le dit sans ambages, est loin de Dieu, comme la terre l'est du ciel ; nous pouvons ajouter : comme la matière l'est de l'esprit. La divinité est un concept ; Dieu c'est l'être et c'est la vie. Aucune définition de ces deux derniers termes, ne peut être donnée, car leur somme d'intelligibilité humaine résulte d'une comparaison entre eux et le néant ou la mort.
Ainsi, chaque homme, dans sa soif de savoir, peut se faire une idée, non pas de Dieu inaccessible, mais de la divinité, selon la forme et la puissance de son entendement et il adhère à cette notion transcendantale avec toutes les forces de son être. L'humanité, en somme, a le Dieu qu'elle mérite, le Dieu de sa culture et de ses désirs, et chaque individu, selon son ascèse ou sa médiocrité intellectuelle, se forge, à chaque minute de son existence, un Dieu à sa portée, un Dieu à sa mesure, car il n'y a pas d'athées, malgré toutes les affirmations contraires. Pour les uns, Dieu, c'est la nature, matrice commune de toutes choses, champ clos où se déroulent les séries phénoménales. Pour
DIEU DANS LA CONSCIENCE HUMAINE
d'autres, c'est l'énergie, âme de la masse, génératrice du mouvement et de la résistance. Pour ceux-ci, ce sont les principes universels et les lois régulatrices de l'équilibre cosmique. Certains passent outre à ces notions mécaniques ou dynamiques et les incorporent dans une conception plus haute et plus féconde. Pour eux, Dieu n'est pas seulement le fleuve vital torrentiel, aux berges imprécises, dont les eaux, sans cesse renouvelées, s'enfuient vers l'océan de la mort ; ce n'est pas l'énergie aveugle, la matière inerte ou la loi impondérable. Ils considèrent les formules mathématiques ou cosmogoniques comme la codification humaine de l'activité créatrice. Leur Dieu est une hypostase principielle dont aucune science ne peut donner la clef ; ils le revêtent de toutes les potentialités énergétiques, intellectuelles et morales répandues par Lui, Un, dans toutes les manifestations diversifiées de sa puissance. Il est la source, le pivot, le moyen et la fin. La parole du Buisson Ardent retentit dans leur pensée : " Je suis celui qui suis ". Mais ils s'inclinent sans comprendre ; le contingent est une fumée devant l'absolu. Ils sentent, dans les replis de leur conscience dont la nature est divine, et parfois emportés sur les ailes d'une méditation dans laquelle les paroles n'ont plus
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aucune valeur, ils voient comme il leur est donné de voir, car selon la parole de l'Ecriture : il y a plusieurs demeures dans la maison du Père.
Mais, pour les uns comme pour les autres, en tout ceci se rencontre inévitablement un anthropomorphisme, au moins virtuel, nécessité par nos facultés représentatives et expressives, il jette un voile sur l'essence intangible de Dieu.
LA CHARITÉ
Si un mot couvre une idée sublime, il devient, pour l'âme, un pain miraculeux ou un ferment de désagrégation, suivant la traduction qu'elle s'en fait à elle-même.
Le plus beau mot du langage humain est celui de Charité. Saint Paul a dit : " Si ma foi pouvait transporter les montagnes, je ne serais rien sans la Charité".
Quel homme sait, maintenant, le sens profond de la Charité ? La Charité, c'est l'amour, mais un amour vaste et profond comme un océan, sur lequel il ne faut pas s'aventurer sans guide et sans boussole.
L'amour c'est la vie, la cause et la fin de toutes nos aspirations, le principe même de notre activité. Donnez à ce principe sa valeur réelle, vous serez un fils de Dieu ; trahissez
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son acception véritable, vous resterez dans l'ornière de l'animalité ancestrale.
Aimer selon la Charité, c'est aimer dans la lumière, car l'amour est la lumière de l'âme. L'amour vrai est donc toute lumière, il déteste les ténèbres. Or, la lumière c'est la vérité et les ténèbres sont erreur et l'erreur est le plus grand de tous les maux. Aimer c'est donc haïr l'erreur et partant le mal. Celui qui aime peut-il pactiser avec le mal dont souffre son amour ? Jamais, il met tout en œuvre pour le détruire. Et c'est ici qu'intervient, comme une pierre d'achoppement, la transposition humaine de notre pauvre charité.
De toute évidence, nous aimons le Bien ou ce que nous concevons comme un bien, et nous haïssons le mal. Mais notre amour du Bien et notre haine du Mal sont faussés dans leur principe et dans leurs incidences. Au lieu d'aimer le Bien, nous nous attachons aux biens ; au lieu de haïr le Mal, nous reportons notre haine sur les auteurs réels ou supposés de nos maux. Et les individus se dressent contre les individus, les peuples contre les peuples pour conquérir des richesses ou dompter des adversaires. Quand il faudrait faire l'unanimité humaine contre l'injustice, la cupidité, l'égoïsme,
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contre la nature rebelle à nos besoins les plus légitimes, nous pensons seulement à nous intégrer, à réunir dans notre ambiance la totalité de ce que nous pouvons étreindre. Nous aimons pour nous, contre tous, au lieu d'aimer aussi pour les autres et, au besoin, contre nous. Et cette charité, cet amour, dont nous nous targuons, jette en nous les racines de la haine et de l'envie. Elle abandonne les sommets pour foncer dans les abîmes.
Pourquoi haïr les hommes ? Us sont peut-être dans l'erreur, ils ne sont pas l'erreur ; s'ils font le mal, ils ne sont pas le mal. Tout homme, quelle que soit son attitude, reste un esprit engangué dans la matière, l'un de nos frères. C'est l'erreur et le mal en soi qu'il faut détruire et détester, mais il faut aimer tous les hommes et même, sans pactiser avec eux et approuver leurs actes, les méchants. Car, parmi les méchants, plusieurs font le mal pour se procurer un bien éphémère, les autres parce qu'ils ont une fausse conception du Bien. La Charité consiste précisément à combattre les tendances mauvaises des uns, à éclairer les autres, pour conduire enfin la race dans la voie du vrai Bien et de l'unique Lumière.
Mais la Charité, pour nos âmes désaxées, est
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devenue un mortel poison. Loin d'être, en nos mains, l'essentiel instrument des bâtisseurs du temple, elle n'est plus qu'un ferment de discorde.
Nous voulons imposer aux autres notre façon d'aimer ou plutôt, nous voulons, sans réciprocité, qu'ils nous aiment nous-mêmes. Notre Charité s'est résolue en amour-propre. Lorsque nous prétendons aimer les hommes, c'est nous que nous aimons en eux, nous, toujours nous. Et la parole de l'apôtre, " aimez-vous les uns les autres ", n'est plus qu'un succédané de notre indéracinable égoïsme.
Or, la Charité n'est pas cela. Elle est juste, sans rigueur ; elle est miséricordieuse, sans faiblesse ; elle est équitable et par-dessus tout altruiste. Elle va jusqu'à l'abnégation et au sacrifice, elle dépasse de cent coudées la fraternité, car elle immole sur son autel, s'il le faut, tous les instincts, tous les désirs, toutes les satisfactions légitimes, en holocauste à la grande lumière d'amour, au Bien Suprême, qui existe pour tous et non pas pour un seul.
L'HUMILITÉ
L'humilité est rarement envisagée sous son aspect véritable. Pour la foule ce mot est synonyme d'abaissement volontaire, de repliement sur soi-même, il emporte avec lui une notion de défiance envers la personnalité humaine. L'homme pour être humble doit se résigner à perdre toute initiative dans ses actes et même dans ses pensées, se cacher dans le rayonnement d'autrui, par crainte de compromettre son salut éternel.
Ainsi conçue l'humilité n'est pas une vertu, c'est une tendance purement négative, une paresse du corps, de l'âme et de l'esprit, un refus perpétuel de la responsabilité, une espèce de timidité voulue et cultivée. Elle va à l'en-contre de son but essentiel : la conquête du royaume de Dieu ; car il est écrit : " Violenti rapiunt illud " ; on pénètre dans la béatitude par
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la violence, par l'effort soutenu. La parole du Christ confère à l'humilité une toute autre portée. Il s'est écrié un jour : " Je suis doux et humble de cœur " ; ce n'est pas le propre d'un Dieu de se réfugier dans la passivité. Il a voulu dire autre chose ; essayons de soulever le voile de l'humilité divine dont la nôtre est une image affaiblie.
Dieu dans son immensité est Un ; il s'attache à l'unité de son être avec la toute-puissance de sa nature intime. Cet attachement, c'est l'amour ; sans nul adjuvant extérieur, à lui seul il suffirait pour rendre tangible à l'Etre des êtres sa propre béatitude, car le bonheur est harmonie et l'amour est le repos dans l'harmonie. Cependant il a renoncé à ce bonheur interne et sans mélange pour créer à côté et en dehors de lui des esprits susceptibles de participer à sa béatitude. Ce renoncement, cette extériorisation de l'amour, cette face inattendue de la Charité, c'est la divine humilité. Dieu dans le secret inviolable de son essence est humble jusqu'à l'infini, car être humble c'est s'oublier soi-même pour penser aux autres.
L'humilité humaine peut-elle se comparer à cette transcendance ? Oui et non. L'homme aussi est infini par son être, car l'être ne com-
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porte pas une échelle d'existence, il est ou n'est pas. Mais l'homme est limité par sa forme ; son essence comporte donc un point mobile ignoré de Dieu. Par ce point il conçoit sa personnalité propre, par ce point sa conscience est un perpétuel devenir, une plénitude toujours poursuivie et jamais atteinte. Ainsi notre humilité, dans sa forme, est bien identique à celle de Dieu, mais ses incidences et son objet sont différents.
Par le concept du devenir, en effet, l'homme affirme son néant ; il ne peut, du reste, concevoir autre chose, car son intellect lui refuse la perception directe de son être, en dehors de ses potentialités successives. Il sent sa forme négative, sa limite, c'est-à-dire son individualité ; sa personne positive, son essence radicale est l'occasion d'un acte de foi, de foi en l'être, de foi en Dieu. Et l'humilité intervient comme contrepartie de la confiance ; c'est le détachement de la forme divisible, négative et périssable, l'adhésion à l'unité, au sein de laquelle la vie réelle s'épanouit, c'est la vision intuitive de la contingence humaine.
L'humilité n'est donc pas une vertu particulière, elle n'est cataloguée ni dans les vertus théologales ni dans les cardinales ; conséquence
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immédiate du tryptique : Foi-Espérance-Charité, un sous trois aspects comme Dieu lui-même, elle est simplement le sol dans lequel croissent et s'épanouissent toutes nos autres vertus, en raison directe de sa profondeur.
Sans l'oubli de soi, sans le renoncement à toutes les apparences trompeuses de l'individualité, aucune vertu n'est possible, et sans la vertu, notre être est en dissonance irrémédiable avec le monde des réalités.
L'humilité étend partout son domaine. Elle est douce, elle n'oppose jamais la colère et la haine aux contradictions et à l'injustice ; elle est longanime et supporte avec patience les vexations ; elle est désintéressée car elle reconnaît tous les mérites et s'emploie à les faire briller, même à son propre détriment ; elle est généreuse car elle se donne sans compter et au besoin se sacrifie ; elle confère à l'homme la suprême liberté car elle est forte dans l'adversité et méprise les contingences du néant matériel ; elle est tempérante et s'abstient de briguer les satisfactions éphémères de la vanité ; elle procure la paix et la sérénité dans le bonheur, car elle est la racine de la fleur d'amour, et l'amour porte en lui sa propre récompense ; elle s'élève, enfin, jusqu'à la sagesse et à la
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sainteté, manifestations de l'unité spirituelle au sein de la diversité intellectuelle et physique.
En un mot, elle est l'harmonie des facultés humaines ; liée à leur vertu spécifique, fondue dans leur substance, elle en constitue le métal basique, mais elle est aussi la main qui fait vibrer les sept cordes de la lyre animique au rythme de l'éternité. Elle émane de la charité et s'oppose à l'orgueil, cette fleur vénéneuse de l'égoïsme. L'orgueil, en effet, prend, absorbe, se gonfle désespérément de toutes les ambiances et l'humilité se donne ; l'un rapporte tout à soi, l'autre rapporte tout à Dieu.
Si l'humilité est, en Dieu, la source du Bien, de la Bonté et de la Miséricorde, elle est, en l'homme, la matrice où germe la vie spirituelle ; elle est amour, abnégation, dévouement, elle est modestie et courage, elle est un manteau contre l'orage des instincts, des passions et des convoitises, elle est le sceau de la prédestination, car elle est la forme, la distinction prise par la Charité et les autres vertus qui en découlent pour nous conduire à l'infini et à la béatitude.
Soyons doux et humble de cœur comme le sublime Nazaréen.
LA FOI, FACULTÉ SPIRITUELLE
La Foi n'est pas seulement une vertu théologale, une certitude intellectuelle et morale d'ordre spéculatif. C'est aussi une lumière vivante qui s'incorpore, en quelque sorte, à la volonté, et devient une puissance spirituelle, un dynamisme effectif dont les potentialités s'actualisent et se répercutent en tous nos actes. Elle est une réalisation continue de l'expérience humaine.
Cette foi dynamique est le levier des Ecritures et le point d'appui d'Archimède. Appliquée dans l'axe des lois naturelles, elle peut les déclencher brusquement, renforcer leur action ou en détourner le cours pour introduire dans le cycle normal de la création visible les lois supérieures du monde invisible. Elle peut guérir les maladies, illuminer les intelligences, fortifier les volontés, anéantir les obstacles,
LA FOI, FACULTÉ SPIRITUELLE If
accomplir des miracles. Mais c'est là le moindre côté de sa puissance réalisatrice. Elle est à l'origine même de notre conscience, elle nous donne la certitude absolue de notre réalité, elle est la racine et le principe du " Cogito " de Descartes. Elle nous confirme donc dans une sécurité morale, intellectuelle et physique dont nos cogitations et nos actes subséquents sont l'épreuve et la conséquence immédiate. Les assises du jugement par lequel notre personnalité prend sa valeur, engage ses responsabilités, s'élève ou s'abaisse à un certain niveau, sont fonction de son dynamisme propre. En chaque homme la foi peut devenir un " Fiat " créateur susceptible de le projeter vers le plan divin et de le rendre co-participant des attributs de Dieu. Car, non contente d'une auto-création interne de la conscience, elle est le support et l'aiguillon de la liberté dont la volonté est l'organe ; elle en assure le développement et l'usage dans le cadre de notre être, mais en reportant toujours plus loin la limite de ses possibilités. Monade essentiellement expansive, elle s'irradie, en effet, dans le néant pour y susciter une création analogue à celle qu'elle a réalisée en nous ; elle est le Même en gestation de l'Autre.
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Ainsi, la foi n'est pas une croyance timide sans cesse ébranlée par les événements extérieurs, toujours en quête d'une consolidation problématique. C'est une conscience absolue des possibilités intérieures de notre être et de leurs réactions victorieuses. C'est une possession anticipée du futur, l'enclume sur laquelle nous forgeons durement notre devenir, car l'homme, malgré les contingences individuelles ou collectives, est l'artisan de son propre destin ; il le fait grand, mesquin ou misérable, au rythme de la foi dont il est animé.
Dans son unicité substantielle, la foi revêt un triple aspect : foi en Dieu, foi en soi-même, foi en la destinée. Si nous perdons la première, nous perdons aussi les autres, car Dieu est le pivot de l'Univers, et il est encore une fin. Si l'aspect divin disparaît de nos facultés, il n'y a plus de support ni de fin adéquats à notre essence intime. Aucun raisonnement, aucune pensée, aucun geste ne pourront nous mettre en présence d'un avenir suffisant pour nos aspirations. Nous serons ballottés d'une rive à l'autre du fleuve vital prêts à sombrer dans le gouffre des contingences.
Or la foi ne naît pas dans la dispersion ani-mique et intellectuelle, elle repose sur l'unicité
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spirituelle. Un homme, un peuple divisé contre lui-même, réfractaire à l'unité, périra dans la désagrégation de ses éléments. Au contraire, rendu cohésif par l'unification de ses parties constitutives, il vivra dans le temps et l'espace, car il est confirmé dans la sécurité intérieure, contre laquelle les discordes extérieures restent impuissantes.
Mettez deux hommes aux prises, dans la lutte pour la vie, le triomphe appartiendra au détenteur de la foi la plus énergique et la mieux actualisée. Il est, en effet, le mieux adapté à la fin réelle de la race humaine, car cette adaptation résulte de la foi, partie intégrante et centre de son moi.
La foi véritable est peu commune, les hommes s'en détournent, ils préfèrent la facilité des volontés chancelantes, le doute à la certitude et l'emprise passionnelle à la pureté du cœur.
LA FOI, CONFIANCE EN LA VÉRACITÉ DE DIEU
L'homme, circonscrit par son corps, se désespère de sa limite comme de sa diversité et il s'affronte avec l'infini et l'absolu, pour se donner à lui-même une explication de son existence transitoire, pour se donner, sinon la certitude, du moins l'illusion d'avoir une base impérissable. Du jour où la lumière a pris un sens pour lui, du jour où sa conscience s'est éveillée, il est envahi par la crainte incoercible de voir le rideau, un instant relevé, retomber à jamais sur le champ de sa vision. Il échafaude pensée sur pensée, désir sur désir, acte sur acte pour se soustraire à l'emprise de la mort totale. Comme les Titans jadis, il veut escalader le ciel et se loger hors du temps et de l'espace, dans la béatitude éternelle.
Comment espérer ce résultat ? Placer son
LA FOI, CONFIANCE EN LA VÉRACITÉ DE DIEU 31
espérance dans la pérennité de la race, revivre en ses enfants, proclamer l'éternité des lois naturelles et les retours cycliques, dont les individus sont les chaînons fugitifs, n'abolit pas le frisson devant la porte brusquement ouverte sur l'au-delà du temps. Dire : entre l'homme et l'absolu, il n'y a pas de commune mesure, la marée des phénomènes est une résultante dont nous sommes le support et à la mort tout se dissipe d'un côté pour renaître de l'autre, une telle conception n'apporte aucun repos, sinon à la surface de notre esprit, troublé dans ses profondeurs. Et la vie se déroule dans une perpétuelle angoisse, l'angoisse du devenir. A quoi bon douter ou nier, si l'angoisse persiste et s'accroît. Il faut croire, affirmer et proférer cette vérité surhumaine : l'individu conscient est un absolu en instance d'évolution, une essence toujours identique à elle-même, sur une route infinie dont elle ne peut atteindre le terme. Or, une seule chose peut nous conduire en dehors de la voie douloureuse, émousser l'aiguillon de la mort, la Foi : la foi du charbonnier, pour le commun des mortels enlisés dans les nécessités de l'existence ; la foi rationnelle, pour qui sait extraire de la diversité phénoménale l'essentiel rapport du contingent à l'absolu.
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La Foi, sous toutes ses formes, s'écrie avec le Psalmiste : " De profanais clamavi ad te Dominé". Du sein de l'abîme, elle s'élance comme un jet de lumière vers la voûte céleste, emportant la plainte de la créature maléficiée, pour la changer en chant d'allégresse. Les sables mouvants de la matière voudraient l'engloutir, elle s'arrache à leur succion, pour s'installer sur le roc inébranlable de la parole divine. Car la foi, c'est la confiance accordée à la véracité de Dieu. " Vides mia ", la foi est une, dit l'apôtre Paul. La confiance, en effet, se donne tout entière et sans atermoiement, on ne la mesure pas selon la norme humaine ; elle ne comporte ni le plus ni le moins, elle est ou n'est pas. Multipliez les articles des credos, vous n'augmentez pas la foi ; réduisez-les à l'unité, elle ne subit aucune diminution. La foi est infinie comme son objet, infinie aussi, parce que l'homme, limité dans sa nature, est infini lui-même, sans en avoir conscience, dans son essence spirituelle, puisqu'il participe à la totalité de la vie, à la totalité de l'être, à jamais indivisible.
Si la Foi est confiance en la véracité de Dieu, celle-ci est personnifiée dans le Logos. Par la foi, nous nous attachons donc au Verbe divin,
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considéré comme l'expression de l'unique vérité, de la réalité absolue, source des réalités relatives. Nous renonçons ainsi à nous appuyer sur notre lumière humaine pour nous accrocher à la lumière divine. Donner notre confiance à Dieu, c'est multiplier notre confiance en nous, reconnaître le support infrangible de notre individualité fuyante. Alors notre angoisse n'est plus l'aiguillon du désespoir, elle fait place au repos et notre doute à la certitude. La foi n'est pas aveugle, c'est la claire vision de la vérité, c'est l'œil de notre entendement ouvert sur un principe indiscernable à nos sens, étranger à nos analyses quantitatives.
La foi, c'est le secours de la sagesse ; la science est le pas infantile de l'intelligence dans les méandres de la matière. Science et foi ont un but précis, sûr, nécessaire à notre évolution humaine, mais sur des plans différents. Elles ne se contredisent pas, ce sont deux attitudes de notre raison en présence de l'être et de ses modalités ; parallèles, elles se confondront hors du temps et de l'espace, lorsque le voile phénoménal aura fait place à l'essentielle réalité : la vie dans son intime substance. La première peut se conquérir par des efforts continus, la seconde est un don gratuit, ou, plutôt, une
forme intellectuelle innée dont il faut prendre conscience avec une acuité croissante. C'est pourquoi nous disons: " Adauge nobis fidem ", Seigneur augmentez la conscience de notre foi.
LA PRIÈRE
La vraie, la seule, la sainte magie, c'est la Prière. La magie cérémonielle met, trop souvent, la volonté au service de l'orgueil. La prière, au contraire, est une aspiration très humble du fini vers l'Infini. L'orant ressemble au désert qui veut être une prairie en fleurs. Il n'exige pas, il supplie.
Mais le commun des hommes ignore tout de la prière. Pour l'écrasante majorité, prier c'est prononcer des lèvres, et quelquefois de cœur, des paroles dont l'ardeur correspond à la violence des désirs, s'incliner dans un temple ou dans un oratoire pour solliciter, d'un Dieu anthropomorphe à souhait, des présents' gratuits uniquement matériels : la santé, la richesse, le succès ou l'amour. Nous prions maintenant comme autrefois les Juifs désireux de troquer la manne contre des oignons d'Egypte.
MÉDITATIONS INITIATIQUES
Certes, la prière pour les biens de ce monde est licite. S'adresser au Père miséricordieux, pour lui demander de parer à notre misère physique, est un hommage à sa Toute-Puissance. Mais nous oublions trop souvent la parole évangélique : " Cherchez d'abord le royaume de Dieu et sa Justice et le reste vous sera donné par surcroît ".
La prière ne doit pas seulement tendre à briser le cercle infernal du Destin, elle est plus haute encore et plus noble. C'est une élévation surhumaine vers la splendeur divine, aussi un agenouillement ; c'est l'extase indicible devant l'Ineffable Charité.
Pour prier ainsi, il faut faire le silence en soi-même. Rejeter toutes les pensées mauvaises ou simplement discordantes. Il faut mettre la sensibilité, l'intelligence et la raison au diapason de l'esprit, se transposer en mode négatif pour permettre au positif divin de se réaliser en nous. Il faut chasser l'indifférence et la froideur, faire de son être un holocauste et lancer, au-dessus de l'égoïsme humain, l'appel prodigieux de l'amour.
Alors, la voie de la Béatitude s'ouvre dans sa sublimité. Deux courants se projettent l'un
vers l'autre. Le premier, ascendant, engloutit l'homme dans le sein de Dieu ; le second, comme un fleuve céleste, descend sur la terre pour féconder l'âme en gestation d'éternité. Et l'être fini, ce néant, perdu dans l'océan de l'Etre sans limite et sans lieu, l'être fini est porté jusqu'aux confins de l'Absolu. La mystérieuse opération par laquelle, jadis, le fils de Dieu devint le fils de l'homme se répète en sens inverse. Toute distance est abolie. La nature humaine transfigurée, dans une étreinte incompréhensible, embrasse la volonté de Dieu, sa justice et sa miséricorde.
Lorsque la prière arrive sur ces cimes, combien les choses terrestres paraissent négligeables ! La parole du Chrysostome resplendit dans sa rigueur : Vanité des vanités, tout est vanité ! La richesse ! Vanité. Les honneurs ! Vanité. La puissance humaine ! Vanité des vanités. Tout s'évanouit sous le souffle embrasé du Paraclet ; il n'y a plus rien, sinon l'immense fournaise vivante de l'amour :
Fons vivus, Ignis, Chantas.
Les saints seuls peuvent-ils s'abîmer dans cet élan mystique, voisin de la Béatitude ? Tout homme de bonne volonté est capable d'y par-
venir, si la paix est avec lui. Car toute prière est sainte quand elle repose sur la foi et l'espérance, même mesurées selon la norme humaine. Malgré la stérilité et l'inefficacité apparentes, ne vous découragez pas, vous, les humbles de cœur et les pauvres en esprit. Si vous demandez des grâces temporelles, ne vous étonnez pas de ne rien recevoir. Le royaume du Christ n'est pas de ce monde, et vos désirs sont peu de chose, comparés au don éternel qui, à votre insu, vous est accordé.
Priez donc, dans les hauteurs de l'extase, pour vous-même et pour les autres ; mais priez surtout pour les autres, en vous remémorant la dernière vision de Denys FAréopagite. La veille de son supplice, il pensait dans son cachot au salut de l'humanité. Jésus vint à lui pour le réconforter et lui dit : " Si vous priez pour autrui, vous serez entendu ". Or, si Dieu rend au centuple la moindre aumône faite au pauvre en son nom, comment payera-t-il le fruit de vos prières ? Par sa Gloire.
PETITESSE ET GRANDEUR DE L'HOMME
" Par l'espace, l'univers me comprend et m'engloutit ; par la pensée, je le comprends ".
Ainsi s'exprime Pascal. Comparons le double sens, clairement indiqué, du verbe comprendre.
Le vaste monde est un être vivant dont les limites sont, pour nous, inconcevables. Les systèmes solaires sont les organes de cet être démesuré. Chacun d'eux manifeste un aspect spécial de la vie universelle, une fonction majeure de l'être cosmique. Il puise en celui-ci son propre dynamisme, mais, par un juste retour, il l'entretient, le multiplie et favorise son épanouissement total, car l'organe est solidaire de l'âme dont il est l'instrument, il vit en elle comme elle vit par lui. Or, nous les hommes, nous sommes d'imperceptibles cellules de l'organe représenté par notre soleil, cellules dont l'autonomie, pour la science expé-
40 MEDITATIONS INITIATIQUES
rimentale pure, est toute subjective. Nous sommes un minuscule contenu dans un immense contenant, un point perdu dans la masse qui semble nous écraser. Entre le néant et nous, il n'y a presque rien.
Et pourtant ce rien est infini : c'est l'être et la vie, c'est la pensée, c'est l'amour, les trois formes de notre conscience indivisible. Par l'être-vie nous sommes évidemment, aux yeux de l'expérience, des cirons en face de l'incommensurable nature, mais, par la pensée, nous la débordons de toute part et par l'amour, nous lui sommes transcendants.
un
En face de notre pensée, le monde n'est plus i sujet, il devient un objet, l'objet de notre connaissance. Nous le comprenons, nous le saisissons dans les replis de notre intellect, nous l'incorporons en quelque sorte dans notre moi, selon la formule de Berkeley : ce n'est pas l'âme qui est dans le monde, mais le monde qui est dans l'âme, et de ce chef, de contenu nous devenons contenant. Sans doute, le philosophe anglais attachait à sa phrase une signification spéciale, mais elle n'en est pas moins lumineuse. Sans doute, nous ne contenons pas le monde comme un vase contient un liquide, car il s'agit d'une emprise intellectuelle dont le
PETITESSE ET GRANDEUR DE L* HOMME 4Î
résultat provoque un contact de notre conscience avec le réel et déclenche en celle-ci une puissance capable de dominer le réel manifesté par le monde phénoménal. Notre intelligence, en effet, est l'œil de notre esprit qu'elle éclaire et met à même de réagir efficacement sur l'ensemble du Cosmos, comme celui-ci réagit sur nos éléments physiques. A l'intérieur de notre moi, nous sommes donc des constructeurs et nous édifions un monde à notre usage, régi par notre loi constitutive. Cette dernière, certes, n'est pas identique à la loi organique de l'être cosmique, mais elle lui est analogue et par elle nous comprenons dans sa source, dans ses effets et ses possibilités, c'est-à-dire, dans son éternelle action, l'ensemble de l'univers.
En d'autres termes, nous outrepassons les données expérimentales et nous construisons un monde extérieur avec le reflet du réel, associé à notre conscience intime, et ce monde est destiné à combler le vide situé entre nous et la réalité, entre celle-ci et Dieu, car il repose sur l'éternité des lois issues directement du Créateur.
Si le monde nous domine, puisque nous sommes une infime cellule de son immensité,
42 MÉDITATIONS INITIATIQUES
s'il s'offre à nous comme une matière de notre pensée et nous permet de la réaliser, nous le dominons de plus haut par notre pouvoir de connaissance et d'utilisation, car il ne serait rien sans nous, sinon une vaine fantasmagorie, inutile parole articulée dans un désert, sans un écho pour la réfléchir et lui donner un sens. Chacun de nous possède une certaine initiative dans le concert phénoménal et cette initiative est la voie d'une initiation susceptible de nous révéler notre liberté spirituelle.
Mais la science est un simple rapprochement idéal, un pont jeté entre le connu et l'inconnu, elle ne détruit pas l'isolement entre les êtres capables de dire " je ou moi ". Au contraire, la conscience de notre liberté spirituelle au sein du monde extérieur nous permet de gravir l'ultime échelon et de parvenir à l'amour. L'amour est un sentiment, mais c'est aussi un acte, l'acte par lequel s'engendre l'union et se révèle l'unité. Par l'amour, l'homme résorbe l'abîme creusé par l'égoïsme entre lui et sa race, il actualise l'unité eschatologique du Cosmos, il s'identifie à Dieu lui-même, dans la limite de sa personnalité. Par l'amour il domine la contingence du Grand Tout, car il s'évade de l'irrémédiable déterminisme spatial et tem-
PETITËSSE ET GRANDEUR DE L'HOMME 4J
porel. L'amour est la mesure de la grandeur humaine.
Suivant la sublimation de notre pensée, le monde sera petit et mesquin, laid et difforme, lieu de souffrances et d'écrasement, ou bien ce monde s^ra grand, beau, joyeux et paraphrasera la parole de l'Ecriture : " Coeli enarrant gloriam dei ", les cieux chantent la gloire de Dieu. Suivant la faiblesse ou la force de notre amour, nous serons solitaires dans le monde et perdus dans son immensité, ou bien nous le considérerons comme un moyen de communier, par son intermédiaire, avec Dieu, ce Dieu dont nous sommes les collaborateurs et les émules, si notre verbe personnel s'applique sans cesse à rechercher une plus grande approximation du verbe divin.
LA MISSION DE LA DOULEUR
Les membres d'une même famille sont solidaires du bien ou du mal réalisé par chacun d'eux. Il en est ainsi chez une tribu, au sein d'une nation et dans l'humanité tout entière. La répercussion d'un seul acte pèse sur l'ensemble de la collectivité. Telle est la loi qui lie les hommes.
Lorsque le bien l'emporte sur le mal, l'harmonie et la paix régnent dans la société, lorsque le mal est en surcroît, c'est le désordre et c'est la guerre. Le Bien, en effet, est un ferment d'union et d'euphorie ; le mal, au contraire, introduit la division, non seulement dans l'individu lui-même, mais encore entre les individus et les peuples. Or, selon la parole évangélique, toute maison divisée contre elle doit périr ; c'est pourquoi la division est la source de toute douleur et c'est pourquoi la souffrance est dissolvante.
Si le bien n'est pas supérieur au mal, la douleur se déclenche automatiquement pour rétablir l'équilibre, car elle est un rachat, la monnaie par laquelle se résorbe le déficit de la balance spirituelle. Mais, dans ce retour à l'ordre et à l'harmonie, les individus souvent sont broyés suivant l'axiome, à première vue inhumain : " Oportet unum pro omnibus tnori ", un seul doit mourir pour tous. L'innocent parfois souffre et meurt, d'où le doute atroce de certains penseurs sur la justice et la miséricorde de Dieu. Dans leur désarroi, ils le comparent au Moloch insatiable de Tyr et de Sidon, au Minotaure repu de la chair des vierges. Ces hommes méditent en surface, la profondeur des idées leur est inconnue.
L'homme, à sa naissance, dans son âme et son corps, reflète l'indéfinie divisibilité de la matière. Son unité est factice, elle résulte d'un amalgame d'éléments irréductibles les uns aux autres. Pétri dans la diversité, il porte en lui-même le germe du mal et ne pourra se hausser vers le bien sans opérer la sublimation de ses éléments constitutifs. La plupart des individus sont incapables de comprendre et de réaliser cette ascèse, car ils suivent leur propension naturelle au lieu de réagir. Le mal monte donc inlassablement, jusqu'au jour où la balance de
46 MÉDITATIONS INITIATIQUES
la justice est totalement faussée. La souffrance, tel l'ange exterminateur, apparaît alors sous la forme la plus apte à combler la somme des défaillances. Mais l'ange de la douleur peut nous paraître aveugle, il ne discrimine pas ses victimes selon les lois de nos piètres contingences. La balance s'équilibre par un choix dont la clef nous échappe.
L'homme est libre de choisir sa voie et Dieu n'intervient pas dans l'accomplissement du mal. Il n'a pas à intervenir dans la répression, il laisse la loi s'accomplir : " ILelinquit mundutn disputationibus eorum ". Seule la norme vitale est le dieu de la vengeance, dieu abstrait, anonyme, inexorable comme l'antique Némésis. Il faut payer, un pour tous, tous pour un. La justice est un rouleau de fer, elle ne laisse subsister aucune aspérité sur son passage. Comme l'iniquité s'est répandue, la douleur s'épanche dans le sein des individus, au milieu des peuples, nul ne peut s'y soustraire, fût-il innocent, tant la solidarité est rigoureuse.
Sans doute, pour notre petit raisonnement humain, l'innocence devrait être un bouclier contre la souffrance. La logique de la vie est différente de la logique des hommes. Un indi-
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LA MISSION DE LA DOULEUR
vidu paye pour un autre, la dette est éteinte et la justice immanente est satisfaite. Dans notre ignorance des lois transcendantales, nous les accusons de jouer à tort, et nous ne savons rien ou pas grand chose de la réversibilité. Du reste, quelle compensation sera donnée au libérateur, volontaire ou involontaire, du coupable ? Ici encore, l'obscurité nous envahit. Ne nous obstinons pas à comparer la justice et l'équité, ne nous cantonnons pas sur le seul plan accessible à nos sens. L'innocent, pour nous injustement frappé, est, sans nul doute, un nouveau Christ, un rédempteur méconnu dont le nom flamboie parmi les cohortes célestes. Non seulement il rachète de sa souffrance le démérite occasionné par le mal auquel il fut étranger, mais il réalise pour son propre compte une balance positive dans la voie du bien. D'une part, il manifeste la solidarité, de l'autre, il résorbe le vice originel de sa naissance. Sa douleur n'est donc pas une entorse à la justice, c'est une conséquence de son humanité.
Penchons-nous sur tous les êtres douloureux, efforçons-nous de les soulager dans la mesure de nos moyens, mais n'incriminons pas Dieu de leur souffrance, il n'a rien à voir avec
elle. Il ne l'a pas voulue et il ne peut rien pour la soulager sans notre concours ou celui de nos frères humains. Elle est inhérente à notre existence spatiale et temporelle, dont seuls nous sommes responsables, malgré les apparences contraires. Sa mission est sacrée ; elle est un feu purificateur, de gré ou de force nous devons le subir pour restituer notre nature essentielle à sa fin primitive.
PRÉDESTINÉS
Tous les êtres d'une même espèce sont constitués sur un seul archétype, avec une essence, des qualités et des modalités exactement semblables.
Ainsi, tous les hommes ont un esprit, une âme et un corps identiques dans leur substance particulière et leurs potentialités. Ils sont donc tous appelés à la même fin. D'où vient le petit nombre des élus ? Parce que la réalisation de leurs possibilités suit des voies divergentes, désirées et voulues délibérément par chaque individu. Chacun de nous, en effet, participe, qu'on l'admette ou non, à la divine lumière du libre arbitre. Tous les hommes sont bien semblables dans leur unité essentielle et primordiale, — racine de l'égalité, — mais ils deviennent ce qu'ils se font eux-mêmes par l'emploi de leurs puissances de réalisations
MEDITATIONS INITIATIQUES
respectives. Celles-ci sont sous l'action du centre volitif ; il les dirige selon des vues écloses sous le régime de la liberté inviolable ; d'où la diversité sociale, intellectuelle et spirituelle, d'où le bien (accord avec la norme, harmonie avec le plan de la création) et le mal (désaccord avec la loi, desharmonisation évolutive).
Or, pour Dieu, tous les siècles des siècles sont comme un jour et réciproquement. Du sein de l'éternité, d'où la succession est exclue, il voit donc intuitivement, comme d'un seul coup d'oeil, l'ensemble de la création et son évolution depuis le commencement jusqu'à la fin. Tout le problème de la prédestination, si souvent évoqué sans être résolu, est réglé par cette vision divine. Dès l'origine, Dieu voit la naissance, la vie entière et la mort de chaque homme, sa perdition ou son salut. Il peut dire, comme le musulman fataliste (ce n'est point un blasphème, mais une adoration) : " Mek-toub ", c'était écrit. Il ne prédestine pas les uns au bonheur, les autres au malheur, sa grâce sanctifiante et efficace plane sur tous et ils peuvent la capter dans une même mesure. Il ne peut l'imposer ni ne veut la refuser à quiconque, il se doit de respecter la liberté d'action
PRÉDESTINÉS 51
de sa créature et il voit les coopérateurs et les dissidents. Il sait donc de toute éternité quels êtres émanés de lui réintégreront le monde divin de l'Unité ou se perdront irrévocablement dans la douleur de la dispersion. Ainsi, il n'y a point de prédestinés, de créatures privilégiées créées pour la béatitude éternelle à l'exclusion des autres. Il y a pour tous la même chance et le même risque, tout dépend pour chacun de l'usage de sa propre liberté.
MORS ET VITA
Au moment de sa naissance, une créature humaine est dotée à peine d'un vague instinct animal. Tout, pour elle, se résume en des sensations de bien-être ou de souffrance. Si elle est satisfaite, elle sourit ; à la moindre atteinte du mal, elle pleure et se lamente. Le monde extérieur ne vient à elle qu'à travers un brouillard au sein duquel tout est confondu dans un ensemble sans relief.
Puis, un jour, un rayon de soleil ; un voile se soulève, les individus se détachent sur le fond de brume, la conscience sort de sa gangue et devient une réalité. L'enfant se distingue de son ambiance, il commence à vibrer avec son entourage immédiat, c'est un homme en voie d'évolution. Il grandit peu à peu et son horizon s'élargit. Il prend contact avec son milieu, de spectateur il devient acteur. Il emmagasine de
l'expérience, celle du moment présent et, par l'histoire, celle des siècles révolus. Or, cette dernière, qu'on peut croire morte ou tout au moins cristallisée, porte en elle-même un ferment d'immortalité, c'est le germe de l'avenir. A l'aurore de sa vie, grisé par ce subtil nectar, l'homme se tourne donc vers le futur. L'horizon imprécis, paré de toute la beauté du devenir en gestation, lui apparaît comme un champ indéfini de lumière, ponctué par des sensations nouvelles. Le soleil marche vers le Zénith, le temps rapide fuit encore lentement, le passé individuel est si proche !
Mais la vie s'écoule au rythme du temps mathématique ; l'adolescence et la jeunesse font place à l'âge mûr. Les obstacles se multiplient avec les déboires. L'horizon lointain se rétrécit et devient un cachot où l'homme est en proie aux affres de l'asphyxie. Le temps accélère sa marche, il fuit maintenant avec une rapidité vertigineuse, suivant la cadence psychologique, et l'angoisse indicible pénètre l'âme humaine avec la pensée de la mort inévitable et chaque jour escomptée.
e ver rongeur est dans le fruit, il l'épuisera jusqu'à l'écorce si rien ne vient interrompre son travail de destruction. Quelle désillusion
pour la majorité des hommes. Eh quoi ! la vie, ce dynamisme toujours tendu vers l'action, peut donc faire place à l'écroulement passif de la mort ? La nuit totale va succéder à la lumière ardente. La fin ! ne plus voir, ne plus entendre, ne plus penser, ne plus bouger. Le silence et l'ombre ; le silence sans possibilité d'écho, l'ombre sans espoir d'une lumière nouvelle, l'immobilité absolue du tombeau, le Néant ! L'homme sur le déclin, le vieillard, a reçu dans sa main déjà tremblante, le calice d'amertume ; l'enivrante ambroisie a fait place au fiel du Golgotha. Le spectre de la mort est là, prêt à le happer en ses griffes de rapace nocturne.
Pourquoi trembles-tu, ignorant et craintif ? Pourquoi t'obstiner à contempler le monde extérieur, à suivre l'illusoire évolution des séries phénoménales à travers l'espace et le temps ? Descends en toi-même, ouvre les yeux de ton esprit au soleil invisible dont notre soleil n'est qu'une image déformée. Une foi inébranlable, étayée d'une immense espérance, t'illuminera soudain au sein de l'universelle charité. Et la mort ne sera plus pour toi qu'un tunnel obscur, un passage pénible et court au bout duquel s'ouvre l'immuable horizon de l'Eternité.
PLUS UN ADEPTE S'ÈLÈVË...
Plus un adepte s'élève dans la science sacrée, plus il s'approche de la Lumière, moins son individualité humaine tient de place. Sa conscience ordinaire, celle qui en fait une unité parmi les hommes, s'estompe ; elle est dominée par une conscience plus haute, de nature toute spirituelle. Le masque hominal disparaît devant une entité supérieure. Celle-ci ne se distingue plus par une forme particulière, par des besoins ou des instincts, mais par ses idées, c'est-à-dire, par son contenu qualitatif et par son mode d'action.
Les êtres en possession de leur conscience spirituelle, tels les êtres matériels groupés selon leurs affinités spéciales, se rassemblent sur un plan déterminé par leurs tendances et forment des Fraternités. En ces fraternités, chacun
56 MÉDITATIONS INITIATIQUES
d'eux serait indiscernable par rapport aux autres, s'il n'était caractérisé par une potentialité personnelle. Ils forment donc des entités distinctes, au sein d'une harmonie dont les dissonances, fondues en un motif unique, constituent, en quelque sorte, vis-à-vis de l'absolu, un coefficient spécial d'absorption, de résonance et de rayonnement.
A ce stade, les entités spirituelles se sont évadées de l'égoïsme primitif. Elles ont outrepassé le cycle purement matériel et le cycle intellectuel, pour s'établir sur le plan mitoyen qui fait communiquer le monde visible avec son Créateur. Reliées d'un côté à l'humanité et de l'autre à Dieu, elles reçoivent une mission apostolique et médiatrice, celle de conduire la masse vers sa fin dernière, par la Gnose conjuguée avec la Charité.
F
Elles sont, en effet, parvenues à cette étape sublime de la Mystique : la déification de FAréo-agite, c'est-à-dire la Sainteté. La sainteté est aboutissement nécessaire de l'initiation et de l'illuminisme.
La plupart des hommes font de «sainteté» un synonyme d'ascétisme corporel. C'est une erreur. L'ascétisme spirituel est le plus haut degré de
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PLUS UN ADEPTE S'ÉLÈVE...
la sainteté ; il implique, avant toute chose, la splendeur de la pensée, sans aucun mépris pour les splendeurs de la matière. Au contraire, il élève et purifie celles-ci, car il voit en elles le reflet de la Splendeur Divine...
NE JUDICES...
En ce temps-là, Jésus de Nazareth prêchait dans le Temple, et.il dit : " Le Père ne juge personne, mais il a remis tout jugement au Fils ". (Jean, V, 22). Aucun de ses auditeurs ne comprit cette parole.
Pour la saisir dans toute son ampleur, il faut aller au fond des choses. Tout jugement s'énonce par un verbe, et le Fils est le Verbe de Dieu ; voilà pourquoi il juge, à l'exclusion de tous autres. Or, les pensées de Dieu sont vraies, car elles sont l'expression de son être manifesté. Le Verbe de Dieu est donc la Vérité et il juge uniquement selon la vérité, la justice et l'équité.
L'homme aussi veut juger, il est, à sa manière, un verbe. Miroir contingent dans lequel se reflète le Logos incréé, il possède, en effet, une certaine puissance de jugement. Mais celle-
NE JUDICËS 59
ci est viciée dans sa base ; miroir humain, elle accueille surtout les illusions des sens et les erreurs de la matière. Aussi, notre jugement, loin de reposer sur une certitude véridique, enregistre d'abord les impressions fugitives dont nous sommes le jouet. Ces impressions elles-mêmes sont encore déformées par notre égoïsme, nos instincts et nos désirs du moment ; de ce fait, nos appréciations sont, la plupart du temps, entachées de partialité.
Prenons garde à nos jugements ; avant de les énoncer, soumettons-les toujours à la loi de charité qui procède du Père et du Fils. Hélas ! comme nous l'oublions, cette loi essentielle ! Si, parfois, notre verbe s'emploie à proclamer la vérité, dans la circonspection inhérente à notre faiblesse, trop souvent nous l'utilisons, avec autorité, dans la voie décevante du jugement téméraire. Pourtant, Jésus nous avertit : " On vous mesurera, dit-il, avec la mesure dont vous vous serez servi, et on ajoutera pour vous ". (Marc, IV, 24). C'est-à-dire, si vous jugez avec mansuétude, on vous jugera avec miséricorde et avec réserve ; mais si vous jugez dans la précipitation, sans vous préoccuper de vos erreurs humaines, vous serez accablé à
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cent pour un, selon la règle matérielle de la justice distributive.
Pourquoi voulons-nous toujours juger nos frères suivant les idées du jour, nos conceptions particulières et notre intérêt personnel ? Le Fils, lui, peut juger, le Père lui a donné la mesure de la vérité. Mais nous, les fils prodigues de l'éternelle sagesse, dans un mouvement d'orgueil, nous nous substituons à elle, pour porter des jugements irréformables, dans les ténèbres de notre intelligence. Nous nous exposons ainsi à voir notre ignorance nous être imputée comme un crime de lèse-vérité, sinon dès ici-bas, du moins le jour où les âmes seront pesées dans la balance de la Justice.
Avant de juger les actes de notre frère, descendons en nous-mêmes. Comment ferions-nous à sa place ? Plus mal encore, sans doute. Pourquoi dès lors, l'abreuver de nos dédains ou le mettre, par nos paroles, au ban de l'opinion ? Notre voie est-elle bonne et la sienne mauvaise ? Dieu le sait. Son intelligence, peut-être, et son cœur tourné vers d'autres horizons, lui font concevoir le bien et le mal, sous une forme inconnue de nous, au moment où nous nous hâtons de le condamner. C'est pourquoi, s'il est des cas où la loi universelle ouvertement
NE JUDICES
violée, la vérité bafouée et la justice abolie, il faut dénoncer l'erreur et arracher les armes des mains criminelles, évitons d'ériger notre conscience en tribunal souverain.
La charité est-elle complice du mal lorsqu'elle nous porte à suspendre nos jugements ? Non, sous le voile dont elle recouvre les fautes d'autrui, elle infuse le levain de la régénération. Le Christ nous a montré la voie, il est venu confirmer les justes et sauver les pécheurs. Si notre frère a tort, le juste juge, un jour, nous départagera, car le jugement comme la vengeance lui appartiennent.
Et la miséricorde, lors de la reddition des comptes, viendra équilibrer le poids de nos erreurs et de nos fautes. Ne judices et non judicaberis.
MOÏSE, ENLEVE TA CHAUSSURE...
" Moïse, enlève ta chaussure, car ce lieu est sacré ".
Ainsi parla Iaveh dans le buisson d'Horeb, quand le Prophète, exilé de la terre d'Egypte, s'en vint au désert, chercher la voie du peuple élu.
Hommes, si vous voulez franchir le seuil du temple de la Sagesse, pour conquérir votre personnalité véritable, et vous élever jusqu'à Dieu, vous aussi, enlevez votre chaussure.
Laissez-la dans l'atrium, de peur de troubler les échos de la divine Parole et de souiller le pavé du sanctuaire avec la boue des chemins.
Déposez, en entrant, le fardeau de vos soucis profanes, de vos désirs charnels et égoïstes, de vos pensées humaines.
Entrez, vêtus seulement de la tunique de la foi ; jetez sur vos épaules le manteau de l'humilité ; tendez vos cœurs vers l'espérance et le feu vivant de la charité viendra vous enrober de son tissu subtil et impollué.
Agenouillez-vous à l'orée infranchissable du Saint des Saints et courbez le front pour recevoir la lumière intérieure, dont le buisson ardent n'était que le symbole.
Alors, la vision des suprêmes Réalités se déroulera devant vos yeux. Regardez et écoutez:
La Vérité est une, éternelle, infinie, hors de notre atteinte dans sa totalité actualisée. Soyez donc tolérant et respectueux de l'opinion d'autrui.
La Liberté ne consiste pas à faire ou à ne as faire, elle réside dans la conformité avec es voies de Dieu. Ne jugez plus témérairement
les actes de votre prochain selon la norme
humaine. ■ - ■
L'Egalité n'est pas ce mètre uniforme qui nivelle tous les êtres dans la médiocrité, elle s'épanouit dans le rythme des valeurs hiérarchiques spirituelles. Soyez miséricordieux pour vos frères restés sur les glacis du temple, tendez-leur votre main pour les hausser jusqu'à vous.
La Fraternité ne réside pas dans une sensiblerie humanitaire encline à excuser toutes les faiblesses, elle comporte un amour fort et courageux qui soutient, corrige et réconforte. Aimez-vous les uns les autres et réformez mutuellement vos tendances mauvaises.
La Justice est la base de toutes les vertus, lorsque sa rigueur inflexible est tempérée par la Bonté et le pardon des injures, qui sont l'essence même de la Charité. Soyez intransigeants pour vous-mêmes, mais oubliez les embûches semées sur votre route par vos frères égarés.
Regardez encore ! Le rayonnement du divin Logos, Tout-Puissant organisateur des mondes, Sublime Pasteur qui donne sa vie pour ses brebis, vient à vous dans la splendeur du Tha-bor. Écoutez toujours ! En votre conscience magnifiée, le chœur des Anges chante, comme jadis à Bethléem de Juda : Vax hominibus bonoe voluntatis. Et de vos lèvres monte la réponse de l'adoration humaine : Gloria in excelsis Deo.
TERRAIN D'ENTENTE
Une seule vérité existe, qui réside dans la synthèse de toutes les traditions particulières. Celles-ci, en effet, ont une même source et se sont diversifiées sous l'influx des conditions intellectuelles ou climatériques et des lois de l'hérédité.
La liberté de pensée et la liberté de conscience sont les bases nécessaires du développement spirituel. En conséquence, aucun enseignement dogmatique ne peut servir de règle générale. Seule la Vérité sous son aspect universel peut exiger l'assentiment unanime. Les dogmes, trop souvent, divisent la vérité, mais le soleil fait communier tous les yeux sains dans une même vision. Dans un schéma susceptible de servir de cadre spécifique à la pensée ésotérique humaine, on peut énoncer les propositions suivantes :
Etre - Réalité - Absolu - Dieu - Esprit, sont
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MEDITATIONS INITIATIQUES
une seule et même chose. Ce sont des concepts qui recouvrent une même essence.
Dieu est un dans son essence et multiple dans ses manifestations. De lui, on ne peut rien dire sinon par analogie. Il est au-dessus de tous les concepts, de toutes les représentations ; il est transcendant à chacune de ses manifestations externes comme à leur ensemble.
Les manifestations externes de Dieu constituent le domaine de la Science et de la Philosophie. Mais celles-ci, en dehors des données de l'expérience, ne peuvent imposer une interprétation unique. Chaque homme peut choisir le sentier de ses tendances particulières, pourvu que ce sentier soit dans l'ordre de la Vérité.
La religion est du domaine de la conscience. Chacun peut, en se conformant aux principes universels, la concevoir et la pratiquer sous son angle personnel.
Aucun rite n'est universel, c'est-à-dire essentiel. Chaque rite est un moyen d'ascèse, une voie vers l'illumination, car il faut un rite, c'est-à-dire un véhicule, pour contraindre l'intelligence à la discipline de la pensée. La valeur d'un rite se reconnaît à ses résultats ; quand il conduit dans la voie droite, il peut être considéré comme bon, nonobstant ses modalités.
TERRAIN D ENTENTE 6
Les rites sont constitués par des cérémonies symboliques. Mais les symboles ne sont pas la Vérité, ils lui servent de voile et ils appartiennent à tous. Ce sont des idéogrammes qui recouvrent une substance extensible ; chacun peut la concevoir sous l'angle de sa pensée en respectant le signe dans son essence.
Pour découvrir la vérité sous le voile des symboles, il faut la Foi et la Méditation.
Sans la Foi, le doute s'insinue dans l'intelligence, et le doute c'est le découragement, le scepticisme, la porte ouverte à l'erreur.
Sans la Méditation, l'intelligence s'arrête à l'écorce phénoménale et ne saisit pas l'essence réelle, la spiritualité des êtres.
La Méditation ne s'appuie pas seulement sur le raisonnement inductif et déductif, elle fait appel à l'intuition, cette faculté essentielle qui est à l'esprit ce que le sentiment est à l'âme et l'évidence à la raison. L'intuition, pour la Foi, est un cœur et un cerveau, car la Foi n'est pas simple crédulité ou croyance rigide à l'inconnaissable, c'est une attitude aussi souple et logique que l'adhésion scientifique, mais sur un autre plan, les données intuitives n'ayant aucun rapport avec les données expérimentales.
Par la Méditation, l'intelligence s'élève de l'individualité transitoire à la personnalité universelle. L'individu, en effet, se résorbe dans l'espace et le temps, mais la personne spirituelle se prolonge en mode transcendantal. L'individu est le réceptacle des passions basées sur l'égoïsme et c'est aussi le Devenir. La personne est le réceptacle de l'essence, et comme elle, est immuable ; sa vie ne s'écoule pas, elle s'amplifie et se multiplie par le jeu de son activité interne.
L'individu n'assimile pas, il s'entoure d'un monde phénoménal, créé à son image, comme d'une cuirasse adventice. La personne, au contraire, repousse toute contingence extérieure et irradie sa propre substance en harmonie avec l'être universel. L'individu se complaît dans l'objectivité du monde extérieur dont il est un rouage solidaire. La personnalité va plus loin, elle s'élève au concept de subjectivité qui fait d'elle un centre de réalisation autonome, susceptible de poursuivre, sur son plan spécifique, l'œuvre de Dieu. Elle rejette donc toute liaison infrangible avec le sang, la race ou la terre ; elle manifeste sa transcendance en s'identifiant à l'Esprit. Elle se déifie, en quelque sorte, en établissant entre elle et l'absolu un équilibre relatif, mais indépendant des circonstances de temps, de lieu et d'opportunité...
ÉVOLUTION DE LA GNOSE
Dieu a donné à l'homme l'intelligence, c'est-à-dire la faculté de comprendre, d'analyser et de synthétiser, mais il ne lui a pas donné la science. Pour parvenir à la science, il faut mettre la volonté au service de l'intellect, il faut conquérir la vérité par un effort personnel.
C'est pourquoi la parole de Dieu se perçoit par étapes ; à première vue, dans son sens immédiatement intelligible, elle contient la seule vérité susceptible d'être saisie par les hommes les plus instruits de l'époque où elle a retenti. Jésus, le porte-parole de Dieu, a parlé le plus souvent en paraboles pour se mettre à la portée de ses auditeurs. A ses apôtres, il a parlé autrement et nous en avons un faible écho dans l'évangile de Jean. Il leur a dit aussi : " J'aurais encore beaucoup de choses à vous annoncer,
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mais vous ne sauriez les porter maintenant. Lorsque l'Esprit de Vérité sera venu, il vous guidera ".
L'Esprit de vérité est venu à diverses reprises. Il est venu au Cénacle et les apôtres ont appris à clamer sur les toits la vérité du moment. Il est venu sur la route de Damas et Paul fut illuminé pour écrire ses épîtres. Il est venu influencer les génies créateurs de la science. A chacune de ses descentes dans le monde, nous avons compris la vérité sous un angle nouveau et toujours plus large. Le sens des écritures a dépouillé plusieurs de ses voiles. Il en reste encore à soulever ; ils tomberont un à un lorsque notre œil sera harmonisé avec une plus grande lumière. Ainsi se crée la Gnose, de proche en proche, sous l'influx de l'Esprit qui choisit ses prophètes parmi les hommes dont la volonté sait briser les obstacles.
LE TEMPS
La science, après la philosophie, consent à proclamer ce principe : la succession seule rend le temps sensible. Pour toutes deux, par conséquent, la succession est l'essence intelligible du temps. En apparence au moins elles ont raison, et l'homme, dont la vie physique, intellectuelle et morale est un perpétuel torrent, apprécie le temps plus et mieux que tous les êtres créés, étant un athanor d'incessantes transformations, objets d'une conscience parfois terriblement aiguë.
La vie physique de l'être humain s'écoule, en effet, selon un rythme inéluctable et sans retour. Sa vie animique est cadencée par les besoins périodiques et les passions renaissantes aussitôt qu'assouvies. Ceci lui est commun du reste avec l'ensemble de la création. Mais sa vie
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intellectuelle et morale situe le temps dans l'individu intérieur, elle le précipite ou le retarde par la pensée ; par la mémoire et l'imagination elle relie le présent au passé ou à l'avenir, elle en fait un tout cohérent, considéré sous l'angle de la réalité à laquelle il sert de cadre et de trame : cadre mobile, trame à chaque instant créée par le devenir psychologique.
Nous voici donc en présence de deux sortes de temps dont la soudure imaginaire ou réelle échappe à l'analyse superficielle. Et pourtant le temps humain, celui dont nous sommes la victime ou le maître, le temps intérieur est fonction de ces divers éléments. Il suit une courbe dont chaque point est, en quelque sorte, un différentiel, car il est pour nous le témoin de la succession phénoménale et le témoin de nos états d'âme. Ces deux mouvements s'équilibrent par une vitesse inversée : plus l'un est rapide plus l'autre est faible. Dans la vie physique, l'enfant mesure le temps avec une extrême rapidité car il se précipite vers sa jeunesse et son âge mûr. L'adulte stationne visiblement et le vieillard claudique jusqu'à l'épuisement final. La vie instinctive et passionnelle suit un rythme analogue différencié par les possibilités de la première. Dans la vie intellective et morale le
LE TEMPS 7$
temps accentue progressivement sa vitesse. Chez l'enfant il est lent ; pour lui, une idée est un monde, un geste est un travail d'Hercule, il voit devant lui et le temps est une immensité, faute de points de repère ; les jours sont des émerveillements qui rendent les années longues comme des siècles. L'homme mûr est loin déjà sur la route de la vie ; chaque pas depuis son adolescence a été marqué par une passion, par une idée, par un acte ; il voit derrière lui, il pèse et compare ; le temps s'enfuit comme un rêve, les années sont des mois. Le vieillard est au périhélie de la courbe, le mouvement de la vie physique s'est pour ainsi dire annihilé, sa mémoire lui retrace tout le passé, son imagination n'est plus soutenue par l'immensité de l'avenir et sa volonté n'a plus de support dans le monde extérieur ; le temps s'enfuit à la cadence d'un cyclone, c'est à peine si l'année est faite d'un soir et d'un matin.
De quoi le temps intérieur est-il fait ? De l'intensité de la vie. L'enfant vit intensivement, pour lui le temps est long. Le vieillard vit au compte-gouttes, le temps s'écoule entre ses mains tel un fleuve dont la rapidité s'accroît comme il descend de l'amont vers l'aval éternel.
Entre le temps extérieur, succession de phéno-
mènes naturels, et le temps intérieur, succession de nos états d'âme, il doit, comme nous l'avons laissé entrevoir, s'établir une interpénétration susceptible de les rendre solidaires. Le point de rencontre et de fusion, c'est l'effort numain, c'est-à-dire l'actualisation de nos potentialités expansives. Sans ce support générateur, le temps cosmique serait inintelligible et partant inexistant. Le temps humain est donc la matrice du temps extérieur. Mais celui-ci est un reflet, une quantité mathématique inexorable dans son rythme uniforme, sa seule réalité est en dehors de lui. Le premier, au contraire, est quelque chose de vivant qui s'affirme, se ralentit ou s'accélère suivant nos sensations, nos désirs et nos pensées, selon la tension ou le relâchement de notre activité personnelle. Le temps extérieur est une diversité discontinue toujours identique à elle-même, sans contenu spécifique, dont le passé est mort, l'avenir incertain et le présent insaisissable. Le temps intérieur est une réalité accusée par la conscience, c'est un présent perpétuel, synthèse stabilisée du passé, et un dynamisme créateur de l'avenir.
Pour tous les deux le thème de la durée apparaît identique en surface, mais dans la profondeur, l'un est un écoulement, il nous échappe
sans cesse comme le sable tombé du sablier ; l'autre fait, pour ainsi dire, partie de notre moi, c'est l'acuité même de notre conscience ; en sa fugacité apparente, il s'accumule dans notre mémoire, se vitalise dans notre imagination créatrice, c'est le ciment de nos actes et le véhicule de notre évolution. Si nous prenons conscience du temps intérieur, plus rien des contingences terrestres, plus rien du temps extérieur ne pourra nous atteindre, nous serons déjà transposés sur le plan de l'éternité.
PHILOSOPHIE ET RELIGION
Selon Schopenhauer, l'homme est un animal métaphysique ; pour d'autres, c'est un animal religieux. Ces deux définitions semblent contradictoires car le même Schopenhauer écrit : " Nul homme religieux n'est philosophe et nul philosophe n'est religieux ". Les arguments sur lesquels est étayée cette affirmation sont peut-être spécieux. Le religieux, dit-il, n'a pas besoin de philosophie puisque la religion, pour lui, doit tout contenir ; quant au philosophe, il récuse la religion car il a libéré son action de toutes les lisières du dogme et de la foi. Pour le penseur, le problème est tout autre. La philosophie apparaît comme le vestibule de la religion et celle-ci, éclairée et véritable, réclame impérieusement une philosophie ; en d'autres termes, la religion est la transcendance de la philosophie.
Beaucoup s'autorisent de cette transcendance pour proclamer un hiatus absolu entre les deux et par conséquent leur incompatibilité. Il n'y a pas de nette coupure de l'une à l'autre, mais seulement une zone d'instabilité relative, provoquée par nos moyens d'investigation ; ainsi entre l'esprit et la matière, il n'y a pas solution de continuité, la seconde étant une nécessaire manifestation du premier en l'état actuel de nos facultés représentatives.
L'erreur humaine provient d'une confusion. Il y a, en effet, deux aspects religieux : l'un s'épanouit dans le temps, l'autre dans l'éternité ; celui-là s'incorpore dans la collectivité, celui-ci dans la conscience hypostatique individuelle ; en conséquence, le premier c'est la lettre et le second l'esprit. Il y a une lumière extérieure dont l'apparence est le plus souvent étrangère à la réalité ; elle nous apporte la contrainte avec l'effroi de ne point la refléter dans sa pureté originelle ; entre elle et nous il y a l'abîme exprimé par le dualisme.
Il y a une lumière interne, partie intégrante de notre propre essence ; nous ne pouvons l'apercevoir sans résorber l'écran du monde extérieur tendu entre elle et notre entendement
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par l'activité sensorielle, sans un dur effort d'introspection. Elle nous apporte la liberté avec la joie ; elle et nous ne faisons qu'un avec Dieu, comme le voulait Plotin. Il faut trouver ce Dieu interne et ne point rechercher le Dieu externe, objet du culte collectif et temporel. Ainsi la religion est un état de conscience et non pas un acte cultuel ou la manifestation d'une pensée. Elle est inséparable de nos pensées et détermine certains actes, mais elle comporte l'amour dont notre intelligence est la hiérophanie, en vertu de l'unité fondamentale de notre être.
Ici apparaît donc l'évidente parenté de la philosophie et de la religion. La première forge le verbe humain, la seconde le transforme, l'exhausse et le relie au Verbe universel. On peut être religieux sans se nourrir des quintessences philosophiques, mais tout philosophe véritable tend nécessairement à la religion, complémentaire de la philosophie. Car le vrai Dieu est celui de la connaissance, magnifié par l'amour et révélé par la conscience intuitive.
TABLE DES MATIÈRES
Dieu est un acte pur 7
Dieu est amour 9
Dieu dans la conscience humaine 13
La charité 17
L'humilité 21
La foi, faculté spirituelle 26
La foi, confiance en la véracité de Dieu.. 30
La prière 35
Petitesse et grandeur de l'homme 39
La mission de la douleur 44
Prédestinés 49
Mors et vita 52
Plus un adepte s'élève 55
Ne judices... 58
Moïse, enlève ta chaussure... 62
Terrain d'entente 65
Evolution de la Gnose 69
Le temps 71
Philosophie et religion 76
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